







La série You Gold est exposée dans le cadre de l’exposition De overwinning van de mens op de dingen. Over sport, Lichtekooi Art Center, Antwerpen, jusqu’au 24 juin 2023
Emilio Lopez-Menchero participe à l’exposition Hotel Corona, acquisitions de la Vlaamse Gemeenschap. Du 27 mai au 5 novembre 2023.
Le communiqué du musée :
L’année 2020 est désormais gravée dans notre mémoire par le blocage collectif. Les centres d’art et les musées ont fermé, les projets ont été suspendus et la crise a laissé des traces financières. Chez les artistes aussi, qui ont perdu la rencontre avec leur public et se sont retrouvés repliés sur eux-mêmes, sans aucune perspective.
Pour compenser cette perte, la Communauté flamande a débloqué 3,75 millions d’euros en 2021 pour l’achat d’œuvres d’art d’artistes contemporains. Ce soutien a été le bienvenu pour de nombreux artistes et a en même temps donné un coup de fouet à la collection flamande d’art contemporain.
Avec l’aide des musées d’art contemporain en Flandre, un comité de 12 membres a acheté 256 œuvres d’art. Celles-ci ont été réparties entre les différents musées de Flandre, et 42 d’entre elles sont allées au S.M.A.K. L’exposition Motel Corona, d’après le titre de l’œuvre éponyme de Liliane Vertessen datant de 1994, rassemble une sélection de ces œuvres.
Des œuvres d’Elke Andreas Boon, Dries Boutsen, Ricardo Brey, Manu Engelen, Pélagie Gbaguidi, Maud Gourdon, Hamza Halloubi, Joke Hansen, Emilio Lopez-Menchero, Kurt Ryslavy, Elly Strik, Patrick Vanden Eynde, Koen van den Broek, Guy Van Bossche, Liliane Vertessen,…
Le musée de Gand est donc désormais propriétaire de pas moins de 23 Trying to be d’Emilio Lopez Menchero, cette série d’incarnations que l’artiste développe depuis le début des années 2000. Transformiste un brin excentrique, voire même extravagant, López-Menchero, tout en changeant d’identité, trouve la sienne. « Être artiste, dit-il, c’est une façon de parler de son identité, c’est le fait de s’inventer tout le temps » . Chaque œuvre est singulière, chaque Trying to be — c’est le titre de la série — est une aventure particulière, chacun est une construction existentielle, composée d’éléments autobiographiques, de renvoi à d’autres productions, d’une mise en scène de soi-même, d’une réflexion sur les signaux émis par l’icône précisément envisagée. C’est, in fine, une construction de soi au travers d’une permanente réflexion sur l’identité et ses hybridités, explorant quelques mythes, leurs mensonges et leurs vérités. L’artiste déambule ainsi entre exhibition, travestissement et héroïsme domestique.
D’une part, la claque de quelques slogans nous enjoignant à pratiquer la performance, la prouesse, la mobilisation totale des ressources individuelles et collectives, cette optimisation qui ne peut que nous amener à la réussite, au succès, au confort et à la richesse. Make it possible, Just do it, Think big, Get rich, do more, High Speed, The beginning of a New Aventure. D’autre part, une série d’entretiens, de conversations, que l’artiste a menés avec des hommes et des femmes souffrant de ce que l’on appelle communément le burnout. Sandrine Morgante investit le champ du syndrome d’épuisement professionnel, désigné par cet anglicisme [ˈbɝnaʊt], un syndrome qui combine une fatigue profonde, un désinvestissement de l’activité professionnelle, un sentiment d’échec et d’incompétence dans le travail, résultat d’un stress professionnel chronique : l’individu, ne parvenant pas à faire face aux exigences adaptatives de son environnement professionnel, voit son énergie, sa motivation et son estime de soi décliner.
Dans cette nouvelle série de dessins, intitulée You Gold, Sandrine Morgante dessine littéralement le burnout, reprenant injonctions et confidences, slogans et récits de souffrances. Je suis tétanisée, j’arrive plus à bosser, toutes ces injonctions contradictoires qui vous tombent dessus, j’ai complètement péter les plomb, plus c’est dysfonctionnel et plus vous êtes embarquée dans cette espèce de folie, J’aimerais démissionner, j’en peux plus, j’étouffe, c’est moi qui n’ait pas réussi à gérer la pression… Graphiques performatifs, bulles, trous noirs, majuscules, polices tantôt dynamiques et séductives, tantôt hachées et désordonnées, cris ou murmures, la composition de ces dessins au format d’affiche traduit le choc des mots, la perte de soi, les déflagrations systémiques et toutes ces histoires individuelles.
