Archives de catégorie : Aglaia Konrad

Art Brussels 2024, preview, Aglaia Konrad, Werner Cuvelier

AGLAIA KONRAD, I LOVE RUCKBAU

Les archives d’Aglaia Konrad sont très riches et portent sur l’urbanisme, l’architecture, la sculpture et le cinéma. Dernièrement, elle s’est intéressée aux processus dits de « Rückbau » (construction à l’envers) qui traitent de la démolition comme un aspect inévitable du progrès.

Le « Rückbau » en tant que processus sculptural ou filmique est une approche unique qui permet à l’artiste non seulement d’affirmer la démolition en tant que pratique architecturale étendue, mais aussi d’incorporer les débris physiques en tant que geste sculptural en relation avec l’image.

I love Rückbau témoigne de la fascination qu’Aglaia Konrad porte aux engins de chantier. Elle filme, ici, en caméra discrète – son smartphone- la destruction d’un bâtiment moderniste emblématique du paysage urbain bruxellois. Telle une archéologue, elle se plonge dans la signification des diverses couches dont est constituée la ville, depuis le choix des matériaux jusqu’à l’idéologie qui le sous-tend. Umbau, en allemand, signifie transformation, des transformations que l’artiste constate et dont elle témoigne.

WERNER CUVELIER, Statistic Project XVI

(…) Par contre, il sera le point de départ du Statistic Project XVI, initialement intitulé Bordellen Project, le projet des bordels, puis plus finement, Buitenverblijven, ce que l’on pourrait traduire par Seconde Résidence ou Abri Extérieur. C’est tout dire. Dans l’introduction de son pamphlet, ce guide de randonnée dans la jungle belge qui réveillera les somnambules, Renaat Braem fait une cocasse description du bâti urbain et surtout suburbain belge. Les routes sont des rues, écrit-il. Une digue de pierre vous sépare du paysage. Un vrai cauchemar pour les fournisseurs de matériaux. Des briques de toutes les couleurs imaginables et impossibles, du jaune féroce, du blanc maladroit, du vert savoyard au violet toxique, de l’encre bleue bon marché au noir sale des eaux usées. Les toitures crient leur présence par leur complexité, leur texture et leur couleur, l’amiante rose, les ardoises vertes, les tuiles rouges, les tuiles vernies noires, et à l’extérieur des agglomérations, où un arbre occasionnel suggère que nous sommes à la campagne, le chaume des toits taillé de façon fantaisiste des pseudo villas douillettes et autres châteaux à pignons. Vous pourrez vous approvisionner dans les stations-service de style normand, de style colonial, de style flamand, de style moderne ou même industriel. Vous pourrez vous restaurer dans des auberges aux rideaux à carreaux et aux enseignes en fer forgé, des rôtisseries aux façades en pseudo – colombages, des friteries gérées par des chefs chaleureux. Il existe une variété infinie de lieux de consommation, de la très sèche maison du peuple aux accueillants petits cafés aux fenêtres ornées de rideaux rouges et aux parkings discrets. Ce sont nos locaux pays chauds. Et la publicité. Ha, ha, beaucoup de publicité ! Du cola à la bière blonde nationale.

Les voici donc ces bordels et bars sur grand-route qui intéressent Werner Cuvelier. Il décide de dresser l’inventaire de ceux qui jalonnent les chaussées de Courtrai, d’Anvers et de Bruxelles, trois grands axes qui permettent de sortir de la cité scaldienne, ou de la rejoindre.  Werner Cuvelier se tourne vers le photographe Fred Vandaele : celui-ci prendra les clichés, 80 diapositives, toutes prises de nuit, de préférence lorsque le bitume suinte de pluie, ce qui accentue le reflet des enseignes et néons. (7) On devine dès lors dans la nuit toutes ces architectures hétérogènes, telles que les décrit Renaat Braem, un formidable bordel, des chalets, des pavillons quatre façades, des vitrines a front de rue, des fermettes, des paquebots modernistes, des parkings aussi, plus ou moins discrets. Au clair du néon, Fred Vandaele emprunte à dessein le trottoir d’en face, learning from the Kortrijksesteenweg pour paraphraser la célèbre leçon de Las Vegas (1972) de Robert Venturi et Cie, ouvrage qui, à l’époque, vient de paraître et fait un tabac. Pas âme qui vive, pas une furtive silhouette, pas un client, pas une hôtesse, c’est l’être et le néon. Seules règnent ici les enseignes de ces maisons et ces néons qui architecturent le paysage. Micro-dispositifs d’écriture, pratiques vernaculaires qui graphent la nuit en lignes lumineuses rouges, bleues, jaunes, vertes, l’enseigne devient, grâce à une conversion du regard, un véritable signe, non plus de l’information à délivrer, mais du système intellectuel et économique qui l’a produite.

