Archives mensuelles : février 2021

Werner Cuvelier, Statistic Project VII, Boehme – Cuvelier

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Statistic Project VII Boehm – Cuvelier, l’artiste et le philosophe

Le Statistic Project VII voit le jour au printemps 1973 (1) et s’inspire de la toute récente publication du Rapport Meadows, The Limits to Growth, édité à l’initiative du Club de Rome, ce groupe de réflexion réunissant des scientifiques, des économistes, des fonctionnaires nationaux et internationaux, ainsi que des industriels de 52 pays, préoccupés des problèmes complexes auxquels doivent faire face toutes les sociétés, tant industrialisées qu’en développement. Réunie pour la première fois en avril 1968, l’organisation acquiert une notoriété mondiale à l’occasion de la publication de Les Limites à la croissance en 1972 qui constitue la première étude importante mettant en exergue les dangers, pour l’environnement et donc l’humanité, de la croissance économique et démographique que connaît alors le monde. Des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology sous la direction de Dennis Meadows modélisent (2) l’empreinte écologique humaine et les principales interactions du  système Terre : population, économie, énergie, production agricole et industrielle, etc. Le rapport établit les conséquences dramatiques qu’aurait une croissance économique et démographique exponentielle sur le long terme dans un monde fini : raréfaction des ressources non renouvelables, épuisement des sols, pollutions aux conséquences multiples et, pointent-ils déjà, des effets climatiques. Ceci donne l’idée à Werner Cuvelier de se tourner vers le philosophe Rudolph Boehm afin que celui-ci rédige une série de questions s’inspirant de la situation. Rudoph Boehm lui adresse cinq questions dans le courant du mois d’avril 1973. 1. Pensez-vous que la situation dans le monde d’ici à l’an 2000 va s’améliorer ou s’aggraver ? 2. Pensez-vous que l’on puisse faire quelque chose ? 3. Vous sentez-vous coupable ou innocent ? 4. Pensez-vous que quelqu’un vous aime autant que vous pensez que quelqu’un pourrait vous aimer ? 5. Pensez-vous qu’il est préférable de vivre comme si l’on ne devait pas mourir ou de vivre en tenant compte du fait que l’on va mourir ? Et le professeur Boehm commente : Pourquoi ces questions ? Pour voir ce qui en ressort. Si vous voulez poser d’autres questions, faites-le. Les questions posées sont simplistes. Toutes les questions sont telles qu’elles vous obligent à répondre par oui ou par non. (3) Nous sommes à quelques mois du premier choc pétrolier d’octobre 1973. C’est dire qu’en s’inspirant de cet avertissement du Club de Rome, l’artiste et le philosophe œuvrent en plein réel.

Werner Cuvelier renoue avec la méthodologie du Statistic Project II, mais cette fois ce n’est plus le problème de l’art qu’il aborde mais bien le problème du monde. Il compte constituer un panel de trente personnes à qui soumettre le questionnaire et se propose de le composer en fonction de cinq catégories sociales : des travailleurs, des philosophes, des scientifiques, des jeunes et des artistes. Cette première version ne verra pas le jour. Se profile, en effet, l’opportunité d’une exposition de groupe à la galerie Plus Kern 4 : Werner Cuvelier y exposera donc trois dessins questionnaires, proposant au public du vernissage de répondre aux questions en noircissant des cases, à côté de leurs noms, prénoms et profession. Soixante personnes se prêteront au jeu parmi lesquelles on pointera quelques personnalités du monde de l’art gantois : Staf Renier, Emiel Hoorne, Fred Vandaele, Bernard Dewerchin, Jan Hoet, Yves De Smet, Leo Copers, Jenny Van Driessche, Amédée Cortier ou Marc De Cock ( 5). Non sans humour, le duo conseille aux indécis de répondre que : oui, la situation va s’aggraver avant l’an 2000 ; non, ils ne peuvent rien y faire et ne s’en sentent pas coupables. Non personne ne les aime comme ils pensent qu’ils pourraient être aimé.  Oui, il est préférable de vivre comme si l’on ne devait pas mourir. Rien n’empêche toutefois de choisir les réponses opposées, précise R. Boehm( 6). Le travail initié chez Plus Kern constitue la deuxième version du projet. Werner Cuvelier envisage une troisième version à l’échelle européenne, en traduisant le questionnaire en diverses langues, en français, anglais, suédois, danois, finnois, italien, etc. Il s’agira d’interroger six personnes, trois femmes et trois hommes par pays. Initiée, cette version ne sera pas finalisée. Enfin, puisque le Rapport Meadows provient du M.I.T. (Massachusetts Institute of Technology), il  conçoit une version américaine, qu’il mènera avec l’Université de Kansas City grâce à la collaboration du sculpteur Bill Baglay (7). Trente personnes participeront au panel.

La finalité, bien sûr, est de traduire les résultats en dessins et maquettes tridimensionnelles. Dans son Tekenboek, son carnet de dessins, Werner Cuvelier ajoute qu’éventuellement il utilisera une bâche pour support, een zeildoek, ce que l’on peut littéralement traduire par morceau de voile. A l’heure où s’approche le premier choc pétrolier mondial – et les premiers dimanches sans voiture à l’automne 1973 -, le choix de ce support est pour le moins piquant.(8)

