Résonances, Guy Mees, Niveauverschillen, 1970

Guy Mees

Guy Mees
Niveauverschillen, 1970
6 photographies NB, tirages argentiques, (6) x 12,5 x 8,8 cm
Collection privée, courtesy galerie Nadja Vilenne.

Tout récemment, la galerie Nadja Vilenne a projeté le film collectif que Jacques Charlier produit pour la Biennale de Paris, édition 1971, un film conçu dans un esprit très proche des travaux de Gerry Schüm, destiné à rendre compte des états de l’art en Belgique à l’aube des années 70. Parmi les contributions à cette œuvre collective, il y a cette singulière et désarmante séquence signée Guy Mees : « Portretten » (« Portraits »). Celui-ci poursuit un travail en cours, un cycle d’oeuvres sur les « différences de niveaux ». Le travail a débuté en 1969 et se poursuivra jusqu’en 1974. C’est une suite de photos, de films et de projections de diapositives, des travaux réalisées en intérieur ou en extérieur, dans des lieux d’expositions, des jardins privés ou des lieux publics. Tous participent d’un même principe à l’allure performative : trois personnes (des quidams, des amis, la famille, l’artiste lui-même, son épouse Lotte ou son galeriste Marc Poirier dit Caulier) apparaissent sur des blocs itongs de hauteur différentes, disposés en escaliers à l’instar d’un podium d’honneur. Au fil des clichés, toujours en série de six, ils intervertissent leur place face à l’objectif de l’appareil photographique qui n’est là que pour enregistrer ce processus de régulation, ses perturbations et mises en perspective. Guy Mees analyse ainsi les processus de distinction, d’interchangeabilité, de différences, de classification, de sérialité ou de normalisation, à l’heure où surgit un large débat sociétal portant sur les relations de pouvoir et régulations hiérarchiques, né du mouvement contestataire de 1968. Les portraits filmiques sont enregistrés de la manière la plus simple qui soit. Un seul plan d’ensemble ; au fil des images, les trois protagonistes échangent leurs places. Les portraits photographiques, de la planche contact aux grands tirages professionnels, édités en studio, respectent tout ce principe d’anonymat qui caractérise l’ensemble. L’exécution est consciemment non artistique, la photographie d’amateur s’introduisant ainsi dans le champ de la photographie conceptuelle. Alors que notre monde est aujourd’hui en butte à bien des compétitions qui mettent en danger de fragiles équilibres, ces travaux de Guy Mees nous ramènent à une très saine relativité. Guy Mees, en effet, n’établit aucune hiérarchie définitive.

Guy Mees

Guy Mees

Guy Mees

Guy Mees

Guy Mees

Guy Mees

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Résonances, Jacques Charlier, Peintures Mystiques

Jacques Charlier

Jacques Charlier
Peinture mystique I, 1988.
Technique mixte, acrylique sur toile, cadre mouluré, objets trouvés (lance, sculpture, main en plâtre, console ouvragée, feuillage artificiel, livre), 200 x 350 cm

PEINTURES MYSTIQUES

« Cela se fait lentement… progressivement… Je constitue des familles d’objets… J’établis des filières assez précises, des scénarii… Je parcours chaque semaine des dizaines de kilomètres pour écumer les brocantes, les magasins… Je procède par coups de foudre successifs… Je passe plus de temps à chercher et à négocier qu’à travailler réellement. La mise en scène finale, les peintures sont faites assez rapidement, mais je suis toujours étonné du résultat. J’ai alors, moi aussi, l’illusion que toutes ces choses ont toujours vécu ensemble »[i]. Jacques Charlier répond à son hétéronyme Louis Vandersanden ; il évoque une série d’œuvres qu’il réalise durant les années 80. Bien qu’il s’agisse le plus souvent d’installations associant toile et objets divers, elles sont le plus souvent titrées « Peinture ». Parmi celles-ci, ces compositions où s’entrecroisent « peintures religieuses » et « peintures mystiques ». Et celles-ci ne sont pas une mince affaire. Jacques Charlier a en effet décidé de remettre sur un piédestal la plus célèbre bergère de France, Jeanne d’Arc, Sainte Jeanne d’Arc devrais-je dire, puisque béatifiée en 1909 et canonisée en 1920. Il est d’ailleurs piquant de constater que c’est Léon XIII qui initia la procédure en canonisation de Jeanne, après avoir également béatifier Rita de Cascia que Jacques Charlier, durant ces années 80, fréquente tout aussi assidument. Le pape déclarera à la signature de l’introduction de la cause : « Jeanne est nôtre ». Et oui, déjà ! Léon XIII ne sera de loin pas le dernier. La captation mémorielle, jusqu’à une véritable privatisation du mythe à des fins nationalistes, est toujours bien d’actualité.