Werner Cuvelier ne cherche évidemment pas à dresser un inventaire exhaustif de ces maisons, ni même une topographie de leur implantation. Lorsqu’il classera les diapositives, il bouleversera la transhumance du photographe et ordonnera les clichés par ordre alphabétique des enseignes. De l’Amigo au Witte Paard, les couleurs des néons offre un singulier lexique que Werner Cuvelier révèle par son propre système de pensée, compilant une énumération hétéroclite, une nomenclature où se croisent les langues (le français, le néerlandais, l’anglais), les truisme du genre (Le Pussy Cat, Le Favori, l’Eden, Le Love, le Milady), l’exotisme (le Bellinzona, Le Byblos, Le Capri, le Nefertiti, le Crocodile, le Hawaï), les stars (Le Berkley, le Lido, le Ritz, le 5th Avenue), les fleurs (Le Bacarra, Le Bloemfontein, Le Myosotis, Le Mimosa), les performants (L’Elite, L’Equipe, le Rally, El Toro, De Jager), les chalets (Chalet T’Witte Paard, Chalet Olympia, Chalet Stop) et quelques inattendus (De Toerist, L’Oiseau Rare, Le Clochemerle, L’Elcerlyc (8). A l’heure où la sémiologie et les analyses structurales du langage tiennent le haut du pavé, cette déclinaison alphabétique éclaire ces Résidences Secondaires d’une autre manière et nous confronte, en quelque sorte, à une singulière linguistique des bordels. 

Werner Cuvelier, Buitenverblijven, 1973, carrousel de 80 diapositives

AGLAIA KONRAD : SHAPING STONES

In Shaping Stones, Konrad juxtaposes found architecture with authored architecture, and modern with ancient. We see anonymous buildings in Lithuania, Mexico City, Hong Kong, and elsewhere-set alongside buildings by such well-known authors as Bloc, Gillet, Hans Hollein, Parent and Virilio, James Stirling and Fritz Wotruba. And we see as well ancient stone structures- in Avebury, Vienna, or Sardinia-juxtaposed to modern excavations of Carrara. This approach has much in common with that of inter-war modernism, as it forges links between the ancient and the modern, and asserts them through a democratization of the means: black-and-white photography and large-scale printing. The inside-out and back-to front quality of these photos, bath in terms of their indexical and their temporal nature, is shared with all engravings and lithographs, whether etched in metal or indeed drawn on stone. Konrad’s photography plays with notions of « original » and « index, » « nature » and « culture, » with the fact that the original « stone » cannot be dated and with its « social » shaping in the historic present. (…)

 

WERNER CUVELIER : STATISTIC  PROJECT XVIII

Il est en quelque sorte le parent proche du Statistic Project XXII, dolmens et menhirs de France (1975) ainsi que du Statistic Project XXVI, Relaciones, España, Verano (1978) tous deux projets de grande transhumances. En fait, ce Statistic Project XVIII, Romeinse Reisroute, élaboré en 1974, en est en quelque sorte les prémices, tant du point de vue de la méthode que de l’objet. A l’été 1974, Werner Cuvelier décide de profiter de sa traversée de la France, en route vers sa villégiature estivale espagnole, afin d’établir un itinéraire mettant l’art roman à l’honneur. C’est de stricte actualité : les routes de Compostelle, durant ces années 70  et grâce à de nombreuses initiatives,  passent du monde des érudits épris d’art et d’histoire et de quelques pionniers attirés par l’horizon de la route, à la sphère d’un grand public. En 1978, la parution du récit de Barret et Gurgand  Priez pour nous à Compostelle  rencontre ainsi un vif succès et popularise les pérégrinations romanes. Werner Cuvelier est au fait. Il se base d’ailleurs sur une carte des routes compostellanes publiée dans un guide touristique, La France en Poche, Abbayes et cloîtres de France (1972). Mais pas question de calquer sa transhumance sur ces chemins historiques : il trace sur la carte une droite, de Soignies en Belgique à Clermont-Ferrand,  une droite qu’il ne quittera pas (quitte à passer non loin de Vézelay sans faire le détour), n’empruntant les chemins du pèlerinage  que durant les dernières étapes, 35 stations répertoriées à l’avance. A son retour, Cuvelier constituera une documentation parfaitement classée. Ses notes d’itinéraires, une quarantaine de dessin : des tracés rectilignes à échelle, d’un point à l’autre, report sur feuille A4 des cartes routières utilisées ainsi que des  photographies qu’il fait lui-même des monuments visités et des cartes postales collectées durant le voyage. Il laissera les choses en l’état. Trente ans après nous exhumons le classeur en l’état également. Celui-ci  témoigne des liens intrinsèques que Werner Cuvelier tisse entre pratique artistique, réel et vie quotidienne.

Aglaia Konrad & Eva Giolo, Simone Guillissen-Hoa, le film, CIVA, Bruxelles

Film stil by Eva Giolo and Aglaia Konrad, 2024

Le CIVA présente la première exposition monographique consacrée à la vie, à l’œuvre et à l’héritage de l’architecte belge d’origine chinoise Simone Guillissen-Hoa (1916-1996). Promotrice de l’architecture moderniste, elle a été l’une des premières femmes à créer son propre bureau d’architecture en Belgique. Sa carrière et sa vie personnelle ont constamment défié les limites et les conventions liées au genre, aux origines et à la religion.