Sandrine Morgante participe à l’exposition De overwinning van de mens op de dingen. Over sport. organisée par Nadia Bijl, Pepa De Maesschalck et Vedran Kopljar au Lichtekooi Artspace, à Anvers. Exposition du 13 mai au 24 juin 2023.
Avec des oeuvres de : Aline Bouvy, Denicolai & Provoost, Harun Farocki, Meschac Gaba, Ingeborg Lüscher, Sandrine Morgante, Thenjiwe Niki Nkosi, Shervin/e Sheikh Rezaei, Amber Vanluffelen, Jivan van der Ende, Benjamin Verhoeven, Gert Verhoeven and Ken Verhoeven.
Le communiqué de presse :
Pourquoi ces hommes ont-ils besoin d’attaquer ? Pourquoi les hommes sont-ils troublés par ce spectacle ? Pourquoi s’y engagent-ils si complètement ? Pourquoi ce combat inutile ? Qu’est-ce que le sport ? Qu’est-ce que les hommes mettent donc dans le sport ? Eux-mêmes, leur univers humain. Le sport est fait pour dire le contrat humain. (Roland Barthes, Qu’est-ce que le sport ?)
Le sport est une métaphore enrichissante de la condition humaine, des structures de pouvoir politique, des relations sociales, du monde de l’art … . Le sport exprime-t-il la « supériorité » de l’homme sur la résistance des choses (la nature, les animaux, la pesanteur, le temps…) ? La recherche de la victoire sur les choses ne conduit-elle pas à une objectivation – le « devenir chose » – des humains eux-mêmes ? Et quel est le bilan de cette lutte pour l’homme et son corps ? Dans le climat social actuel, dans l’Anthropocène, où cette victoire sur les choses suscite une certaine honte, y a-t-il encore de la place pour la victoire de l’humanité sur les choses ? Ces réflexions constituent le terrain de jeu de cette exposition collective.
A propos de la contribution de Sandrine Morgante :
L’œuvre de Sandrine Morgante (née en 1986 à Liège) est marquée par la prépondérance du langage, qu’il s’agisse d’un texte (manuscrit) ou d’un texte oral. Ses œuvres sont éminemment verbales. Elles présentent avant tout un élément linguistique : un dialogue, un texte littéraire, un témoignage ou les cogitations d’un insomniaque. La manière dont l’élément linguistique est présenté entraîne le spectateur et fait ressortir une réalité brute, psychosociale ou socioculturelle dans toute sa singularité.
Sandrine Morgante montre des dessins de sa nouvelle série You Gold, pour laquelle elle a mené plusieurs entretiens avec des personnes luttant contre le burn-out. Dans une série de dessins de la taille d’une affiche, elle mélange les paroles de ces personnes avec des slogans que l’on trouve dans la publicité. Le travail est un sport. Les travailleurs sont invités à aller à l’extrême, à chercher et à dépasser leurs limites physiques mais aussi mentales. Le travail, c’est du commerce. Les services publics comme les entreprises doivent être rentables. Elle considère donc que les slogans marketing qui sont envisagés comme des messages de motivation pour les travailleurs en burn-out sont pervers car ils individualisent un problème systémique.
Les salles d’exposition du Musée Roger Raveel se composent d’une longue succession de pièces et de salles. Le visiteur peut découvrir les œuvres au cours d’une promenade à la fois physique et mentale. Une version miroir de l’exposition se révèle à la fin, étant donné que le visiteur doit revenir sur ses pas pour achever sa visite. Ce déplacement dans l’espace commence dans le hall d’entrée avec l’énigmatique (Vela) (2002-2003) de John Murphy, une toile d’un bleu de nuit profond. Le terme latin de vela dans le titre fait référence aux voiles d’un bateau. Une constellation illumine les heures sombres de la nuit, lorsque nos désirs et nos peurs se balancent au rythme de la mer. Notre regard suit la constellation du tableau qui, dès le début de l’exposition, nous propose une première énigme, une première halte dans le voyage.
Le chien apparaît également dans les grands tableaux de Murphy, The Song of the Flesh or The Dog who Shits (Lyra) (1993), A Different Constellation (Lupus) (1994) et The Invention of the Other (Vulpecula) (1994). Sur chaque toile, on aperçoit un chien, l’un détourne le regard, un autre dort et un troisième défèque. Simplifiés en dessins au trait et isolés dans un plan de l’image de couleur brun pâle, les chiens semblent ignorer aussi bien les constellations qui se profilent au-dessus d’eux à une distance incommensurable que le spectateur qui les rencontre dans la salle du musée. Les chiens peuvent être considérés comme des métaphores de l’être humain qui, même dans une quête fébrile de réponses, est et reste lié à son propre corps et à une pulsion de (sur)vie.