Charlier chine donc les plâtres et les bronzes représentant Jeanne, avec ou sans étendard, à pieds ou à cheval, hiératique, orante ou donnant l’assaut, en armure ou heaume au pied. Au vu de la moisson, Jeanne a campé sur de nombreux buffets familiaux. Il rassemble de vieux livres, des biographies pleines de voix et de fracas, des hagiographies poussiéreuses, des objets divers, un cratère aux raisins factices, des lances, un portrait de style symboliste de la combattante auréolée. Ses propres toiles, lorsqu’elles ne sont pas nocturnes sont occupées par des ciels immenses. Règne ainsi dans ces diverses compositions comme un goût suranné pour le gothic revival, une atmosphère factice, théâtrale et dramatique, un souffle empreint de romantisme noir teinté de symbolisme. Ces dispositifs associatifs qui transfigurent en reliques les reliquats de l’histoire du goût et des idées, chinés sur les marchés, approchent ainsi le mystère, ses réalités transcendantes et indiscernables.

La plus sombre – « Peinture mystique I » – est également la plus lumineuse : une pointe de lance est posée contre la toile, touchant en plein une sphère céleste qui déchire la masse des nuages. Je pense à la redondance de « La Nuit Obscure » du mystique Jean de la Croix, aux premiers vers du poème, « dans une nuit obscure, par un désir d’amour tout embrasé… ». L’obscurité et la nuit ne sont pas uniquement synonymes de danger et d’effroi, mais aussi de mystère et de rêve, domaines tout à la fois ambivalents – et attirants – qui peuvent conduire à l’abîme comme à la connaissance. A côté de cette toile monumentale, aux dimensions d’une peinture d’Histoire, encadrée d’une moulure aussi factice qu’imposante, Jeanne caracole sur son piédestal. De l’autre côté de la peinture, un livre relié, « Le Ciel, nouvelle astronomie pittoresque », par Alphonse Berget, est posé sur une console et sous une main de plâtre noire comme la nuit. C’est la réponse du Berget à la bergère, une astronomie pittoresque, celle qui mérite d’être peinte, au côté de ces cieux peints, tempétueux et déchirés. Au pied de la console, de fausses branches de vigne vierge sont embrasées de couleurs automnales.