Sa vie a traversé les événements majeurs du XXe siècle, des prémices de la Révolution chinoise à la Reconstruction d’après-guerre, en passant par la Résistance en Belgique occupée. Dans les années 1950, elle a été membre de l’association Soroptimist, une organisation de défense des droits des femmes, et dans les années 1970, elle a participé à la création de l’Union Internationale des Femmes Architectes.

L’exposition présente tout à la fois ses projets architecturaux, ses réflexions sur l’architecture, ses combats, ainsi que sa vie professionnelle et privée, et ce, à travers un large éventail de documents d’archives. En pénétrant dans le cercle artistique de Guillissen-Hoa, composé de personnalités telles que Léon Spilliaert, Alfred Roth, Max Bill, Enrico Castellani, Tapta, Henry et Nele van de Velde, l’exposition explore les influences et les collaborations qui ont façonné son parcours artistique et intellectuel.

Au centre de l’exposition, un film réalisé spécialement par les artistes Eva Giolo et Aglaia Konrad, présente plusieurs bâtiments de Simone Guillissen-Hoa et met en évidence la manière dont l’architecte utilise, adapte et traduit les éléments du langage moderniste.

DATES  : 24 avril, 2024 – 22 septembre, 2024
VERNISSAGE : 23.04.2024 – 19:00
CIVA, Rue de l’Ermitage 55, 1050 Bruxelles

Aglaia Konrad, Jacqueline Mesmaeker, la carte postale, objet de collection, oeuvre d’art, Le Delta, Namur

Aglaia Konrad et Jacqueline Mesmaeker participent à l’exposition La Carte postale, objet de collection, oeuvre d’art, au Delta à Namur. Un commissariat de Virginie Devillez. Du 30 mars au 18 août 2024. Vernissage le 29 mars à18h30. 

Jacqueline Mesmaeker, Les Péripéties, 2012-2018

À l’heure où des images protéiformes circulent sur les réseaux sociaux et où les échanges se réduisent à quelques signes, le Delta a voulu revenir sur l’impact de la carte postale sur la société et la scène artistique. Son apparition dès la seconde moitié du 19e siècle a en effet suscité des phénomènes similaires, le commun des mortels devant apprendre à écrire dorénavant dans une case réduite prédéfinie – le recto. Quant au verso, illustré, sa diffusion intense suscite d’emblée un engouement inédit. L’année 1889, qui voit s’ouvrir l’Exposition universelle de Paris, semble véritablement constituer un tournant. Cinq à six mille cartes postales de la Tour Eiffel sont ainsi vendues chaque jour, lançant l’ère de la modernité, dont elles deviennent l’un de ses fleurons les plus populaires.

À l’heure où les reproductions circulent peu, ce support produit massivement s’impose auprès de toutes les classes sociales. La carte postale devient une image-objet à portée symbolique multiple qui passe de main en main et ouvre les portes de l’imaginaire. Par son format, elle permet aussi la constitution d’archives personnelles ou l’agencement d’images sur les murs ou les espaces de travail ; elle devient un outil pour l’artiste, ou l’historien de l’art, puisant dans cet Atlas infini, véritable point de départ de pratiques et d’usages multiples : peinture, collage, installation, film, objet, photographie, Mail Art…

De manière libre et non exhaustive, le Delta revient sur la présence, la réappropriation et le détournement de la carte postale dans l’art depuis la fin du 19e siècle jusqu’à nos jours. Le point de départ choisi est Francis Picabia dont la démarche postimpressionniste conceptuelle marque le début des avant-gardes du 20e siècle. Il annonce ainsi le « déclin de l’aura » prophétisé par Walter Benjamin, là où la reproduction prend part au savoir et à l’art, voire à leur constitution, au point de pouvoir les remplacer. (…) Virginie Devillez

Avec des oeuvres de :

Avec Pilar Albarracín, Bernard Boigelot, Marcel Broodthaers, Marcelle Cahn, Jean Challié, Alphonse Davanne, Damien Deceuninck, Peter Downsbrough, Marcel Duchamp, Paul Éluard, Gilbert & George, Camille Goemans, Nicole Gravier, Susan Hiller, Hannah Höch, Georges Hugnet, On Kawara, Aglaia Konrad, Jean-Jacques Lebel, Éric Manigaud, René Magritte, Jacqueline Mesmaeker, Valérie Mréjen, Martin Parr, Jehanne Paternostre, Michel Peetz, Francis Picabia, Allen Ruppersberg, Kurt Schwitters, Joëlle Tuerlinckx, Oriol Vilanova

Aglaia Konrad, MutantX, Biennale de l’Image Possible, Liège, vernissage ce 16 mars

Aglaia Konrad participe à MutantX, Biennale de l’Image Possible / BIP, en l’ancienne bibliothèque des Chiroux à Liège. La Biennale de l’Image Possible/BIP est un événement artistique d’envergure internationale, basé à Liège, qui interroge la nature des images actuelles et les relations que nous entretenons avec elles. Elle explore l’hétérogénéité et la porosité des différents régimes de l’image contemporaine, en résonance avec les problématiques qui traversent le monde et la société. La Biennale de l’Image Possible est une manifestation engagée qui, à partir de son territoire et du présent, s’ouvre à l’ailleurs et au futur. La programmation artistique de BIP regroupe des artistes belges et internationaux afin de présenter une large sélection d’œuvres composée de séries photographiques, de vidéos, de films, d’installations immersives plastiques, sonores et numériques.

