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Jacques Lizène, cartel sans oeuvre, 1973

C’est sans doute, l’une des plus pertinentes applications de l’extension du domaine du « Perçu – non perçu » (1972) : le cartel sans œuvre, principe que Jacques Lizène conçoit en 1973. Notons que divers travaux annoncent ce protocole et dispositif. Parmi ceux-ci, dans le domaine filmique, « L’absence de sujet filmé », œuvre perdue, mais très aisément reproductible. En 1971, Lizène réalise un film en gardant le cache sur l’objectif de la caméra. Projeter le film revient à projeter un carré noir. L’artiste commente son œuvre en qualifiant son geste de « très sot ! Très bien ».

Cela tombe sous le sens : le principe du cartel sans œuvre est d’exposer un cartel, sans l’œuvre que celui-ci décrit. Lapalisse ne l’aurait pas mieux dit. C’est très sot, donc c’est très bien. Ainsi, en l’occurrence : « Naïades. Jeunes femmes nues s’ébattant bruyamment au bain » (1973). Jacques Lizène aurait pu l’exposer seul, placé à bonne hauteur, isolé sur la cimaise. Il a préféré cette fois le placer comme un cartel, à côté d’une toile trouvée et quasi vierge, à peine préparée. Dans un précédent remake, en 2012, ce même cartel évoquant le bain des naïades accompagnait un petit encadrement vide. Singulière osmose du pictural et du scriptural, où le visible n’est plus, il ne reste au spectateur qu’à imaginer ces nymphes nues et aquatiques, filles de Zeus, divinités champêtres, habitant les fontaines, les marais, les lacs, les sources, les rivières et fleuves, et toute l’histoire de l’art, tant les naïades et plus généralement les femmes nues au bain, y abondent.  Il y aura, assurément, autant d’images mentales des « Naïades », que de lecteurs du mot « Naïades »

Si les Naïades sont hors champ, tout comme le lieu du bain, on remarquera que Jacques Lizène met l’accent sur le sens de l’ouïe, jouant sur toutes les limites de nos champs de perception. Ces Naïades ne prennent pas seulement leur bain, elle s’y ébattent, et même bruyamment. Cette information supplémentaire, quelque peu inattendue dans le domaine pictural, annonce un prochain remake. Le cartel des Naïades sera accompagné d’un enregistrement sonore.  Une captation sonore de bruits de piscine, ou de cour de récréation, annonce le Petit Maître, qui décidemment, ne s’ennuie pas un seul instant.

Cartel sans oeuvre

Naïades.
Jeunes femmes nues s’ébattant bruyamment au bain.
Cartel sans œuvre, 1973. En remake, 2014.

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