Le texte occupe une dimension cruciale dans l’ œuvre de Murphy Le titre est une entité autonome, physiquement séparée de l’œuvre – l’image, l’objet – et les deux coexistent sur un pied d’égalité. Les titres sont des extraits de textes existants, ils sont reconnaissables, mais difficiles à situer. Prenons On the Way. Are you dressed in the map of your travels ? (2003) le titre est aussi apposé en écriture manuscrite sur l’espace blanc qui entoure l’image encadrée, une carte postale trouvée représentant une mappemonde. Un perroquet empaillé, également un élément « recyclé », observe l’image à distance, figé dans le temps et l’espace. Comme souvent, le titre exprime un certain désir, un intérêt pour la sensualité, un penchant pour le toucher physique et mental. Chiens, girafes, un perroquet empaillé, les animaux apparaissent sous diverses formes dans son œuvre. Ils témoignent de l’intérêt que Murphy porte à la zoologie, outre l’inspiration qu’il puise dans la botanique, la cosmologie et l’histoire de l’ art.
Lorsque notre mémoire est activée, une expérience synesthésique se produit. Une odeur ou un son, certaines images ou des lieux spécifiques nous rappellent certaines expériences ou certains sentiments. Cette sensation nous envahit aussi quand on contemple les œuvres de John Murphy, en particulier ses peintures. Parfois, de grandes parties de la toile sont quasi entièrement monochromes, comme Nothing. Wait and See (1990-1991). La texture particulière de ce tableau lui confère un effet de voile. On regarde la couleur, la « peau » du tableau, et on prend conscience de l’insignifiance de son vide. Simultanément, nos pensées commencent à relier la couleur au bleu du ciel, à une douce journée printanière, aux fleurs qui éclosent dans le champ à côté de la maison où on a grandi. L’imagination et les souvenirs du spectateur complètent l’existence autonome du tableau sous nos yeux. La perception n’est pas uniquement actionnée par la tête, mais par le ventre et le cœur aussi. Cette expérience hautement intime gravite autour d’une réalité tangible mais énigmatique que l’on ne peut qu’entrevoir.
La surface des peintures de John Murphy fait penser à une membrane, un rideau doux et translucide qui dissimule de grandes parties de ce qu’il couvre alors que des détails subtils nous parviennent d’un autre monde. Dans The Deceptive Caress of a Giraffe (1993), un ton orange indéterminé recouvre la grande toile tandis qu’en haut, à droite, les oreilles de deux girafes émergent. Un regard attentif permet de voir que les girafes s’enlacent dans une étreinte apparente de leurs deux cous Toutefois, le mouvement en soi n’est autre qu’une tentative de domination de l’une sur l’autre. La couleur est une superposition de fines couches « tachetées ». Sa densité semble transparente, presque immatérielle, ce qui fait que l’image fantomatique de la girafe suscite l’impression qu’elle flotte dans un espace indéfinissable. (Mélanie Deboutte, dans le catalogue de l’exposition)
Dans The Joseph Conrad Series (2003), John Murphy reproduit 26 fois l’image d’un trois-mâts, chaque fois avec un titre différent. Il s’agit d’une photographie trouvée que l’artiste a récupérée. À partir de l’intérêt qu’il porte à la répétition, Murphy souhaite stimuler l’ œil du spectateur à chercher des similitudes et des différences, que seuls les titres contiennent. L’artiste ouvre à notre imaginaire un espace entre le mot, l’image et l’objet. Le bateau sur la photo porte le nom de Joseph Conrad, l’écrivain polonais-anglais connu pour ses récits de voyage qui se déroulent souvent en mer et s’articulent autour de valeurs morales et de solitude. Avec des titres comme E la nave va, Movement of the internai being et North of the future, John Murphy partage les sensibilités subtiles propres à son œuvre. Avec un raffinement froid, il crée une atmosphère mélancolique qui s’apparente à la saudade des chants de marins portugais. Le sentiment de manque est vague par essence et sa viscosité fait qu’il colle à l’âme. En même temps, le voyage promet de l’aventure, un déplacement dans le temps et dans l’espace et de nouveaux horizons. (Mélanie Deboutte, dans le catalogue de l’exposition)