Dans ce cycle de « Peintures mystiques », Jacques Charlier associe l’histoire, le mythe et l’héritage de la déraison, en fait l’essence même du destin politico-religieux de l’image de Jeanne, figure maléfique pour Shakespeare, héroïne épique pour Jean Chapelain, personnage burlesque pour Voltaire, incarnation du peuple français cristallisant le sentiment national pour l’historien Jules Michelet, instrument du complot clérical pour Anatole France, féministe avant l’heure pour les suffragettes, femme opprimée pour Léonard Cohen ou Luc Besson. « Ce qui m’a attiré dans le phénomène pucelle, explique Jacques Charlier à Louis Vandersanden, ce sont les changements de polarité qu’a subit son image. Jeanne est d’abord condamnée par l’Eglise qui la brûle. En 1570 elle devient la patronne des catholiques contre les réformés… En 1793 les fêtes en son honneur sont supprimées, des statues sont fondues, on brûle son chapeau… (rires), ensuite Bonaparte autorise à nouveau le 8 mai. Puis les restaurateurs de la monarchie l’annexent, le patriotisme du 19e siècle et l’armée emboîtent le pas, suivis par tous les partis politiques… En 1942, Victor Vermorel souligne le caractère existentialiste de Jeanne ». Condamnée par l’Eglise qui la réhabilitera, digérée par les modes et les courants de pensée, mythe romanesque qui a inspiré maintes œuvres dans tous les arts, figure instrumentalisée par tous les courants philosophiques et idéologiques, l’image de Jeanne est tellement bipolaire qu’elle incarna la « sainte laïque », un comble du genre. Maître du factice et de la simulation, Jacques Charlier, depuis l’établissement de sa Zone Absolue (1970), a toujours été intéressé par ces principes de bipolarité, tout comme il ne cesse de sonder les phénomènes de mythes et de modes. Les objets qu’il introduit dans ses dispositifs y participent et réoxygènent des clichés bien précis. Surgit ainsi dans ses « Peintures mystiques » comme une contre-plongée oppressante, qui nous fait basculer du mysticisme à l’obscurantisme. En témoigne, cette « Peinture mystique IV », plus moderne, j’allais écrire d’après guerres, et que l’on prend comme une claque, Jeanne orante transfigurée, un drapeau français élimé frappé de la croix de Lorraine à ses pieds. Adulée à droite et à gauche dès la guerre franco allemande de 1870, pucelle convoitée, deux camps s’arrachent l’icône. A droite, elle est guerrière, monarchiste et pieuse, à gauche, elle est bergère issue du peuple, trahie par le roi et brûlée par l’Eglise. Ecartelée entre de Gaulle et Pétain, le premier ne cesse d’utiliser son souvenir, tandis que Vichy la récupère en la substituant à Marianne. Elle est aujourd’hui confisquée par l’extrême droite et je repense à cette parodie du 20 mai 2016 où un cortège de 5000 personnes suivit la dernière relique en date de Jeanne, un anneau qui lui aurait appartenu et qu’a acquis le parc de loisirs du Puy-du-Fou lors d’une vente aux enchères londonienne pour la bagatelle de 377.000 euros. Signe des modes et des temps. Jacques Charlier a bien raison : « Cela a assez duré… il faut reprendre Jeanne d’Arc à Le Pen… ».

[i] Jacques Charlier, L’Art à contretemps, pp.80-81

Jacques Charlier

Jacques charlier

Jacques charlier

Jacques charlier

Jacques charlier

Jacques charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier
Peinture mystique I, 1988.
Technique mixte, acrylique sur toile, cadre mouluré, objets trouvés (lance, sculpture, main en plâtre, console ouvragée, feuillage artificiel, livre), 200 x 350 cm

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier
Peinture mystique IV, 1988.
Technique mixte, acrylique sur toile, 120 x 100 cm, socle, statuette en bronze, livre et drapeau.

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Résonances, un mot d’introduction

Jacques charlier

Jacques Charlier
Peinture mystique I, 1988
Technique mixte, acrylique sur toile, objets trouvés, 200 x 350 cm

