EMILIO LOPEZ-MENCHERO

TRYING TO BE

 

(...) Laissons à Emilio Lopez-Menchero le soin de camper la figure de l’Amiral. Retour à Dada, il habita d’ailleurs celle de Rrose Selavy, maquillé et chapeauté tel Marcel Duchamps travesti en son altière ego, bêcheuse et désappointante. Extravagance, excentricité : l’artiste, lui-même hybride hispano-belge, tente régulièrement les réincarnations les plus diverses : essayer d’être le Balzac de Rodin, nu ou monumental, ou Picasso boxeur, ou Rrose Selavy, ou Che Guevara, ou Frida Kahlo, ou Raspoutine, ou Harald Szeemann, ou Russell Means façon Warhol, ou encore un sumo dandinant. Transformiste, déclinant toutes les flamboyances, même celles de pacotille, c’est à chaque fois l’image de l’artiste et de son double que l’artiste resculpte. Comme un voyage mimétique au travers de quelques mythes, sachant que ceux-ci révèlent à la fois le mensonge et la vérité. Voilà l’artiste, en quête d’identité, rangé au rayon des héros domestiques. Parodique ? C’est beaucoup plus subtil. La parodie sanctionne et consacre dans le même temps, sur un mode toujours paradoxal : se moquer en admirant, s’identifier en se démarquant. Elle est hommage et reconnaissance, sur le mode du travestissement burlesque. Pastiche ? Pas seulement non plus. Si Lopez-Menchero fait de temps à autre référence directe à une œuvre d’art, à un document historique, une photographie d’archive, il s’inspire aussi d’attitudes dans cette volonté «d’essayer d’être». «Alles ist Architektur» déclarait Hans Hollein dans son célèbre Manifeste de 1968 et se plaît à rappeler Emilio Lopez-Menchero. Et cette série de «Trying to be» en témoigne : il s’agit d’une construction existentielle comportant des couches autobiographiques comme d’autres référentielles, entre exhibition, travestissement, héroïsme domestique. Le tout récent «Lundi de Pâques», making off vidéographique d’un «Trying to be John Lennon» à venir, témoigne de tout cela. Être John Lennon un moment seulement ou plutôt en incarner l’image mythique, celle d’une pochette de long playing, résulte d’une longue série de tentatives quasi pathétiques de prendre la pose et d’habiter Lennon au fil d’un huis clos familial d’un réalisme saisissant, qui se déroule un lundi de Pâques. C’est là une construction aussi mentale que physique. Il en va de l’épilation d’un poil de cil comme de l’effort à fournir lorsqu’on lui lance pour défi de grimper le col d’Aubisque sur un vélo torpédo au guidon doté de cornes acérées, revêtu de la flamboyance d'un costume de toréador, rythmant ses coups de pédales d’un endiablé paso-doble. Assurément, en haut du col, l’artiste mérite de camper la figure de l’Amiral.(...) (Jean-Michel Botquin)

 

 

Recommander ce contenu

optimisé pour safari, chrome et firefox  |  propulsé par galerie Nadja Vilenne  |  dernière mise à jour  06.02.2016