Dans Tiepolo Series (2015), Murphy se concentre sur Pulcinella, un personnage de la commedia dell’arte. Figure mystérieuse et pleine de contradictions, Pulcinella traverse la vie en tant qu’homrne ou femme, masqué, avec une bosse et un nez crochu. L’ample costume blanc et le chapeau conique sont les vêtements typiques d’un personnage rusé, rustre et ambigu, parfois voleur et rebelle, mais qui combat toujours les catastrophes et intervient comme le sauveur d’autres personnages. Murphy s’inspire d’une fascinante série de dessins et de fresques du XVIIIe siècle, du peintre Giandomenico Tiepolo, fils du célèbre Giambattista Tiepolo. Dans cette série, Pulcinella apparaît dans diverses scènes dans lesquelles il fait des farces à grands coups de gestes et de grimaces grotesques. Fait remarquable, dans chaque scène, plusieurs personnages jouent le rôle de Pulcinella, comme autant de clones de lui-même. Murphy isole le protagoniste des autres personnages, les retire du spectacle très animé et les transfère sur un panneau blanc à la faveur d’un stylo et de gouache. La série qui en résulte se compose de regroupements absurdes du personnage démultiplié. Ici et là, Murphy reprend aussi les chiens qui suivent la scène extravagante en tant que spectateurs
John Murphy déclare dans une interview en 1979 « J’aspire à créer du sens dans l’espace entre les mots et l’image, sans en même temps spécifier le sens [ .. ] le sujet s’apaise quelque part en dehors des simples faits établis d’une œuvre d’art ». L‘expérience humaine est au cœur de l’ œuvre, qui est à la fois très personnelle, mais revêt aussi une dimension universelle et intemporelle. Murphy, qui peint exclusivement à la lumière du jour, invoque la richesse inépuisable des couleurs. « La couleur devient une voix, un son que nos yeux entendent», écrit Barry Barker. L’artiste transforme, il transpose la couleur en lumière voilée. La lumière de l’espace qui abrite l’œuvre suscite les nuances raffinées de la couleur. L’attention du spectateur s’aiguise, les sens sont stimulés. L’ expérience de perception visuelle prend le dessus sur la recherche d’un récit ou d’un sens. Un certain détachement règne sur les tableaux grâce à un maniement précis et contrôlé du pinceau. Les simples motifs linéaires flottent comme des « nomades magiques » dans le plan indéfini de l’image et contribuent au mystère dans lequel le spectateur peut se perdre. (Mélanie Deboutte, dans le catalogue de l’exposition)
La bibliothèque de l’université de Gand et sa célèbre tour des livres (Boekentoren), conçue par Henry van de Velde dans les années 1930, a récemment rouvert ses portes après un long processus de restauration. Bien qu’elle célèbre ce moment festif, cette exposition ne se concentre pas tant sur le bâtiment lui-même que sur sa riche imagerie. Au fil des ans, des photographes de renom tels que Lucien Hervé et Candida Höfer ont photographié la tour de la bibliothèque, tandis que des artistes tels que Jan De Cock et Anne Teresa De Keersmaeker ont réalisé des installations ou des spectacles de danse dans le bâtiment, documentés à l’aide de photographies et de films.
En juxtaposant de multiples images du même bâtiment, cette exposition aborde différents modèles de représentation architecturale : des photographies architecturales modernistes typiques d’Emile Sergysels des années 1930 aux explorations récentes d’Aglaia Konrad. En outre, l’exposition associe la photographie d’architecture à une myriade d’autres pratiques artistiques et photographiques telles que la photographie documentaire, la photographie de rue, les photos de mode, le photojournalisme, la photographie amateur, la peinture, la vidéo, et cetera – avec, bien sûr, la Tour du Livre comme fil conducteur.
Avec des œuvres de Dirk Braeckman, Kristien Daem, Jan De Cock, Walter De Mulder, Carl De Keyzer, Geert Goiris, Lucien Hervé, Candida Höfer, Jan Kempenaers, Aglaia Konrad, Marie-Jo Lafontaine, Agnes Maes, Paul Robbrecht, François Schuiten, Emile Sergysels et Walter Vorjohann, entre autres.
Exposition organisée par Steven Jacobs et Charlotte Dossche.
A l’occasion de cette exposition, A&S/Books publie un livre.
The Ghent University library with its famous Boekentoren or Book Tower, which was designed by Henry van de Velde in the 1930s, re-opened recently after a long restoration process. Although celebrating this festive moment, this exhibition does not so much focus on the building itself but rather on its rich imagery. For over the years, leading photographers such as Lucien Hervé and Candida Höfer have pictured the library tower whereas artists such as Jan De Cock and Anne Teresa De Keersmaeker realized installations or dance performances in the building that were documented with the help of photographs and films.