La résonance est un phénomène selon lequel certains systèmes physiques, électriques ou mécaniques, par exemple, sont sensibles à certaines fréquences. Un système résonant peut accumuler une énergie, si celle-ci est appliquée sous forme périodique, et proche d’une fréquence dite « fréquence de résonance ». Par extension de langage, elle est aussi faculté de résonner, propriété d’accroître la durée ou l’intensité d’un son, effet produit, écho rencontré, mode de retentissement d’un événement vécu ; elle est enfin ce qui fait vibrer le cœur et l’esprit. Toutes les œuvres rassemblées dans cette exposition ont cette capacité de résonance, en ce qu’elles sont échos et vibrations des états du monde : excès en tous genres, nationalismes exacerbés et place du religieux, combat féministes renouvelés, exode et immigration, multiculturalisme et chocs ou rencontres des cultures, compétition ou questions environnementales. Elles sont également résonances à d’autres créations d’un passé plus ou moins éloigné, résonances au cinéma ou à la littérature, à l’histoire de l’art et de la peinture, à celle des arts premiers. Le terme de résonances, au pluriel même, est sans doute le plus à même de rendre compte de ce phénomène de mise en mouvement de l’esprit au contact de l’autre, une mise en mouvement qui oblige au dépassement de ses limites et à l’inventivité d’un autre monde.

Avec des œuvres de : James Lee Byars, Jacques Charlier, Lili Dujourie, Charlotte Lagro, Sophie Langohr, Jacques Lizène, Emilio Lopez-Menchero, Jacqueline Mesmaeker, Guy Mees, Benjamin Monti, John Murphy, Pol Pierart, Maurice Pirenne, Valérie Sonnier, Raphaël Van Lerberghe, Marie Zolamian.

Vernissage ce samedi 18 mars à 19h
Exposition du 19 mars au 15 avril 2017.

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Suchan Kinoshita, TEFAF Curated Maastricht, last days

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita, Suchkino, 2011-2016

Une table que l’artiste a elle-même laqué, car le home-made participe de cette générosité qui caractérise sa pratique et de cet intérêt permanent pour l’expérience vécue, un plateau tournant qui incite au jeu et au partage entre les convives installés autour de la table, assis sur de petits tabourets également laqués de noir. Sur le plateau sont posées trente quatre petites visionneuses à œilleton unique dont l’artiste a customisé la chambre, une véritable exposition en elle-même, trente quatre œuvres au catalogue, chacune précisément titrée. C’est une multiplicité de petits mondes bricolés. Le spectateur incrédule passe ainsi avec jubilation de paysages imaginaires en trompe-l’œil duchampiens, de visions menaçantes en constructions psychédéliques. Suchan Kinoshita l’affirme elle-même, parmi toutes ses œuvres, celle-ci est peut-être la plus proche d’un esprit Fluxus, inscrite dans la continuité de la pratique artistique qu’elle a développé alors qu’elle collaborait aux projets du TAM, Theater am Marienplatz, à Krefeld, un lieu d’avant garde, performatif et de création collective actif depuis 1976. « Etre artiste est une notion tellement chargée de sens, dit-elle, parfois même prétentieuse. Je préfère les notions d’interprète, de travailleur, de danseur ; diriger l’œuvre et en être le joueur ». Un rôle qu’elle assigne aussi au public, au spectateur. De fait, dans le cas qui nous occupe, si le spectateur ne s’assoit pas à la table, s’il ne colle pas son œil aux œilletons des visionneuses, rien ne se passera. L’assertions duchampienne a sans doute bien souvent été galvaudée, mais ici, elle a tout son sens : c’est bien le regardeur qui fait le tableau. Le rôle confié au spectateur consiste à poser des gestes simples et quotidiens, s’asseoir, prendre l’objet en main, faire tourner la table, coller l’œilleton à son œil. Ainsi l’invite-t-elle à explorer les frontières entre rêve, imagination et réalité. L’interaction, la transmission, la projection permettent d’expérimenter différents niveaux de réalité. L’œuvre s’appelle « Suchkino », une contraction entre « Such », « Suchan », « Sucher » (en allemand, le viseur), « Suchen » (en allemand, rechercher) et « kino », le cinéma, mais aussi le mouvement, non seulement l’image mais aussi le corps en mouvement.