L’intention : 

Mutantx dit ce qui, volontairement ou non, se transforme au contact d’agents extérieurs ou évolue intimement. C’est un changement qui modifie profondément, qui déborde le soi-même et qui trouble l’épineuse question de l’identité par conséquent. C’est être autre chose, sans être une pure étrangeté. Mutantx signifie être et rester en mouvement, dans le corps et dans l’esprit, et s’ajuster ou résister à l’environnement, intervenir sur l’extérieur et l’intérieur. Être mutantx, c’est disposer – parfois sans le savoir – d’un pouvoir et donc, nécessairement d’un corps. Celui-ci peut être humain, minéral, animal, végétal, social, technologique, … ou être une combinaison de plusieurs natures de corps. Le corps est le témoin de la mutation et se dote d’une capacité d’action, d’expression et de revendication. Les mutantx ont aussi intégré le passé et en jouent. Les mutantx réagencent leurs héritages. En se manifestant, les mutantx deviennent le signe que quelque chose se transforme ou peut se transformer dans l’espace-temps. Les mutantx n’existent pas sans lien avec un territoire, qui lui-même peut muter. Il y a une in- terdépendance entre les mutantx et les endroits où ils et elles se trouvent. Les un.es influent sur les autres, les transforment, les impactent, les réinventent. Le paysage et l’environnement sont aussi des contextes en mutation. L’image des mutantx, c’est l’image de la diversité, de la mixité, de l’inclusion, des tentatives. Les mutantx font toujours un peu peur ou bien on les admire et on les envie. C’est normal : ils sont à la lisière des monstres et des chimères d’un côté, des prodiges et des merveilles de l’autre. Les mutantx sont comme des collages. Ce qu’on oublie souvent c’est que, puisque « je est un autre », nous sommes toutes et tous un peu mutantx. En cela, les mutantx sont des espoirs.

Aglaia Konrad, Iconocopycity, 2011

Aglaia Konrad étudie le développement de la métropole mondiale, l’expansion des agglomérations urbaines et l’essor de la mégapole dans des lieux aussi divers que Sao Paulo, Pékin, Chicago, Dakar et Le Caire. Konrad s’intéresse aux paramètres sociaux, économiques, historiques et politiques qui informent et sous-tendent l’architecture et l’urbanisme, ainsi qu’à l’exploration de la présence physique de l’architecture et des types de bâtiments, en particulier ceux de la généalogie moderniste. En se concentrant sur le tissu physique de l’environnement urbain construit et de l’hyper-ville, sa pratique basée sur l’objectif capture et transcrit méticuleusement sa qualité virale et son sens aliénant du spectaculaire, tout en maintenant toujours une distance objective.

Iconocopycity est une installation de copies agrandies de sa monographie Iconocity (2005). Il s’agit d’une aventure photographique associative à travers des espaces urbains, réunis en un essai visuel. La juxtaposition des copies sur une même surface génère un paysage urbain alternatif. Le couvercle de la photocopieuse étant resté ouvert pendant la numérisation, des bandes noires ont été créées. Celles-ci ajoutent un nouveau rythme aux photos. Iconocopycity dévoile ainsi les contradictions entre l’architecture d’un livre et l’espace réel. Pour Aglaia Konrad, la photographie, le livre, la copie et le dispositif d’exposition sont toujours intrinsèquement liés.

Quai Paul van Hoegaerden 2,
4000 Liège

Du 16.03.2024
au 01.06.2024
Du mercredi au dimanche
de 11:00 à 18:00

Aglaia Konrad, revue de presse

Lu dans la livraison de novembre de D’Architecture, revue professionnelle française d’architecture ce texte, très éclairant, d’Anne Frémy sur une facette importante de la pratique artistique d’Aglaia Konrad. Suivi d’un porte folio d’installations. 

Anne Frémy est iconographe, photographe, vidéaste et scénographe. Elle est docteur en architecture (« L’image édifiante ». Thèse soutenue en 2016 à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles). Parallèlement à son œuvre personnelle (expositions, éditions), elle collabore régulièrement avec des agences d’architecture, comme consultante, scénographe, iconographe, photographe ou vidéaste.

Aglaia Konrad, This is Us, Z33 Hasselt

Aglaia Konrad, Shaping Stones, installation au Musée M en 2016

Avec This Is Us, pour la première fois, les œuvres issues des collections des quatre plus grands musées flamands d’art contemporain sont présentées comme un tout unique. Le commissaire Fabian Flückiger a opéré une sélection parmi les collections flamandes d’art contemporain de M HKA, S.M.A.K., Mu.ZEE et M Leuven. Il est parti du thème « l’environnement d’apprentissage artistique » pour réfléchir à ce que nos collections flamandes représentent. Comment montrent-elles notre société contemporaine et qu’est-ce que le visiteur peut en apprendre ? L’exposition est divisée en trois sections : The Art Institution, Living Spaces et Telling Stories et présente les œuvres de près d’une cinquantaine d’artistes, dont plus de la moitié vivent et travaillent en Belgique. Sept nouvelles œuvres d’art créées dans le cadre de cette exposition y sont également présentées. This Is Us est une collaboration unique entre ces principaux musées flamands d’art contemporain et Z33.