Werner Cuvelier conçoit un jeu de cubes (9), des blocs en rangées supérieures lorsque les réponses sont dites positives (A), en rangées inférieures lorsqu’elles sont considérées comme négatives (B). Deux dessins tridimensionnels compilent ces résultats, en cinq rangées de blocs, le premier est une simple compilation des cinq questions, énonçant celles-ci en toutes lettres ainsi que les noms des participants ; le second regroupe les questions en rangs serrés, un bloc des blocs, également dans l’ordre d’inscription des participants, de 1 à 60. Et les identités y sont à nouveau listées. La bâche, quant à elle, complexifie le système. Elle est le cœur même de l’analyse statistique. Le système binaire qui prévaut ici – on pense bien sûr aux notion d’entiers positifs et négatifs de toute théorie informatique – y surgit en sept colonnes horizontales de 300 cubes, chacune regroupant les cinq questions. Il ne s’agit plus d’individualiser les réponses, mais bien de les quantifier. Le philosophe – et Rudolph Boehm se fend d’un texte extrêmement détaillé – tente d’arriver à une déclaration générale sur le caractère des personnes interrogées, non plus en tant qu’individus mais en tant que groupe. L’artiste, lui, renverse les valeurs, pousse les blocs à gauche ou à droite. Se croisent ainsi des minorités et des majorités d’optimistes et de pessimistes, de coupables et d’innocents,  de fatalistes et d’illusionnistes. L’image d’origine est confuse, chaotique ; elle semble se clarifier, se lisser au fil des colonnes horizontales en fonction du croisement des classements des groupes, sous-groupes, questions et réponses. Rudolph Boehm est-il dès lors dans la capacité de produire une déclaration morale et éthique par ce jeu quantifiant ? Ses conclusions sont loin d’être claires. Sont-ce des résultats ? écrit-il. Que vaut l’optimisme de ceux qui construisent consciemment leur vie sur une illusion (les immortels) ? Que vaut leur conviction que quelque chose peut être fait ? Que vaut leur opinion que quelqu’un les aime ? Que vaut leur sentiment d’innocence ? Rien. Les questions sont éminemment personnelles, ce sont des questions de vie sur le présent, sur l’avenir, sur le monde. Elles montent en puissance, de la plus contextuelle à la plus essentielle. Elles font appel aux valeurs et convictions personnelles. Non décidément, il n’est pas possible de tirer des conclusions générales en réduisant les individus à des cubes numérotés. Ces conclusions sont-elles incontestables ? Se demande Rudoph Boehm. Au contraire. Mais plus elles seront contestées, mieux nous nous accorderons à dire que nous devrions commencer par nous confronter à des questions comme celles qui sont posées ici, et aussi à la question de savoir quelles autres questions en découleront.

Alors que nous accrochons la bâche du Statistic Project VII au mur de la galerie, Werner Cuvelier me demande si je sais pourquoi le projet se nomme Boehm – Cuvelier et non l’inverse. Après un temps de silence, il me confie : J’ai simplement respecté l’ordre alphabétique. Et il ajoute : Puis, je voulais mettre Boehm en avant. Tout est dit.

J.M.B.

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1Dans le Tekenboek I, pp. 8-9

2 A l’occasion de cette étude, Donella Meadows, Dennis Meadows et Jørgen Randers créent World3, un modèle qui permet une simulation informatique des interactions entre population, croissance industrielle, production de nourriture et limites des écosystèmes terrestres. On se doute que ce développement informatique dans le traitement de données n’échappe pas à l’attention de Werner Cuvelier.

3 Dans Werner Cuvelier, Statistic Project VII   Boehm – Cuvelier,7 feuillets stencils 21 x 27 cm, EN – NL, 300 exemplaire 1973

Drawings. Leo Copers, Amédée Cortier, Raoul De Keyser, Yves De Smet, Roland Jooris, Staf Renier, Fred Vandaele et Marthe Wery. Du 5 au 23 juin 1973. Introduction par Benno Premsela, designer, artiste et collectionneur néerlandais, président du conseil d’administration de la Gerrit Rietveld Academie à Amsterdam.

5 Le sondage d’opinion n’a donc rien d’anonyme, même si Boehm et Cuvelier traiteront les réponses en les regroupant. Ainsi il est amusant de constater, par exemple, que pour Jan Hoet, oui la situation va s’aggraver avant l’an 2000, oui, il peut intervenir sur le cours des choses,  même s’il ne se sent pas personnellement responsable de cette situation. Il estime que personne ne l’aime comme il pense qu’il devrait être aimé. Oui, pour Jan Hoet, il est préférable de vivre comme si l’on ne devait pas mourir.

6 Texte de Rudolph Boehm dans Werner Cuvelier, Statistic Project VII   Boehm – Cuvelier, 7 feuillets stencils 21 x 27 cm, EN – NL, 300 exemplaire, 1973

Tekenboek I, pp. 9. Werner Cuvelier entretient des relations avec l’université du Kansas. Il a été invité à participer à Tempo 1970, Midwestern Music & Art Camp, Université du Kansas School of Fine Arts, Lawrence, Kansas, 22 juin – 24 juillet 1970. Bill Baglay a obtenu sa maîtrise en sculpture à l’université du Kansas. En 1972, il est à Gand afin d’y poursuivre un troisième cycle d’étude.

8 Cette bâche de 275 x 290 cm, conçue en 1973, est exposée à Tournai à l’occasion de Manifestation Collective IX, Sigma 13 Cercle artistique en 1975. C’est le deuxième volet d’une trilogie de manifestations de Negen, le groupe des IX, créé fin 1974 et qui rassemble Yves De Smet, Werner Cuvelier, Leo Copers, Staf Renier, René Heyvaert, Fred Vandaele, Bernard Dewerchin, Peter Beyls. Figure dans les archives de l’artiste cette lettre datée du 3 décembre 1974, adressée à ses collègues : Le lundi 9 décembre à 9 heures 9 minutes, les 9 se réuniront pour la troisième fois dans le cadre de la série d’événements provisoirement dénommée 9 (IX) (…) Quiconque assiste à cette réunion déclare accepter de participer à ces événements. La première exposition aura lieu au musée Dhondt Dhaenens à Deurle du 18 janvier au 2 février A1975, la deuxième à Sigma 13 – Tournai, centre d’art créé en 1968. Le troisième événement, intitulé Genegen, Een collectieve manifestatie van « de IX » à lieuà la Zwarte Zaal (Academie voor Schone Kunst), Gent le 13 mars 1975 et consiste en deux heures d’interventions relatives au temps et à l’espace.

9 Le cube est l’image générique de ce projet, à l’instar de cette petite sculpture de bois vernis de 15 x 15 x 15 cm, œuvre tridimensionnelle très néo – plasticienne qui condense la collecte des données. Collection privée, Anvers.

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Statistic Project V, 1973

Werner Cuvelier, Statistic Project V, 1973. Tableaux de synthèse.