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

TEFAF Curated, TEFAF Maastricht, MECC Maastricht. Vendredi – samedi 11-19h – Dimanche 11-18h

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Remember « This is the show… », talk with Bart De Baere @ Whitechapel, London

This is the book of the show

This is the book of the show and the show is many things

Conversation ce soir à la Whitechapel à Londres entre Bart De Baere et Charles Esche, à propos de l’exposition « This is the show and the show is many things » (curator Bart De Baere), au SMAK à Gand en 1994. Une exposition devenue mythique, un formidable bordel en processus perpétuel qui eut toute son importance pour la galerie Nadja Vilenne. Aux côtés de Louise Bourgeois, Anne Decock, Fabrice Hybert, Henrietta Lettonne, Mark Manders, Maria Roosen, Claire Roudenko-Bertin, Luc Tuymans et Uri Tzaig, y participaient également Suchan Kinoshita, Honoré d’O et Eran Schaerf. Tous trois défendus par la galerie.

This Thursday – Exhibition Histories Talk: Bart de Baere

We are pleased to announce the thirteenth in our series of talks analysing and contextualising exhibitions through the personal accounts of the curators responsible, co-organised with Whitechapel Gallery, London.

On Thursday 16 March, director of M HKA, Antwerp, Bart de Baere will be in conversation with curator and writer Charles Esche discussing ‘This is the show and the show is many things’, an exhibition that took place at S.M.A.K, Ghent in 1994, alongside related events. Variously described as a ‘fun palace’, a ‘warehouse’ and a ‘wasteland’, this quasi-mythical exhibition brought to the fore a new wave of artists and an innovative format, incorporating dance to debates; opening up the space of process, relational capacity and whimsy.

The series is inspired by the Exhibition Histories books developed by Afterall, and published in association with the Center for Curatorial Studies, Bard College.

Exhibition Histories Talks: Bart de Baere
Thursday 16 March 2017, 19:00–20:30
Zilkha Auditorium
Whitechapel Gallery
77-82 Whitechapel High Street
London
E1 7QX

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Jacques Charlier et alii, Entre nous quelque chose se passe…, Collège De Valk, Leuven

Jacques Charlier, mais aussi Guy Mees, Walter Swennen, Lili Doujourie ou Patrick Corillon exposent à la Faculté de Droit de la KUL à Leuven. Collection CERA Foundation / Musée M.

Jacques Charlier

Jacques Charlier, Paysages professionnels, 1970 (photo Dirk Pauwels)

Guy Mees

Guy Mees, Portretten (Niveauverschillen), 1970 (photo Dirk Pauwels)

Walter Swennen

Walter Swennen, Konijn et Canard (2001), Noeud papillon (1999) (photo Dirk Pauwels)

Avec ‘Entre nous quelque chose se passe…’, le Musée M expose de l’art contemporain belge extra muros
Mardi 14 mars 2017 — Du 17 mars au 9 juillet 2017, le Musée M de Louvain, en collaboration avec la Faculté de Droit de la KU Leuven et le soutien de Cera, présente au Collège De Valk quelques œuvres d’art contemporain belge. L’exposition Entre nous quelque chose se passe… est une sélection d’œuvres de différents artistes belges : Jacques Charlier, David Claerbout, Patrick Corillon, Lili Dujourie, Christoph Fink, Guy Mees, Ria Pacquée, Walter Swennen, Philippe Van Snick et Jan Vercruysse. Les œuvres exposées sont un prêt de longue durée de Cera à la Collection M.

Des œuvres qui dialoguent entre elles

Abstraite ou figurative, équivoque, évoquant des relations entre les gens : il existe pour une œuvre d’art plusieurs manières de créer une tension. Chaque œuvre d’Entre nous quelque chose se passe… suggère une certaine tension ou dualité. Le titre de l’exposition y fait référence et est une métaphore sur le fait d’exposer ou de collectionner les œuvres d’art. Que se passe-t-il lorsqu’on réunit dans une même pièce plusieurs œuvres d’une collection ? Quel est le rapport qui s’établit entre elles ?