Les trois sections de This Is Us font partie de la série Z33 « Le centre d’art comme espace d’apprentissage » et explorent l’institut d’art comme lieu de transformation du savoir à travers les œuvres. Fabian Flückiger considère les collections artistiques comme des sismographes du temps, passé et présent. Chaque nouvelle exposition offre un espace de réflexion dans lequel la validité des idées est remise en question. Dans ‘This Is Us‘, ce dialogue entre le passé et le présent est encore challengé par l’ajout d’œuvres d’art crééespour cet exposition. Cette friction crée un environnement d’apprentissage artistique qui peut aiguiser, aligner ou modifier les perspectives.

L’exposition comprend des travaux de Richard Artschwager, John Baldessari, Sammy Baloji, Dara Birnbaum, Audrey Cottin, Anne Daems, N. Dash, Robert Devriendt, Marlene Dumas, Mona Filleul, Andrea Fraser, Joris Ghekiere, Karin Hanssen, Ann Veronica Janssens, Jean Katambayi Mukendi, Felix Kindermann, Aglaia Konrad, Wolfgang Laib, Konrad Lueg, Natasja Mabesoone, Dyan Marie, Kerry James Marshall, Hana Miletić, Bruce Nauman, Otobong Nkanga, Cady Noland, Clare Noonan, Sophie Nys, Willem Oorebeek, Meret Oppenheim, Ria Pacquée, Marina Pinsky, Avery Preesman, Emmanuelle Quertain, Peter Rogiers, Jura Shust, Monika Stricker, Ana Torfs, Keith Tyson, Anne-Mie Van Kerckhoven, Michael Van den Abeele, Emmanuel Van der Auwera, Jan Van de Kerckhove, Maarten Vanden Eynde, Anna Zacharoff et Heimo Zobernig.

01.10 a 18.02.24

Aglaia Konrad, Kammerspiel| Ostend photo biennale, MuZee Ostende

Aglaia Konrad crée pour le Mu.ZEE une nouvelle installation spatiale. Sa démarche consiste à se baser sur l’architecture du lieu d’exposition. Celui-ci se compose de deux espaces attenants, mais très différents, qui n’ont pas été conçus pour accueillir des expositions. L’un d’entre eux faisait office d’espace de stockage pour la coopérative S.E.O., tandis que l’autre établit une connexion avec la réalisation ultérieure de l’architecte Gaston Eysselinck. La forêt de colonnes, les différents niveaux et la façon dont l’architecture a été transformée et désoriente constituent le point de départ de l’installation d’Aglaia Konrad.

Grâce à plusieurs interventions spatiales, elle souligne la singularité de l’architecture. Les deux salles endossent un nouveau rôle, respectivement en tant qu’espace intérieur privé et espace extérieur public. Aglaia Konrad conserve les murs inexploités et interrompt la circulation. L’extérieur est aspiré vers l’intérieur à l’aide de miroirs et d’une nouvelle série de photos issues de l’étude de l’architecte d’intérieur Alina Scholtz (1908-1996, Pologne). L’installation sonde les rapports entre l’intérieur et l’extérieur, ainsi qu’entre espace privé et public.

Cette exposition fait partie de la Biennale internationale de la photographie d’Ostende
La deuxième édition de la Biennale internationale de la photographie d’Ostende met en lumière des œuvres photographiques contemporaines et conceptuelles dans divers sites intérieurs et extérieurs. Un itinéraire jalonné d’œuvres surprenantes de trente photographes traversera la Reine des plages, du Fort Napoléon au Mu.ZEE. et en lumière. Cette deuxième édition aura lieu du 16 septembre au 12 novembre 2023.

L’exposition d’Aglaia Konrad sera accessible du 16 septembre au 14 avril 2024.

Aglaia Konrad has created a new spatial installation for Mu.ZEE. Inherent to her practice is that she starts from the architecture of the exhibition space. This consists of two very different contiguous halls that were not designed as exhibition architecture. One part served as storage space for S.E.O. department store and the other connected it to Gaston Eysselinck’s later architecture. The forest of pillars, the different levels and the way in which the architecture was transformed and disorients are the starting point for Aglaia Konrad’s installation.

She emphasises this idiosyncratic architecture with various spatial interventions. The two halls are given a new role as private inner zone and public outer space. Aglaia Konrad leaves the walls unused and breaks up the circulation. The exterior is drawn in with mirrors and with a new series of photos based on research into the landscape architect Alina Scholtz (1908-1996, Poland). The installation thereby questions how inside and outside, as well as private and public, relate to each other.