Le Tekenboek I, ce premier carnet de dessins de Werner Cuvelier, est décidément une source précieuse, un ensemble de croquis, de notes, de réflexions sur le travail, une sorte de liste des listes, un fil conducteur très précisément daté, un fil d’Ariane qui permet de reconstituer le cheminement mental de son auteur. Œuvre autonome, ce carnet de 60 pages, évoque pas moins de 70 Projets Statistiques (S.P.), numérotés en chiffres romains, imaginés entre 1970 et 1996. Ainsi y apprend-on que Werner Cuvelier, de passage à Cologne en Allemagne le 7 octobre 1972, décide de prendre pour thème de son Statistic Project V l’exposition When Attitudes Become Forms imaginée par Harald Szeemann à la Kunsthalle de Bern en 1969. Je vais prendre le catalogue de l’exposition When Attitudes Become Forms comme réalité et point de départ afin de montrer l’intérieur de l’art (de binnekant), écrit-il. En fait, il décide d’étendre le champ d’investigation du S.P.I. et extrait de sa bibliothèque six catalogues d’expositions. Les data du Statistic Project V seront constituées par quatre expositions et deux importantes collections d’art: il y a là la Documenta IV, confiée à Arnold Bode en 1968, la désormais mythique exposition When Attitudes Become Forms, organisée à Berne en 1969 par Harald Szeemann, Sonsbeek buiten de Perken – Arnhem 71, mise sur pied par Wim Beeren en 1971 ainsi que la tout aussi mythique Documenta V de 1972 qu’Harald Szeemann vient d’orchestrer. Du côté des collections, il y a toujours celle de Peter Ludwig, le roi du chocolat, ainsi que la Sammlung Karl Ströher, du nom de cet industriel de Darmstadt, fabricant des shampoings Wella. Je pense, note Werner Cuvelier dans la publication (21) qui constitue et accompagne le travail, que ces six manifestations nous donnent une idée claire des arts plastiques dans les années 60. Elles ont eu lieu entre 1968 et 1972. Il sera clair pour tout le monde qu’elles constituent une documentation historique et qu’il s’agit d’une histoire très proche. Le choix de la documentation a été très facile. Certains peuvent en douter, mais je pense que ces manifestations sont les plus importantes. De fait, ce tournant des années 70 est d’une frénétique effervescence, une remise en question explicite et totale de tous les principes de l’art, une irréversible rupture. Live in your head proclame le commissaire démiurge Harald Szeemann à Bern. Vivre dans sa tête. Assurément, c’est également l’attitude de Werner Cuvelier face à ces six catalogues, dont l’un d’eux en deux tomes, déposés sur sa table de travail.

On sourira bien sûr, pour nous qui considérons cette époque et ces expositions comme mythiques et fondatrices, en parcourant les réalités objectives mises à plat par Werner Cuvelier. 403 noms et prénoms d’artistes, soit 39, 69, 71, 80, 150 et 181 unités, 39 artistes recensés dans le catalogue de la Sammlung Karl Ströher, 181 participants à la Documenta V, leur dates de naissances, éventuellement de décès, leur nationalités et lieux de résidence. Werner Cuvelier en est bien conscient et s’en explique :  Avec ces informations, j’ai fait une sorte de statistique artistique dans laquelle le caractère statistique se révèle peu important. Cela ne signifie pas que la valeur statistique soit nulle. A partir des classifications, ces énumérations peuvent soulever bien des questions importantes. Les informations recueillies permettent de voir précisément ces choses, qui sont normalement cachées et qui ne retiennent pas notre attention. Par exemple, le nombre d’artistes belges qui ont participé à ces manifestations : 5 sur 403 = + 1%. Oui, les choses sont relatives, dans tous les sens du terme : mises en relation, elles sont à relativiser. Je suis préoccupé par les pseudo – statistiques, déclare Werner Cuvelier. Et de conclure : je me moque un peu de la science, et surtout des statistiques, en soulignant la relativité de mes résultats statistiques au moyen de couleurs et de sons. En fait, les choses ne sont peut-être pas aussi réductrices, dès le moment où l’on considère que l’intérieur de l’art – de binnekant, ce sont avant tout des hommes (et des femmes quoique celles-ci soient peu présentes, effet du temps) qui naissent, meurent, ont une origine, vivent et créent à un endroit, tous représentés ici en unités visuelles, voire sonores. Le sujet de cette œuvre est l’art en soi, écrit encore Werner Cuvelier, résumant son projet, les artistes et leurs informations constituent le matériel. Cela contraste avec tous les sujets qui ont façonné l’art au cours des siècles passés.

En fait, ce cinquième projet (22) est une remarquable synthèse méthodologique des précédents, une nouvelle perspective et une mise au point à propos de la base statistique. Contrairement aux précédentes qui s’appuyaient sur l’autonomie des tableaux statistiques, la publication qui condense le projet se fonde sur l’œuvre elle-même et celle-ci sera unique, sans déclinaisons, un ensemble de 20 éléments, six panneaux peints, six dessins, six panneaux sonores et deux tableaux de synthèse, en fait six unités textuelles, picturales et sonores représentants les six manifestations et leur synthèse. Pour les formats – et on se souvient que c’est lui, l’artiste, qui décide -, Werner Cuvelier se tourne à nouveau vers les architectes W. Graatsma & J. Slothouber et s’inspire de leur module : les tableaux de synthèse mesurent 70 x 70 cm, les dimensions des autres, 35 x 35 cm, en dérivent. Le carré est la solution la plus neutre. Pour les dessins, le code est simple et précis : À côté des noms et des prénoms des artistes, écrit Werner Cuvelier, sont placés leur date de naissance, leur date de décès éventuelle, leur pays d’origine et enfin le lieu où l’artiste vit et travaille. L’année de naissance est représentée par les deux derniers chiffres : par exemple 1939 = 39 ; 1900 = 00 ; 1889 = 89 … Pour les noms de pays, j’ai pris les deux premières lettres de la notation anglaise. Par exemple France = FR. Pour la composition, j’ai utilisé des colonnes avec 61 noms chacune ; ceci est dérivé de 181 (d5) : 3 = + 61. 181 représente le nombre d’artistes qui ont participé à la Documenta V.J’ai écrit en noir sur un fond blanc pour des raisons de lisibilité. Toutes les lettres sont écrites à la main. Pour les panneaux peints, qui visualisent la participation des artistes aux différentes manifestations, Werner Cuvelier choisit un fond gris : c’est un exposant en arrière-plan, une non – couleur, sans aucune signification esthétique. Les expositions sont représentées en fonction de la couleur de la couverture des catalogues : des barrettes jaune clair pour When Attitude Become Forms, gris clair pour Sonsbeek, orange pour la Documenta V, jaune plus profond pour la collection Ludwig, vertes pour la collection Ströher, deux triangles rouge et bleu pour la Documenta IV, celle-ci bénéficiant d’un catalogue en deux tomes, l’un rouge, l’autre bleu. Enfin Werner Cuvelier développe la sonorisation du travail statistique : chaque couleur correspond à un son. Les six compositions sonores ont chacune une longueur propre variant de 39 (ks) à 181 (d5) unités, qui résultent du nombre d’artistes dans les catalogues respectifs. Chacune des six compositions dure une minute et est divisée en 39, 69, 71, 80, 150 et 181 unités. Ainsi, les sons de la première composition durent 1/39 de minute, ceux de la seconde 1/69, etc. En outre, on peut écouter la composition dans son ensemble, ou partie par partie ou certaines parties ensemble, selon les interrupteurs que l’on actionne. Ainsi peut-on suivre la musique tout en regardant les couleurs, et en conséquence, écouter les couleurs tout en voyant la musique.