Par ailleurs, le titre fait référence à une œuvre vidéo de Ria Pacquée, visible à l’exposition. La vidéo documente le comportement de visiteurs d’un parc de la ville de Paris. Le résultat est le portrait de passants anonymes qui exécutent avec concentration des mouvements répétitifs. Inconsciemment, leur attitude ressemble à la nôtre, en tant que spectateurs.

Une bibliothèque-salle de musée

Depuis 2013, des expositions temporaires sont organisées chaque année dans la bibliothèque du Collège De Valk. Le bâtiment ne présente toutefois que peu de similitudes avec les salles de type white cube qui accueillent habituellement les œuvres d’art contemporain. Cet espace d’exposition semi-public crée un contexte fonctionnel dans lequel les étagères à livres et le mobilier de lecture ne laissent que peu de place aux œuvres. Par ailleurs, vu les quelques centaines d’étudiants qui passent chaque jour à la bibliothèque, ce site possède un gigantesque potentiel. Au cœur du silence et de la concentration, les œuvres invitent le quidam à les regarder, à s’interroger, et à les regarder encore.

Une collection qui vit

Depuis 2012, le Musée M de Louvain gère la collection d’art contemporain constituée par Cera depuis 1998. Cette collection comprend exclusivement de l’art belge d’après 1945 et s’est récemment enrichie de nouvelles acquisitions. Chaque année, M organise une exposition présentant plusieurs œuvres sélectionnées dans la collection et prêtées à long terme par Cera. Cette manière de présenter la collection, allant de la monographie à l’exposition thématique, varie en permanence, de sorte que les œuvres changent régulièrement.

En pratique

Entre nous quelque chose se passe… se déroule du 17 mars au 9 juillet 2017 à la Bibliothèque de la Faculté de Droit de la KU Leuven, Tiensestraat 41, 3000 Leuven. Horaires : du lundi au jeudi de 9 h à 23 h, le vendredi de 9 h à 21 h, et le samedi de 10 h à 18 h. Entrée gratuite.

L’exposition est le fruit d’une collaboration entre le Musée M et la faculté de droit de la KU Leuven, avec le soutien de Cera.

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Résonances, vernissage ce samedi 18 mars

Suchan Kinoshita

La galerie Nadja Vilenne a le plaisir de vous convier au vernissage de l’exposition
Galerie Nadja Vilenne is pleased to welcome you

RESONANCES

James Lee Byars, Jacques Charlier, Lili Dujourie, Sophie Langohr, Jacques Lizène, Emilio Lopez-Menchero, Jacqueline Mesmaeker, Guy Mees, Benjamin Monti, John Murphy, Pol Pierart, Maurice Pirenne, Valérie Sonnier, Raphaël Van Lerberghe, Marie Zolamian

Vernissage le samedi 18 mars à 19h
opening Saturday 18 March 2017 at 7 PM

Exposition du 19 mars au 15 avril, jeudi – samedi 14-18h ou sur rendez-vous
19 March – 15 April 2017, Thursday to Saturday 2–6 PM or by appointment

Egalement ce 18 mars / Also this March 18
Programmez votre journée entre Maastricht et Liège / Organize your day between Maastricht and Liège

Nadja Vilenne galerie @ TEFAF Curated Maastricht – La Grande Horizontale, Suchan Kinoshita – MECC Maastricht – 11 AM- 7 PM
Patrick Regout, dessins minéraux @ Espace 251 Nord – Liège – vernissage / opening – 2-7 PM
Damien De Lepeleire, huiles sur toiles 1987 – 2015 @ La Comète – Espace 251 Nord – Liège – Finissage – 2 – 7 PM

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Suchan Kinoshita, La grande horizontale, TEFAF Curated Maastricht, Suchkino

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita
Suchkino, 2011-20126
mixed media, variable dimensions