This exhibition is part of the International Photobiennial Ostend
The second edition of the International Photobiennial Ostend highlights contemporary and conceptual photographic works in various indoor and outdoor locations. A trail of surprising works by more than 30 photographers will take place in the Queen of seaside towns, from Fort Napoleon to Mu.ZEE. This second edition will take place from 16 September to 12 November 2023.

Aglaia Konrad, Mystery 3 Elefsina Mon Amour Elefsina, les images

Aglaia Konrad, OBSTAKLES, 2023
6 recto/verso uv print on canvas, metal rings, diameter 370 cm

A propos de OBSTAKLES, la dernière production d’Aglaia Konrad, Katerina Gregos, commissaire de l’exposition Mystery 3 Elefsina Mon Amour : in search of the third paradise, écrit ceci : 

Since the early 1990s, Aglaia Konrad’s photographic practice has examined the social, economic, political and historical parameters that shape architecture, public space and human geography in large urban centres and their environs. In particular, she focuses on the impact of globalization and rapid economic growth on urban space, observing the transformations taking place therein, in a series of homogenized non-spaces (suburbs, urban centers, transportation hubs). Konrad’s new photographic series OBSTAKLES (2023) is based on research in Elefsina and the wider areas of the Thriasian field that define and determine the routes of the distribution of goods. From the port of Piraeus where they arrive, to the hinterland of Elefsina where they are distributed and spread all over Europe, the Fyli landfill, where material waste is collected, the TITAN Cement industry, Hellenic Petroleum, and Chalyvourgiki steel mill and further afield to Salamis island, Aglaia Konrad documents the traces, effects and processes (political, physical, structural) of continuous commercial activity and its intersections with the environment, cultural heritage and social relations. Visual fragments and elliptical signs of consumer society and the supply chain make up the visual vocabulary of the OBSTAKLES series. Konrad observes and documents the multiple, intertwined mechanisms of production, distribution and disposal of goods, which take the form of a perpetual cyclical process in late capitalism. Her gaze departs from the logic of conventional representation and landscape photography, with the focus on places as lived spaces, emphasizing, rather, the need to analyze issues of landscape, architecture and interaction through a multi-level investigation that touches on intimate aspects of human history and culture. For the artist, her own artistic practice cannot be separated from the architectural particularities of the space where she presents her photographs. OBSTAKLES takes into account the specific space of the X – Bowling Art Center, and is presented in large double-sided circles, creating an architectural rhythm that disrupts traditional photographic forms of presentation, while reflecting the circular nature of the subject matter itself. The circle evokes: the wheel, coins, a clock, binoculars, or a flashlight while suggesting movement, rhythm and performativity. Finally, as part of her solo presentation at X – Bowling Art Center, Konrad also presents three videos which highlight the complex, very particular landscape of Elefsina: the antiquities, the urban construction and the sea surrounding the area, with close-ups of the circular ripples, a commentary on the ecological impact of tourism and overdevelopment.

Aglaia Konrad s’explique à propos de cette nouvelle production : 

The work was specially developped for this very particular space. Its part of my artistic practise to work with and from out the space and in the case of Bowlingspace
I didn’t want to divide the space by walls but use the existing columns structure (an analogy to the ancient columns).  I want the visitor to experience the work and the architecture of the space where its exhibit, work and display become inseparable.
The big circles are the work, caring the images and constructing a temporary architecture in the space. And there is no front or back you can walk through the space and see different imagery, as the circles are carrying images on both sides.

The narrative is a human activity looked at in the landscape of what I call the ‘banana’, reaching from Elefsina to Piraeus, a banana of human history starting at the archeological site in Elefsina going to Piraeus, as an example. A narrative of production, distribution, consumption, economies, ecologies, landscape.  Products being delivered at the port of China in Piraeus, transported to Elefsina for further distribution throughout Europe,

Departure for the circles was money, round are the coins of early civilisation and round is the image of a bitcoin.  But also a photographic lens, an zoom, a wheel, a clock etc
Like the scattered stones lying around purposelessly, the chain of industrial economical activities have sprawled over the landscape, with its daily routine from mythological past til ultramodern service industries. A hebdomeros feeling of time being past and passing.
Trade – Retail – Landfill – Walls – Sea – Migration – Ruins, decay, entropy….

Aglaia Konrad, Mystery 3 Elefsina Mon Amour: In Search of the Third Paradise, Elefsina 2023

Du 7 juillet au 30 septembre 2023, Eleusis, capitale européenne de la culture, présente l’exposition collective internationale Mystère 3 Elefsina Mon Amour : À la recherche du troisième paradis, organisée par Katerina Gregos, directrice artistique du Musée national d’art contemporain d’Athènes. 16 artistes de neuf pays, dont Aglaia Konrad y participent.

Inspiré par le livre Storming the Gates of Paradise : Landscapes for Politics (2008) de l’influente écrivaine, historienne, écologiste et activiste Rebecca Solnit, qui analyse la politique à travers le territoire, l’exposition propose une lecture sociopolitique d’Elefsina et de la plaine thriassienne et constitue une étude et un témoignage de l’Elefsina moderne et contemporaine. En outre, l’exposition prend également en compte le passé historique, qui a joué un rôle déterminant dans la définition de l’identité actuelle de la ville. Elle suturera ainsi la mémoire et l’expérience, l’espace et le temps, le passé et le présent, tout en proposant une analyse psychogéographique de l’espace et du lieu.