En fait, oui, qu’entendons nous, que voyons nous ? Telle reste la question, celle de l’autonomie de l’œuvre d’art. Le philosophe Rudolph Boehm (23), à l’époque professeur à l’université de Gand et qui collaborera aux travaux statistiques de Werner Cuvelier, analyse le dispositif. Regardons ce que nous voyons. À gauche, un panneau de couleurs (= peinture). Les couleurs se présentent comme des données sensorielles immédiates de la plus grande simplicité. Que dire d’autre sur ce qu’il y a d’autre à apprendre ? La chose n’est pas si simple. Sur ce panneau, nous voyons autre chose que ce que nous pensons voir. En fait, nous voyons une représentation de données que nous ne percevons pas immédiatement comme sensorielles. Les couleurs représentent selon des règles strictes, des données statistiques enregistrées dans le panneau de droite (= dessin) Vous savez qu’aujourd’hui, les gens aiment à considérer les données statistiques comme les seules données objectives. Ces données statistiques sont-elles ce que nous percevons réellement sur le panneau de couleurs ? Mais où les voyons-nous ? Seulement sur le deuxième panneau. Mais là encore, elles ne sont montrées qu’à l’aide de caractères. Nous voyons d’abord les couleurs, puis les caractères, puis leur signification, écrit-il encore. Et maintenant, après ces réflexions, nous commençons à voir – peut-être à comprendre – quelque chose de complètement différent par rapport à ce que nous percevons. Une conclusion est certaine : ce que nous voyons dépend aussi de nous-mêmes.

Werner Cuvelier pour sa part précise : Je veux examiner ici si ces séries régulées, par opposition aux séries aléatoires, produisent autant de sensations esthétiques que les œuvres composées par intuition. Si c’est le cas… Werner Cuvelier laisse la réponse en suspension.

Revenons un instant à cette notion de réalité. Werner Cuvelier est en tout cas attentif au monde l’art et à ses réalités du moment. En 1973, la démission de Jean Leering, directeur du Van Abbe Museum, suite à un désaccord avec le conseil d’administration du musée et les autorités de la ville quant à sa politique et ses idées sur la créativité individuelle et collective, le fait réagir. Avec une pointe d’humour et un soupçon de revendication peut-être, Werner Cuvelier rédige quelques Propositions pour le Van Abbe Museum : Les expositions sont organisées autour d’un thème : la structure. Les expositions sont organisées autour d’une technique : la reconnaissance de l’art du dessin. Les expositions sont organisées autour d’un thème : la nature morte. Les expositions sont organisées sur une base géographique : l’art flamand. Les expositions sont organisées sur une base technique : les sculptures. Les expositions sont organisées autour d’une tranche d’âge : les dessins d’enfants. Les expositions sont organisées avec des arrangements combinés : la jeune création flamande. Les expositions peuvent être organisées selon l’âge, le format, par couleur. Ceci constitue le Statistic Project VI (24)

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21Werner Cuvelier, Statistic Project V, Plus Kern March 73, Stencil, 33 x 21 cm, 16 pages, NL – EN, 365 ex

22Exposition individuelle galerie Plus Kern, Statistic Project V. Du 6 au 24 mars 1973. Introduction  par le professeur R. Boehm. Werner Cuvelier expose au ré de chaussée de la galerie, Yves De Smet à l’étage. Exposition avec publication. Les deux tableaux de synthèse seront également exposés en 1975 à l’occasion du millénaire de la Ville cde Gand. Duizend jaar Kunst en Cultuur, Museum voor Schone Kunst, Gent (B). Texte de 1973 de Rudolf Boehm dans le catalogue.

23Werner Cuvelier suit les  cours de philosophie de Rudolf Boehm (1927-2019) en élève libre. En témoignent de nombreuses notes dans le Tekenboek II. De 1952 à 1967 Rudolf Boehm collabora à l’édition des inédits de Edmund Husserl aux Archives-Husserl à Louvain sous la direction de Herman Leo Van Breda. En 1967, Rudolf Boehm est nommé professeur de philosophie moderne à l’Université de Gand. Rudolf Boehm fut un des premiers lecteurs du manuscrit de Totalité et Infinid’Emmanuel Lévinas. Ainsi, il contribua à sa publication dans la collection Phaenomenologica(Editions Martinus Nijhoff), dirigée par son vieil ami et complice, Jacques Taminiaux, professeur de philosophie à Louvain-la-Neuve.Son œuvre s’inscrit dans le sillage de la phénoménologie, même si elle rompt avec celle-ci sur plusieurs points essentiels. Werner Cuvelier et Rudolf Boehm entretiendront une très solide relation de collaboration. Boehm a également étudié les mathématiques et la physique à Leipzig et à Rostock.