By juxtaposing multiple images of the same building, this exhibition deals with various models of architectural representation: from the typical modernist architectural photographs by Emile Sergysels from the 1930s to the recent explorations by Aglaia Konrad. In addition, the exhibition combines architectural photography with a myriad of other artistic and photographic practices such as documentary photography, street photography, fashion shoots, photojournalism, amateur photography, painting, video, et cetera – with, of course, the Book Tower as a common thread.
With works by Dirk Braeckman, Kristien Daem, Jan De Cock, Walter De Mulder, Carl De Keyzer, Geert Goiris, Lucien Hervé, Candida Höfer, Jan Kempenaers, Aglaia Konrad, Marie-Jo Lafontaine, Agnes Maes, Paul Robbrecht, François Schuiten, Emile Sergysels, and Walter Vorjohann among others.
Curated by Steven Jacobs & Charlotte Dossche.
On the occasion of this exhibition, A&S/Books publishes a book.
Jacqueline Mesmaeker et Werner Cuvelier participent à l’exposition Time Elapsed, conçue par Pierre-Philippe Hofmann. Imprimerie de la Banque Nationale – Bd de Berlaimont 56, 1000 Brussels. Vernissage le 16 avril de 14 à 18h. Exposition du 17 au 27 avril 2023
[EN] How does time affect the way we feel or the way we produce art? TIME ELAPSED brings together a variety of pieces that attempt to answer this essential question in their own manner.
[NL] Hoe beïnvloedt tijd de manier waarop we de werkelijkheid ervaren of de manier waarop we kunst produceren? TIME ELAPSED brengt verschillende werken samen die op hun eigen manier deze essentiële vraag proberen te beantwoorden.
[FR] De quelle façon est-ce que le temps agit sur notre façon de ressentir ou notre façon de produire des oeuvres? TIME ELAPSED rassemble des pièces hétéroclites qui tentent de répondre à leur façon à cette question essentielle.
16.04.2023 10.09.2023
Unreadiness
Jan Vercruysse, Nel Aerts, John Murphy
Vernissage: dimanche 16 avril 2023, 11h-17h
Du 16 avril au 10 septembre 2023, le musée Roger Raveel réunit des œuvres de Jan Vercruysse (1948-2018), de Nel Aerts (°1987) et de John Murphy (°1945). Le titre de l’exposition, Unreadiness, est tiré de Giacomo Joyce, un texte remarquable de seize pages que James Joyce a écrit lors de son séjour à Trieste en 1914, mais seulement publié à titre posthume en 1968[1]. Dans cette histoire d’amour, Joyce exprime des sentiments de solitude, de perte et de nostalgie. Le texte se compose d’un écheveau de références dissimulées sous un voile de connotations personnelles et d’archétypes universels.
Dans une démarche analogue, les artistes de cette exposition ont développé leur propre univers en puisant dans les sentiments intimes de l’auteur tout en tenant un discours imprégné d’histoire de l’art et de la littérature, émaillé de symboles iconographiques. Nombre de motifs récurrents trahissent un double sens : le voile, le rideau ou la scène, le masque et l’autoportrait, le choix de mots poétiques pour les titres. Dans un jeu sensuel de cacher et de dévoiler, les œuvres témoignent de la création elle-même : « l’art pour lui-même et pour son propre destin »[2].
La mélancolie, qui domine l’atmosphère générale de multiples œuvres, constitue un sentiment difficile à exprimer avec des mots : une sensation de langueur, de perte et de désir indéfinissable. Tel un navire sans cap flottant sur une mer immense, l’artiste se sent enfermé dans sa solitude et pour extérioriser ces questions existentielles, il ou elle se met en scène sous la forme d’un double, d’un personnage. Regarder et être regardé vont de pair. Les œuvres de cette exposition semblent exister dans une autre dimension, repliées sur elles-mêmes, à distance du spectateur.
Chacun des artistes interroge et expérimente sa discipline de prédilection – sculpture, peinture, photographie, poésie – à la lumière de l’histoire de l’art, attentif·ve aux traditions et aux failles du média. L’un·e recherche une pureté esthétique, l’autre l’attaque au contraire. Cela permet d’exposer les structures cryptées du langage, du sens et de l’image tout en portant une grande attention à la matière, au support, au volume dans l’espace et aux formats et en évitant une dimension narrative ou anecdotique.
Unreadiness relie des œuvres d’artistes de deux générations et des œuvres d’art de différentes époques, de la début des années 1980 à 2022. Plus que jamais, la question fondamentale du statut et de la place de l’art est d’actualité aujourd’hui. L’exposition tente d’apporter une réponse à un monde à la fois inassouvi et insatiable. Repliées sur elles-mêmes comme des machines hermétiques, les œuvres d’art permettent aux visiteur·ses de les approcher et de découvrir leurs formes étranges, leurs images qui les touchent et les troublent par leur beauté sereine, parfois absurde et toujours sincère.