De nombreux artistes participant à l’exposition explorent des chapitres spécifiques de l’histoire et du présent d’Elefsina – à la fois publics et privés – et abordent ses traumatismes et ses aspirations, ainsi que la manière dont ils sont souvent interconnectés. Bien que de nombreuses œuvres d’art s’inspirent de la localité d’Elefsina, leur signification et leur importance sont liées à des questions et à des processus sociaux et géopolitiques contemporains plus vastes. En tant qu’étude de cas post-industrielle, la ville est un lieu idéal pour examiner certains des principaux processus mondiaux et questions critiques de notre époque : de la restructuration économique et des transformations de la production industrielle et du travail aux questions environnementales, à la migration, à la citoyenneté, aux droits de l’homme et à l’identité culturelle. Le mystère 3 Elefsina Mon Amour vise, comme le fait Solnit dans son livre, à révéler « la beauté dans le paysage le plus rude et la lutte politique dans la perspective la plus apparemment sereine« , associant ainsi la politique, la poétique et l’esthétique.

En détournant le titre du film phare d’Alain Resnais, Hiroshima Mon Amour, sorti en 1959, l’exposition va au-delà de l’héritage suggéré de la dévastation – provoquée dans le cas d’Elefsina non pas par la guerre mais par l’industrie lourde – et s’intéresse aux manifestations de résilience, de solidarité, d’espoir et d’unité. Les questions soulevées dans le film de Resnais sont toujours fondamentales et contestées : faut-il oublier le passé pour aller vers l’avenir ? Ou faut-il compter avec le passé pour être capable d’affronter cet avenir ? Elefsina, avec ses couches d’histoire et sa future archéologie industrielle, semble être un endroit parfait pour aborder ces questions. Si Hiroshima Mon Amour se penchait sur un monde d’après-guerre émotionnellement fragile, Mystery 3 Elefsina Mon Amour déplace son regard vers un monde post-industriel en transition et en proie à l’incertitude.

Mystère 3 Elefsina Mon Amour contient également « une exposition dans l’exposition » intitulée Aeschylia : A Memory Archive, qui consiste en des archives du segment des arts visuels du festival « Aeschylia », qui a joué un rôle essentiel dans le développement du profil de la ville en tant que site de production et de présentation culturelles. L’objectif de cet hommage est de mettre en lumière l’importance de cette initiative culturelle qui a créé un précédent important avant la sélection de la ville comme capitale européenne de la culture.

Artistes participants : Katerina Apostolidou / Marianna Christofides / Anastasia Douka / Mahdi Fleifel / Marina Gioti / Igor Grubic / Aglaia Konrad / Natalia Manta / Adrian Paci / Serban Savu / Sphinxes (Manos Flessas & Ioanna Tsakalou) / Maria Tsagkari / Dimitris Tsoumplekas / Maarten Vanden Eynde / Vangelis Vlahos

EN. 

Ιnspired by the book Storming the Gates of Paradise: Landscapes for Politics (2008) written by the influential writer, historian, environmentalist, and activist Rebecca Solnit which analyses politics through place, the exhibition posits a socio-political reading of Elefsina and the Thriassian plain and constitutes a study on and testimony to modern and contemporary Elefsina. In addition, the exhibition also takes into account the historical past, which has been instrumental in defining the current identity of the city. It will thus suture memory and experience, space and time, past and present, while simultaneously proposing a psychogeographical analysis of space and place.

Many artists participating in the exhibition probe specific chapters of Elefsina’s history and present – both public and private – and address its traumas and aspirations, and how these are often interconnected. Though many of the artworks will take their cue from the locality of Elefsina, their meaning and significance will relate to wider contemporary social and geo-political issues and processes. As a post-industrial case study, the city is an ideal place for examining some of the major global processes and critical issues of our time: from economic restructuring, and transformations in industrial production and work to environmental questions, migration, citizenship, human rights, and cultural identity. Mystery 3 Elefsina Mon Amour aims – as Solnit does in her book – to reveal “beauty in the harshest landscape and political struggle in the most apparently serene view”, thus conjoining politics, poetics and aesthetics.

Twisting the title of Alain Resnais’ seminal 1959 film Hiroshima Mon Amour, the exhibition looks beyond the suggested legacy of devastation – brought on in the case of Elefsina not by war but by heavy industry – and into manifestations of resilience, solidarity, hope, and commonality. The questions raised in Resnais’ film are still fundamental and contested; must one forget the past in order to move into the future? Or must we reckon with the past in order to be able to deal with this future? Elefsina, with its layers of history and its future industrial archaeology, seems a perfect place in which to engage these questions. If Hiroshima Mon Amour looked into an emotionally fragile post-war world, Mystery 3 Elefsina Mon Amour shifts its gaze to a post-industrial world in transition and looming uncertainty.