24Tekenboek I, page 7

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Werner Cuvelier, Statistic Project I, Documenta IV, Sammlung Karl Ströher, Sammlung Peter Ludwig

Werner Cuvelier
Statistic Project I
Plus Kern, may – june 1972
stencilé, 33 x 21 cm, 32 pages, 500 ex. NL – EN 
Werner Cuvelier
Statistic Project I Documenta 4, K. Ströher, P. Ludwig (voorstudie)
Technique mixte sur panneau, 23 x 15 cm, 1970

Revenons en à ce qui occupe Werner Cuvelier au moment de sa participation au One Day Show à Zaffelare : son Statistic Project I, une analyse statistique de l’art des années 60, fondée sur un scrupuleux dépouillement de quatre publications. Celles-ci concernent une exposition, la Documenta IV (catalogue en deux volumes), et deux collections, celles de deux industriels allemands, Karl Ströher d’une part, Peter Ludwig d’autre part. Ne seront pris en compte que les éléments objectifs concernant les artistes présents dans ces publications : le nombre d’œuvres présentes dans ces collections et expositions, les âges, les lieux de naissance et de vie, les nationalités. Ces éléments constitueront les données statistiques à exploiter, tout d’abord en listes et tableaux commentés, ensuite en dessins, tableaux sur toiles, reliefs et œuvres tridimensionnelles. Dans un premier temps, Werner Cuvelier liste les 183 artistes concernés, de Joseph Albers à Wolf. Tout, ici, est précisément normé, précisément codifié, l’usage des abréviations, la longueur des énumérations en colonnes, l’ordonnancement de l’ensemble,  une trentaine de feuillets tapuscrits de format folio qui feront l’objet d’une publication stencil, une pure esthétique administrative, à la fois autonome et en relation avec la visualisation plastique de l’œuvre.(14) Dans un premier temps, Werner Cuvelier s’intéresse aux œuvres, il en fait le décompte. Joseph Beuys l’emporte haut la main avec 264 œuvres dont 262 figurent dans la collection Ströher (15). Les Américains se taillent évidemment la part du lion : Jasper Johns (4 + 31 + 2 + 13 = 50), Roy Lichstentein (4 + 8 + 12 + 14 = 38), Claes Oldenburg (né en Suède mais résidant à New York, 4 + 3 + 24 + 7 = 38), Robert Rauschenberg (3 + 7 + 3 + 16 = 29) et bien sûr Andy Warhol (3 + 4 + 26 + 20 = 53). Il s’agira ensuite de les classer en fonction de leur représentation dans un, deux, trois ou quatre catalogue. 9 figurent dans les quatre publications, 14 dans trois publications. Les tableaux se succèdent en fonction de la nationalité des artistes, de leur lieu de naissance et de résidence, de leur proportion par rapport aux populations, de leur date de naissance, du nombre d’artistes par âge. Les mieux représentés sont ceux qui sont nés en 1930 et ont donc 41 ans en 1971, constate Werner Cuvelier. Combien de tableaux a-t-il ainsi conçu ?  Il choisit en tout cas d’en publier 11. Les trois derniers sont les plus intrigants. En janvier –février 1972, Werner Cuvelier collabore avec l’Institut de Psycho – Acoustique et de Musique Electronique de Gand afin d’envisager une traduction sonore et mélodique de ces statistiques. Des suites de chiffres déterminent les variations, timbres, vibrations, combinaisons sonores et tonalités. Le tableau X fait état d’une composition initialement destiné à être réalisée sous forme de musique électronique programmée, interprétée le 15 février 1972, sur un harmonium Alexandre avec clairon pour le registre gauche et flûte pour le registre droit.

Nous reviendrons ultérieurement sur la (les) traduction(s) visuelle(s) de ce premier Statistic Project. Ils sont l’objet d’une exposition à la galerie Plus Kern en mai – juin 1972 (16). Une fois de plus, annonce le communiqué de presse (17), Cuvelier apporte des informations sur l’art, mais la visualisation de ces informations devient à son tour un processus artistique. Les tableaux, graphiques, peintures, reliefs, objets et compositions sonores qui en résultent peuvent être considérés comme des œuvres d’art autonomes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de leur relation avec le matériau utilisé. La valeur statistique, cette mise en œuvres de données objectives, fonde en effet le processus. Elle est à l’origine, rappelle Werner Cuvelier, d’une importance capitale. De par la nature même du travail, dirais-je, mais aussi et sans doute, parce que la déferlante des artistes américains et du Pop Art (18) en Europe, confirmée par l’exploitation de ces quatre catalogues, est de stricte actualité, ce qui suscite bien des réactions dans les milieux artistiques. Pensons, par exemple, aux conversations stratégiques qu’ont, à l’époque, Jacques Charlier et Marcel Broodthaers sur le sujet.(19) Toutefois, écrit Werner Cuvelier dans son Tekenboek I, l’importance de la valeur plastique des résultats l’a vite emporté sur la valeur statistique. Celle-ci ne reprendra de la valeur que placée entre guillemets. Ces guillemets font, en effet, référence au caractère subjectif (par opposition à objectif) de tout ce qui a contaminé le monde auparavant. J’utilise l’art, affirme Werner Cuvelier pour faire de l’art, contrairement à tout ce qui a déjà servi de modèle pour l’art. Werner Cuvelier envisage la chose comme une sorte de renonciation – le mot est fort – une renonciation à être créateur (20). Jacques Charlier, lui aussi, se définissait comme présentateur des documents professionnels qu’il distillait dans le champ de d’art. Néanmoins, nuance Werner Cuvelier, c’est moi qui fais le travail, c’est moi qui décide des couleurs, c’est moi qui décide du format. Seules les proportions et le nombre de couleurs découlent des données statistiques. Il conclut, enfin : Ce projet peut être considéré comme une question philosophique, et donc extrême, pour les artistes, les collectionneurs, les directeurs de galeries, les critiques, les historiens et autres personnes impliquées dans l’art… une question sur le comment et le pourquoi des choses.