[1] “Unreadiness. A bare apartment. Torbid daylight. A long black piano: coffin of music. Poised on its edge a woman’s hat, red-flowered, and umbrella, furled. Her arms: a casque, gules, and blunt spear on a field, sable.” – James Joyce, Giacomo Joyce, vert. Gerardine Franken, Uitgeverij De Bezige Bij, Amsterdam, 1969.
[2] Jan Vercruysse en conversation avec Carolyn Christov-Bakargiev, Flash Art International, n° 148, octobre 1989.
16.04.2023 10.09.2023
Unreadiness
Jan Vercruysse, Nel Aerts, John Murphy
Opening: Sunday 16 april 2023, 11 am – 5 pm
From 16 April to 10 September, 2023, the Roger Raveel Museum brings together works by Jan Vercruysse (1948-2018), Nel Aerts (1987) and John Murphy (1945). The title of the exhibition, Unreadiness, is taken from Giacomo Joyce, a sixteen-page text written by James Joyce during his stay in Trieste in 1914 and published posthumously in 1968.[1] In this love story, Joyce expresses feelings of loneliness, loss and desire. The text forms a tangle of references hidden behind a veil of personal connotations and universal archetypes.
In a similar way, the artists in this exhibition have developed their own universe that draws on the private feelings of the makers. In doing so they make use of an art-historical and literary discourse full of iconographic symbols. The poetic word choices in the titles hint at double meanings, as do a number of recurring motifs, such as the veil, the stage curtain, the mask and the self-portrait. In a sensual game of concealing and revealing, the artworks bear witness to the creation itself: ‘art for its own sake, and for its own fate’.[2]
The general mood in many of the works is that of melancholy, an undefinable sense of loss and longing. Like a ship floating off course on an open sea, the artist feels stricken by loneliness and seeks to express this existential dread through a doppelganger, a character based on themselves. Watching and being watched go hand in hand. The works in this exhibition seem to exist in another, self-enclosed dimension, at a remove from the viewer.
Each of the artists questions and tests their chosen medium – be it sculpture, painting, photography or poetry – in the light of art history, paying attention to its traditions and fault lines. While one seeks an aesthetic clarity, another attacks the very notion. The encrypted structures of language, meaning and image are exposed, with a great deal of attention paid to material, carrier, volume in space and formats. A narrative or anecdotal dimension is avoided.
Unreadiness connects works by artists from two different generations and artworks from different periods, ranging from the early 1980 to 2022. The underlying question about the status and place of art today is more topical than ever. The exhibition attempts to provide an answer to a world that is both unsated and insatiable. Turned in on themselves like hermetic machines, the artworks invite the visitor to come closer and become acquainted with their strange forms, their images whose tranquil beauty – sometimes absurd but always sincere – has the power to touch and move us.
[1] ‘Unreadiness. A bare apartment. Torbid daylight. A long black piano: coffin of music. Poised on its edge a woman’s hat, red-flowered, and umbrella, furled. Her arms: a casque, gules, and blunt spear on a field, sable.’ – James Joyce, Giacomo Joyce, vert. Gerardine Franken, Uitgeverij De Bezige Bij, Amsterdam, 1969.
[2] Jan Vercruysse in conversation with Carolyn Christov-Bakargiev, Flash Art International, no. 148, October 1989.
FR.
Le Teatro dell’architettura Mendrisio de l’Università della Svizzera italiana présente l’exposition WHAT MAD PURSUIT du 7 avril au 22 octobre 2023, promue par l’Académie d’architecture de l’USI et organisée par Francesco Zanot.
À travers une sélection d’œuvres photographiques d’Aglaia Konrad (Salzbourg, 1960), Armin Linke (Milan, 1966) et Bas Princen (Zélande, 1975), le projet explore la relation entre l’architecture et la photographie, et celle entre cette dernière et le contexte dans lequel elle est montrée, en se concentrant sur la complexité d’une imbrication qui place les œuvres au centre d’un processus constant de négociation entre le sujet et l’espace d’exposition. L’exposition questionne la fonction documentaire de la photographie, entendue ici comme un dispositif qui enregistre et transforme simultanément la réalité, tout en contredisant sa conception d’image bidimensionnelle en explorant sa matérialité, son corps et sa présence.