Mystery 3 Elefsina Mon Amour also contains “an exhibition within the exhibition” entitled Aeschylia: A Memory Archive, consisting of archival material from the visual arts segment of the “Aeschylia” festival, which was pivotal for the development of the profile of the city as a site for cultural production and presentation. The objective of this tribute is to shed light on the importance of this cultural initiative as it laid an important precedent prior to the selection of the city as European Capital of Culture.

 

Le Monde est Rond, Aglaia Konrad, Zweimal Belichtet

Dans leur quête d’une beauté convulsive, les Surréalistes en ont fait maintes fois usage. Man Ray ou Maurice Tabard, pour ne citer qu’eux, ont sondé les techniques d’impressions combinées, de solarisation, de montage ou de double exposition afin d’évoquer l’union dramatique du rêve et de la réalité, convoquant ainsi l’inconscient. Alors que la photographie est l’art de figer le réel, la double exposition est une manipulation du tangible, elle est unité dans la duplicité. En créant une image à partir de plusieurs, elle engage celui qui regarde à interpréter le représenté.

Aglaia Konrad expérimente également cette technique de la double exposition. Ses travaux se nomment « Zweimal Belichtet », exposés à deux reprises. En fait, l’artiste accepte et exploite ce qu’on pourrait appeler des accidents de débrayage, là où la pellicule reste en place alors qu’elle aurait dû se déplacer. La même pellicule est exposée plusieurs fois et les prises de vues se superposent. Aglaia Konrad ne cherche aucunement l’effet. La pratique est apparue par accident, elle est plus ou moins due au hasard, dans des circonstances aléatoires et conduit dès lors à des résultats inattendus. L’image ainsi créée agit indépendamment, comme si l’œil du photographe n’avait pas fixé la même chose que l’objectif de l’appareil photographique, comme si l’un et l’autre étaient ailleurs au même moment ; dans le cas qui nous occupe, l’un au Caire, l’autre à à Vienne en Autriche. Le regard dès lors associe les images juxtaposées, agrège les photogrammes d’un film immobile, décompose les prises de vue et recompose les strates d’images. L’image ainsi révélée s’ancre singulièrement dans sa propre réalité, là où le langage des images affirme son autonomie.

Exhibition view
Aglaia Konrad
Zweimal Belichtet, 2016 (Cairo – Vienna 2005)
4 lambda C prints, 330 x 40 cm, 302 x 40 cm, 301 x 40 cm, 301 x 40 cm 
Edition 3/3

(…)The series Zweimal belichtet incorporates several rolls of film that were accidentally used twice. These mishaps were not programmed but the result of a specific working method that accompanies the analogue process. As Konrad photographs the same subjects in black and white and in colour, and hence constantly recharges her camera with different film rolls, a mix-up may occur in which she re-uses an already exposed film roll. Only after development she noticed the mistake: two shots taken at different moments and showing different subjects are mashed together in a layered and fractured image. The film rolls that unfurl before the viewer show a continuous flow of extremely hard to read images. As different spaces and times crash into one another, with their lines, colours and forms awkwardly fused, the world is no longer recognizable but becomes a hotchpotch of fragments. The double exposures are not superimposed in a discernable hierarchy, but coalesce into an intangible mess. Confronted with this clutter, the viewer starts to loose his bearings: his eye is unable to rest on one of the double takes, zooming in and out like an auto-focus camera. Indeed, the viewing experience is tantamount to what occurs while the photographer looks through his viewfinder: both observer and photographer seem immersed in that moment when the image is out of focus, when everything that meets the eye is in the process of becoming. But, while the ordeal of the photographer usually ends successfully, the viewer is not so lucky here: he remains stuck in this moment where everything still wavers between presence and absence. Although these images originated as failures, they are consciously recuperated as intriguing examples of an intrinsic part of the (analogical) photographie process. Their unreadability effectively overturns normative conceptions of the photographie image and its composition, but it also explores those unforeseen visual possibilities contained within the photographie medium. Indeed, these bewildering images are testimonial to the crucial role that chance plays in the photographie act. The photographie image, as a technological and chemical process, is the consequence of a camera that « looks » indiscriminately at the world, soaking in everything what is in front of it, making no distinction between what is important and what is not. It is in the slipstream of this automatic process that chance asserts its (potentially damaging) role. It is up to the photographer then to play with chance, to strike the right balance between control and surrender, and, in fact , to use chance as that « sting of the real » which invigorates the photograph. Yet Konrad’s double impressions seem to have arisen from a picture-taking system in which chance took over. As such, the y remind us of the dangerous (and therefore titillating) novelty the photographie act introduced in the visual culture oLthe 19th century, when, with the advent of the camera, anything could be depicted-whenever, whatever, wherever: such was the image-making credo introduced by the camera. When contingency takes the overhand and chance dominates the production of the image, the coherence the photographer is supposed to bring to the image collapses. As a result, the photographie agent is superimposed by an « other, » and perhaps more radical, image-making process, one in which the techno-scientific laws of the photographie system rule.(…) (Steven Humblet)