L’exposition du Statistic Project Ià la galerie Plus Kern ferme ses portes le 1 juillet 1972. La veille, soit le 30 juin, s’est ouverte à Kassel la Documenta V,les cent jours d’Harald Szeemann.

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14Werner Cuvelier, Statistic Project I, Plus Kern, may – june 1972, stencil, 33 x 21 cm, 32 pages, 500 ex. NL – EN.

15Ströher a notamment acheté une exposition entière de l’artiste allemand, exposition présentée au musée de Mönchengladbach. Il a d’ailleurs également acquis Raumplastik, l’œuvre présentée à la Documenta 4 dont la plupart des travaux exposés se trouvent aujourd’hui au Hessisches Landesmuseum de Darmstadt, ville d’origine du marchand de shampoing et autres lotions capillaires

16Exposition du 12 mai au 1erjuillet 1972. Arie Berkulin, artiste néerlandais, que la galerie Plus Kern a remarqué à l’Europaprijs voor schilderkunst à Ostende en 1969 expose au rez de chaussée de la galerie, Werner Cuvelier à l’étage.

17Archives de l’artiste.           

18En 1969-70, Werner Cuvelier peint lui même quelques toiles d’inspiration pop et pop géométriques alors qu’Evelyne Axell est récompensée par le Prix de la Jeune Peinture belge.

19Lorsque le Pop Art et le Nouveau Réalisme font irruption chez nous, je me demande comment affirmer notre identité par rapport au dadaïsme revisité de ce rouleau compresseur américain. Comment faire aussi par rapport à Restany et ses Nouveaux Réalistes. J’en parle souvent avec Marcel Broodthaers avec qui je partage cette préoccupation. Où trouver notre place, alors que ces artistes ont déjà conquis Bruxelles et Anvers ? Jacques Charlier, dans : Jean-Michel Botquin, Zone Absolue, une exposition de Jacques Charlier en 1970, L’Usine à Stars, 2007.

20Werner Cuvelier, SP I, opus cit.

Werner Cuvelier
Statistic Project I Documenta 4, K. Ströher, P. Ludwig 
Crayon sur papier, 1971

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Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, les images

Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, 1971
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, questionnaires, 1971
technique mixte, 12 x 32 x 24 cm et boîte valise en bois
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, questionnaires, 1971
technique mixte, 12 x 32 x 24 cm et boîte valise en bois
Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, 1971
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 01, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 02, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 03, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 04, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 05, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, table 10, 1971
Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, dessins préparatoires,

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Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, documents et dessins préparatoires

Plus Nieuws, périodique paraissant toutes les 6 semaines, édité par Plus Kern/Gent. Troisième année, n°15. Livraison consacrée à l’exposition de Raoul De Keyser à la galerie et au One Day Show. Chaque projet y est présenté. Seul Guy Mees déclare : ik heb niets toe te voegen aan op Steetensgoed, Je n’ai rien à ajouter au Steetensgoed. Ce qui est un projet en soi : laisser la nature intacte, sans intervention de l’artiste. 
Persbericht 6/XI/1971 : aankondiging van een kunstmanifestatie. Archives W. Cuvelier.
Persbericht – 18/Ix/ 1971 – Message De Presse – Annonce D’une Exposition D’art. Archives Werner Cuvelier. Werner Cuvelier annonce d’emblée cette deuxième phase du travail dans la livraison de Plus Nieuwsprécitée. La présentation des résultats fera l’objet d’une exposition à la galerie Plus Kern. Quatre expositions simultanées s’y tiennent du 27 octobre au 4 décembre 1971. Gianni Colombo (I), François Morellet (F), Joël Stein (F) et Werner Cuvelier qui produit donc l’ensemble des œuvres relatives au Statistic Project II en moins de cinq semaines.
Werner Cuvelier
Cuvelier-Project, Zaffelare 1971. Plus Kern 26/X/1971 – Tot 4/XII/1971
Stencil  in quarto, 21 x 27 cm, 6 pages. NL, 1971
Editeur Galerie Plus Kern
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, avant projet, 1971
technique mixte sur pzpier, 21 x 27 cm
code lettres / couleurs appliqué à Zaffelare, 5 couleurs couvrant l’alphabet
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, avant projet, 1971
technique mixte sur papier, 21 x 27 cmc
Code lettres couleurs appliqué à Zaffelare, 5 couleurs couvrant l’alphabet
Werner Cuvelier
Sans titre 14/IX/71, 1971
technique mixte sur papier, 21 x 29,7 cmc
ode lettres – couleurs – 26 lettres – 26 couleurs – exécuté le 14 septembre 1971. Ne concerne pas Zaffelare mais des personnes présentes à une réunion privée
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, avant projet, 1971
Technique mixte sur papier, 21 x 27 cm
dessin préparatoire au tableau VIII
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, avant projet, 1971
technique mixte sur papier, 21 x 27 cm
dessin préparatoire tableau VIII mais sans tenir compte du vote du public
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, avant projet, 1971
technique mixte sur papier, 231 x 27 cm
dessin préparatoire au tableau X. 24 septembre 1971
Werner Cuvelier
Statistic Project II, Zaffelare, 1975 (2)
technique mixte sur papier, 21 x 27 cm
avant projet – Werner Cuvelier se glisse dans la liste des artistes

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Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare

Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, questionnaires, 1971, technique mixte.
Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, table 01, 1971, Huile sur panneau, 50 x 50 cm
Werner Cuvelier, Statistic Project II, Zaffelare, table 03, 1971, Huile sur panneau, 50 x 50 cm

Statistic Project 2. Zaffelare.