Une table laquée, par l’artiste elle-même (le home made participe de cette générosité qui caractérise la pratique de Suchan Kinoshita, de cet intérêt permanent pour l’expérience vécue), un plateau tournant qui incite au jeu, au partage entre les convives installés autour de la table, assis sur quatre petits tabourets. Sur le plateau sont posés trente quatre petites visionneuses à œilleton unique dont l’artiste a customisé la chambre, une véritable exposition en elle-même. C’est une multiplicité de petits mondes bricolés. Le spectateur incrédule passe ainsi avec jubilation de paysages imaginaires en trompe-l’oeil duchampiens, de visions menaçantes en constructions psychédéliques. Transport fulgurant du regard et de l’esprit.
L’œuvre s’appelle « Suchkino », une contraction entre Such, Suchan, Suchen, chercher en allemand et kino, le théâtre, le cinéma, le mouvement.

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Suchan Kinoshita, TEFAF Curated, La grande Horizontale, Haïku for Liège

Le haïku est un petit poème extrêmement bref, une forme poétique très codifiée d’origine japonaise. Visant à dire et célébrer l’évanescence des choses, faisant toujours référence à la nature ou à un mot clé concernant l’une des quatre saisons, il répond à des règles de composition rigoureuses. D’origine japonaise, Suchan Kinoshita, connaît les règles du haïku. Elle les applique ici, distillant quatre éléments qui tous font partie de son vocabulaire plastique : un rideau transparent, un clepsydre rempli d’eau, une plante dépotée, un fusain ou plutôt devrait-on dire un lavis, monochrome, dilué, plein d’humus. L’eau, l’humidité semble traverser l’œuvre de haut en bas, goutte à goutte, filtrée par le cône renversé du rideau de douche, traversant le clepsydre, donnant renaissance à la plante dépotée, humectant le terreau du fusain. C’est bien sûr la plante qui fait office de « kugo », cette référence indispensable à la nature et au cycle des saisons, tandis qu’apparaissent les quatre éléments premiers, l’air et le vent dans le rideau, l’eau du clepsydre, la terre de la plante et le charbon, donc le feu, du fusain. Ce Haïku pour Liège, car destiné à une exposition liégeoise en 2009, évoque le cycle de la vie, la fertilité, le féminin, la promesse de renouveau, à la fluidité de la pensée. Elle fait référence à cette autre œuvre emblématique de l’artiste, titrée « Meaning is moist », la pensée est humide, la pensée est liquide.

(…) The reclining figure has a small canon of variations. The form itself may be more or less horizontal. The effigy form found on medieval tombs is very different from the recumbent form beloved of the early modern period, in which it reprised the Classical. The effigy is completely quiescent, with any action or movement associated only with the power of prayer. Henry Moore, indeed, much preferred the apparently living to the obviously dead, and normally chose a posture which would indicate frontal address. As Daria Santini outlines in her essay here, this goes back most obviously to the Etruscan and Classical forms denoting conversation and conviviality.

This kind of proper collegiality is far from the use of the form to denote sexual abandon. The more undulating the form, the more naked, the more expressive of sexual availability. While innumerable artists have traced the profile of the reclining female form, few have allowed it to melt into the near formlessness of Rodin and Schiele. The promise of plenty can be seen to reside within the reclining figure, male or female, and most typically as an allegory of water. The decoration of fountains is often constituted by reclining figures who can be seen to represent, in their potential merging with the land or the sea, a kind of natural home and conjunction of figure and landscape, agency and resource. The sedimentary rocks and tufa of the Roman basin allowed the figure almost literally to arise out of the ground. The earth as a female form, fertile and ready for insemination, is conjured up very succinctly in the image of Danaë receiving the shower of gold unleashed by Zeus in his passion. This very painterly image may be the trigger for modern-day treatments of the theme; it certainly echoes them. (…)

Penelope Curtis in « La Grande Horizontale », TEFAF Curated 2017, Maastricht, p.18

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

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Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita
Haïku for Liège, 2009
technique mixte, plante, dessin, verre, eau, plastique,
278 x 39 x 42 cm

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