En présentant une cinquantaine d’œuvres créées par les auteurs dans des lieux et à des moments différents, avec des objectifs tout aussi hétérogènes, l’exposition explore les intersections entre la photographie et l’architecture, l’espace représenté et l’espace d’exposition. Dans les pratiques artistiques des trois auteurs, l’espace interne du cadre et l’espace externe deviennent des objets d’étude mais aussi de re-vision radicale par la médiation de la photographie. Chaque œuvre ou cycle d’œuvres active de nouvelles interprétations de sujets déjà soumis à des processus de représentation et d’interprétation, en introduisant de nouvelles couches de signification qui s’entrecroisent avec les précédentes. Au lieu de représenter (une fois pour toutes), la photographie déclenche ici une réaction en chaîne de resignification qui est, au moins théoriquement, sans fin. La photographie ravive et redémarre. C’est une question d’intersections, d’interactions, de chevauchements, de réactions, d’interférences.
Dans la série photographique Shaping Stones, Aglaia Konrad associe des bâtiments d’architectes connus à des œuvres anonymes, anciennes ou contemporaines, unies par l’utilisation d’un même matériau et par un mode de représentation, la photographie en noir et blanc, qui permet d’obtenir un amalgame aussi cohérent qu’étranger à toute catégorie reconnue. Armin Linke réutilise les images préexistantes de ses archives, prises à travers le monde au cours de sa carrière. Il les mélange pour former un nouveau récit qui dépasse le contexte original de production, remettant en question les notions mêmes de chronologie, de linéarité, d’histoire et d’uniformité. Bas Princen photographie d’autres représentations, s’interrogeant sur ce qu’il advient d’elles une fois qu’elles sont dupliquées et converties en images bidimensionnelles. Dans son travail, des détails d’éléments préexistants, tels que des peintures, des objets et des photographies, habituellement saisis dans leur intégralité, sont soumis à un nouveau processus d’interprétation, donnant naissance à des images nouvelles et indépendantes, capables de se détacher des images d’origine. L’artiste remet également en question la bidimensionnalité même de la photographie grâce à une technique d’impression basée sur le relief et dotée d’une qualité sculpturale inhabituelle.
EN
The Teatro dell’architettura Mendrisio of the Università della Svizzera italiana presents the exhibition ‘WHAT MAD PURSUIT. Aglaia Konrad, Armin Linke, Bas Princen’, from 7 April to 22 October 2023, promoted by the USI Academy of Architecture and curated by Francesco Zanot. Through a selection of photographic works by Aglaia Konrad (Salzburg, 1960), Armin Linke (Milan, 1966) and Bas Princen (Zeeland, 1975), the project explores the relationship between architecture and photography, and that between the latter and the context in which it is shown, focusing on the complexity of an interweaving that places the works at the centre of a constant process of negotiation between subject and exhibition space. The exhibition questions the documentary function of photography, here understood as a device that simultaneously records and transforms reality, while also contradicting its conception of a two-dimensional image by exploring its materiality, body and presence.
Devised specifically for the spaces of the Teatro dell’architettura Mendrisio, the exhibition ‘WHAT MAD PURSUIT. Aglaia Konrad, Armin Linke, Bas Princen’ is an original project that brings together photographic works by three international artists who work with this medium through different methods and approaches: Aglaia Konrad, Armin Linke and Bas Princen. By presenting some 50 works created by the authors at different places and times with equally heterogeneous purposes, the exhibition explores the intersections between photography and architecture, represented space and exhibition space. In the artistic practices of the three authors, the internal space of the frame and the external space become objects of study but also of radical re-vision through the mediation of photography. Each work or cycle of works activates new interpretations of subjects already submitted to processes of representation and interpretation, introducing further layers of significance that intersect with the previous ones. Instead of depicting (once and for all), here photography triggers a chain reaction of resignification that is at least theoretically endless. The photograph rekindles and restarts. It is a matter of intersections, interactions, overlaps, reactions, interferences.
In the photographic series Shaping Stones, Aglaia Konrad combines buildings by well known architects with anonymous works, both ancient and contemporary, united by the use of the same material and by a mode of representation, black and white photography, that makes it possible to obtain an amalgam as coherent as it is extraneous to any recognised category. Armin Linke re-uses the pre-existing images in his archive, taken around the world in the course of his career. He mixes them together to form a new narrative that goes beyond the original context of production, challenging the very notions of chronology, linearity, history and uniformity. Bas Princen photographs other representations, questioning what happens to them once they are duplicated and converted into two-dimensional images. In his work, details of pre-existing elements, such as paintings, objects and photographs, usually grasped in their entirety, are subjected to a further process of interpretation, giving rise to new and independent images capable of detaching themselves from the original ones. The artist also questions the very two-dimensionality of photography through a printing technique based on relief and endowed with an unusual sculptural quality.