19 septembre 1971. Jenny Van Driessche, directrice de la galerie Plus Kern organise son second One Day Show au Stentensgoed, à Zaffelare, bourgade située non loin de Lochristi 1. Quatre ans auparavant, en septembre 1967, la galeriste gantoise  y avait convié Bram Bogaert, Raoul de Keyzer, Yves De Smet et Roger Raveel, les invitant à exposer dans le paysage, afin de tendre à intégrer l’art à la nature, sur base du contraste et de l’harmonie. Cette fois, ce sont douze artistes qui ont été invités à soumettre des projets spécifiques au lieu 2. Sont concernés : Leo Copers, Raoul De Keyzer, Yves De Smet, Paul De Vree, Roland Jooris, Guy Mees et Rudolf Rommens. Quatre artistes étrangers sont également invités : Sjoerd Buisman (Pays Bas), Gianfredo Camesi (Suisse), Bernd Lohaus (RFA) et Sarenco (Italie). Werner Cuvelier, enfin, participera également à cette partie de campagne. Ses recherches ont, en effet, trouvé une résonance auprès du groupe Plus, créé en 1969 par Yves De Smet et Amédée Cortier. Plus rassemble quelques artistes opposés à l’idée que l’art se doit d’être narratif, symbolique ou expressionniste et dont le but est d’élever la peinture à une expérience totale et multi – sensorielle. Yves De Smet, artiste et théoricien, a progressivement quitté l’aire constructiviste pour se concentrer sur l’art conceptuel, qu’il envisage en relations linguistiques, mais aussi mathématiques, matérielles ou émotionnelles, ou même en combinaisons de ces divers paramètres. Il est dès lors particulièrement attentif aux travaux de Werner Cuvelier et commentera les œuvres de ce dernier. 3

Par rapport à l’édition de 1967, la règle du jeu du One Day Show s’est singulièrement affinée et actualisée ; elle ne peut que susciter l’intérêt de Werner Cuvelier. Il le souligne lui-même dans le texte qui accompagne la phase finale de son projet : le One Day Show s’inscrit dans le cadre d’une contrainte temporaire imposée (cette journée du 19 septembre 1971) et d’une contrainte spatiale commune (le Stentensgoed à Zaffelare) 4. Ce terme de contrainte est évidemment capital : Werner Cuvelier pratiquera la contrainte, dans un sens très oulipien, au fil des œuvres et décennies. Aux règles du jeu proposées par Jenny Van Driessche, Werner Cuvelier ajoutera les siennes propres.

Ces questions de temps et d’espace guident, en effet, le projet. Le temps, écrit Jenny Van Driessche, c’est un jour (les contributions auront un caractère temporaire), un dimanche de septembre (jour de repos), en Belgique (pays au climat imprévisible). L’espace, c’est le site du Stentensgoed, sa taille et son emplacement, sa composition naturelle (herbe, arbres, étang) et architecturale (ferme et grange) 5. Àce concept spatio-temporel, la galeriste gantoise désire confronter tant des artistes locaux (qui ont connaissance du paysage flamand) que des étrangers (qui pourraient même s’étonner du climat local), des artistes de différentes générations, pratiquant des disciplines diverses (peintres, poètes, artistes d’idées, etc.). Les consignes sont claires : les contributions devront être spécifiques au lieu, les matériaux trouvés in situ. Tout autre apport matériel extérieur (tel que la peinture, la lumière artificielle, etc.) ne peut être que relatif aux projets menés sur le site. Les œuvres seront installées au préalable ou, si elles s’élaborent en processus, mises en place durant cette journée du 19 septembre, et pourquoi pas, éventuellement avec la participation du public. Enfin, dernière recommandation, elles ne pourront affecter durablement l’environnement.

Depuis le mois d’août 1970, Werner Cuvelier est pleinement investi dans la conception son Statistic ProjectI, relatif à la Documenta IV et aux collections de Karl Ströhe et de Peter Ludwig, une analyse statistique et objective de l’art des années 60. Il s’interrompt donc pour se concentrer sur le One Day Show 6, respectant à la lettre les consignes et contraintes indiquées. Son matériau, il le trouvera in situ : ce seront les artistes eux-mêmes et le public, auxquels il demandera une participation active. L’action se déroulera durant ce seul dimanche de Septembre, en ce lieu unique. Il n’introduira sur le site du Steetensgoed que ce qui lui permettra de collecter les données relatives à son projet : des questionnaires, destinés aux artistes et au public. Ceux destinés aux onze artistes présents sont contrecollées sur des planchettes, chacune pourvue d’un stylo-bille. Werner Cuvelier envisage de les exposer a posteriori. Aux artistes, Werner Cuvelier, se propose de poser dix-neuf questions d’ordre philosophique, des questions qui occupent leur auteur, mais que d’autres auraient tout aussi bien pu poser 7. Ils pourront y répondre par oui, par non, ou ne pas se prononcer. Quant au public, il l’invitera à voter et à classer les contributions des onze artistes par ordre de préférence. Les bulletins de vote seront regroupés et mis sous pli. Werner Cuvelier introduit ainsi la notion de sondage d’opinion sur le site du Stentensgoed, dans sa propre pratique artistique et dans le champ de l’art.

Les questions posées aux artistes concernent leur pratique artistique, leurs idées, attitudes et positions sur des sujets divers. Des plus simples à celles qui peuvent sembler les plus elliptiques ou singulières. Ainsi, est-il utile, selon eux, de poser des questions ? Est-il important de pouvoir répondre aux questions ? Suffit-il de connaître les bonnes questions ? L’art est-il un domaine privilégié ? La Documenta IV était-elle vraiment la manifestation la plus importante de la période 1960-1970 ? Chaque activité doit-elle avoir un but ? La technique est-elle un but en soi ? Est-ce la même chose, que savoir et connaître ? Leurs activités artistiques constituent-elles une partie distincte de leur vie ? Existe-t-il des choses vers l’extérieur ou vers l’intérieur ? Sont-ils soumis à l’orientation de ce qui les oriente ? Le domaine de l’art est-il limité ? Pensent-ils qu’ils vivent à une époque critique ?  Estiment-ils qu’il s’agît plutôt d’une époque satisfaite de soi, consciemment acritique ? Certaines régions doivent-elles être développées ? Habitent-ils aussi un bâtiment des siècles passés ? La science et la technique sont-elles en mesure de résoudre la problématique de la circulation ? Peut-il être question de progrès, de développement si une certaine orientation n’est pas donnée ? Croient-ils pouvoir agir d’une manière inconditionnellement objective ? Les choses ont-elles plus d’une structure ?