Parallèlement à l’exposition consacrée à l’art vidéo en Belgique durant les années 70, Argos TV diffuse durant de mois de décembre à la fois dans sa vitrine, 62 rue des Commerçants à Bruxelles et sur son site internet, Argos TV, les séquences d’art sans talent de Jacques Lizène (1979).
Les Séquences d’art sans talent se composent d’une suite de clips et de pitreries parfaitement affligeantes. Jacques Lizène dans le rôle du Petit Maître liégeois, artiste de la médiocrité et de la sans importance, suit du doigt une tache sur l’écran, repousse la mire d’une pichenette, chante mais on ne l’entend pas, contraint son corps à rester dans le cadre de l’image, forme un étron en pressant un tube de couleur, se dandine et se désagrège entre deux petites femmes nues qui dansent en bord d’écran, une plume glissée entre les fesses, finit par brandir un drapeau blanc. Sur fond de projection d’une petite femme agitant ses seins nus, il prend ensuite la posture d’un minable cuisinier burlesque au visage enfariné débitant à grands coups de couteau son concombre, son aubergine, sa carotte, non pas son sexe, enfin c’est tout comme. Réalise finalement une peinture minable façon action-painting en crachant sur l’objectif de la caméra. Jacques Lizène a pris position pour l’art sans talent dès 1966, disqualifiant ainsi ses propres œuvres afin de couper toute tentative de critique fondée sur l’idée de jugement, ce qu’il fait au fil de ces séquences les déclarant mauvaises, à refaire, pas assez ratées, sans intérêt, insignifiantes, d’un infantilisme navrant, ineptes, injustifiables, inexpressives. Revendiquant la place du clown, Lizène joue à l’égo, affirmant la présence de l’artiste, et se dilue sans cesse. Avec un sens consommé de la provoc et du loufoque, il use des nombreuses manipulations qui émaillèrent les temps héroïques de l’art vidéo, split-screens, incrustations, virage des couleurs et prend ainsi à rebours la grande machine à hypnose que sera la télévision. Celle-ci ne s’y trompera pas. Le film est réalisé par le centre de production de la RTBF Liège en 1979. Il est prévu qu’il soit diffusé par l’émission Vidéographie en mars 1980, il est censuré par la hiérarchie ertébéenne quelques heures avant sa diffusion et ne sera mis au programme de l’émission qu’un an après, en avril 1981. Notons enfin que certaines de ces séquences renvoient à d’autres œuvres du Petit Maître, Contraindre le Corps, Être son propre tube de couleurs – peinture à la matière fécale, Minable Music-Hall et, bien sûr, Vasectomie, youppie.
Séquences d’art sans talent consists of a series of clips highlighting the antics and utterly outrageous behaviour of Jacques Lizèe. In the role of the Petit Maître liégeois, artiste de la médiocrité et de la sans importance [Little Master from Liège, artist of mediocrity and unimportance], Lizène follows a spot on the screen with his finger, pushes the test card away with a snap of his fingers, sings inaudibly, forces his body within the frame, makes a turd by squeezing a paint tube, waddles and disintegrates between two small naked female figures dancing at the edge of the screen with a feather between their buttocks, and ends up waving a white flag. Against the backdrop of a woman shaking her naked breasts, he then assumes the posture of a pitiful burlesque cook with a floured face, slicing up his cucumber, aubergine, carrot… not exactly his sex – well, it might as well be. Finally, he makes a shabby action painting by spitting on the camera lens. Since 1966, Jacques Lizène has taken a stand for talentless art, belittling his own works to head off any judicious criticism. Throughout these sequences, he declares them bad, to be redone, not failed enough, uninteresting, insignificant, glaringly infantile, inept, indefensible, and inexpressive. Claiming the clown’s place, Lizène plays with the ego, emphasises the artist’s presence, and constantly undercuts himself. With a consummate sense of provocation and zaniness, he uses the numerous manipulations that marked the heroic days of video art: split screens, chroma-keying, and colour shifts, thereby turning the great hypnosis machine of television on its head. The latter would not be fooled, though. The film was produced by RTBF Liège in 1979. It was to be shown on the Vidéographie programme in March 1980 but was censored by the RTBF hierarchy just a few hours beforehand and was not broadcast until a year later, in April 1981. It should be noted that some of these sequences refer to other works by the Petit Maître: Contraindre le Corps, Être son propre tube de couleurs – peinture à la matière fécale, Minable Music-Hall and, of course, Vasectomie, youppie.