Parcourant ces questions, je pense bien sûr aux questionnaires et sondages d’opinion conçus par l’artiste allemand Hans Haacke, questionnaires qu’il soumet aux publics des musées et qu’il compilera puis présentera dans une série de graphiques, de tableaux et de cartes. En 1970, désireux de connaître l’opinion des gens sur l’attitude notoirement belliqueuse du gouverneur Nelson Rockfeller à l’égard de la guerre du Vietnam, Hans Haacke distribue pas moins de 37000 questionnaires aux visiteurs du MOMA à New York. Je repense également à ces 96 questions spéculatives, incongrues, absurdes, naïves, personnelles que Robert Filliou pose dans Ample food for stupid thought (1965), qui sera traduit en français en 1977 sous le titre Idiot-ci, idiot-là. On pourrait également évoquer Interview with a cat (1970) de Marcel Broodthaers, un questionnaire que l’artiste soumet à son chat où il aborde le nouvel académisme, l’audace contestable de l’art, le marché, l’évolution d’une collection, le rôle des musées. Le questionnaire pour Hans Haacke est une arme critique et politique. Il est un outil au service de la conscience de soi et de la créativité permanente pour Robert Filliou. Pour Marcel Broodthaers, qui donne sa langue au chat, il permet d’aborder des sujets qui préoccupent beaucoup d’artistes8 Werner Cuvelier se penche, quant à lui sur ce qu’il nomme le problème de l’art. Ses questions en témoignent ; implicitement elles évoquent sa propre pratique artistique et ses préoccupations du moment, à commencer par celle de poser des questions. Elles évoquent l’importance de la Documenta IV sur laquelle il travaille à l’époque, mais aussi – et surtout, dirais – je, les limites de l’art, celles de la science, la pluralité des structures et l’inconditionnelle objectivité. Werner Cuvelier développera cet objectif en 1972. « Je veux, écrit-il, avec mon Statistic Project III faire des recherches sur un certain nombre d’artistes. Cette recherche se fera au moyen de questionnaires, de conversations, d’enregistrements sur bande, etc. Mon intention est d’utiliser les résultats pour réaliser des tableaux visuels, des objets tridimensionnels ou des dessins de ceux-ci, ou d’uniquement publier une sorte de livre dans lequel tous ces dessins, textes, dessins spatiaux et objets seront inclus, de sorte que seul le(s) livre(s) soit (soient) une (des) œuvre(s) en soi. Cela rendra superflu une éventuelle exposition ; la galerie ne fonctionnera dès lors que comme éventuel vendeur et éditeur de l’œuvre. Je déterminerai moi-même le choix des artistes à interroger sur base de l’un ou l’autre critère, des artistes qui devront toutefois démontrer qu’ils sont importants pour le problème de l’art. Le livre sera bilingue, anglais et néerlandais. On pourrait y ajouter de courtes traductions quant aux intentions de l’ouvrage ».9La notice claque comme un véritable statement (d’autant que le projet ainsi énoncé ne sera jamais réalisé )10, elle affirme ce problème de l’art, elle témoigne aussi de toute l’importance que Werner Cuvelier accordera toujours aux livres et livres d’artiste.

C’est, bien sûr, ce que Werner Cuvelier a déjà prévu de faire en quittant Zaffelare : organiser et comparer les informations obtenues afin de suggérer certaines conclusions, transformer les données statistiques en représentations graphiques. 11Il sera donc question d’objectiver des avis éminemment subjectifs, les réponses des artistes à la vingtaine de questions posées, les votes de préférence du public. L’aléatoire et le hasard sont ainsi au rendez-vous. Tout d’abord, en fonction de multiples facteurs, sur le site même de la récolte des données : le public sera-t-il au rendez vous (les conditions météorologiques sont imprévisibles), combien seront-ils, l’atmosphère sera-t-elle propice aux rencontres, répondront-ils les, uns et les autres, aux questions posées? Ensuite, lors de la réalisation des tableaux, en fonction de la contrainte que, librement, l’artiste se fixera.

Werner Cuvelier décide, en effet, de produire dix panneaux, dix graphiques au sens propre et figuré, dix panneaux de 50 x 50 cm, format choisi pour sa neutralité. Sur le premier, il figure en toutes lettres les noms des artistes participants à l’événement et choisit de les lister dans l’ordre de présentation des projets tels que ceux-ci ont été mis en page dans la livraison du Plus Niews relative à l’événement. La typographie est empruntée au CCC, Centrum voor Cubische Constructie, animé par les architectes néerlandais William Graatsma et Jan Slothouber, concepteurs d’un système cubique modulaire envisagé dans l’esprit du fonctionnalisme de De Stijl, de la nouvelle objectivité, du minimalisme, offrant dans de multiples domaines des solutions simples, économiques, universelles, suscitant l’imagination et non dénué d’une charge émotionnelle. Le tableau a donc été divisé en onze registres, les lettres se touchent à la fois horizontalement et verticalement, créant ainsi une division du plan en noir et blanc totalement imprévue. Afin de représenter visuellement les données collectées, Werner Cuvelier définit un code où toutes les lettres de l’alphabet sont converties en chiffres et en couleurs, précisément en trois couleurs primaires (jaune, rouge et bleu), et en trois couleurs secondaires (vert, orange et violet). Chaque lettre sera représentée par un rectangle, leur hauteur déterminée par le nombre d’artistes, soit onze registres, leur largeur en fonction du nombre de lettres (+ deux blancs) du nom le plus long, soit 20 colonnes. Un rectangle jaune représentera donc un A, un B, un C, ou un D. L’orange les lettres EFRG, le rouge  les IJKL, le violet les MNOP, le bleu les QRST et enfin le vert, les dernières lettres de l’alphabet : UVWXYZ. 12 Une publication accompagnera l’ensemble, quelques feuillets stencils in quarto, qui explicitent la méthode. Werner Cuvelier confie en quelque sorte le code au spectateur, attirant son attention sur le fait que les œuvres peuvent à la fois être envisagées d’un point de vue formel, mais aussi lues comme listes et statistiques. Oui, ce sont des tableaux et reliefs abstraits géométriques, mais ils sont également linguistiques, fermement ancrés dans le réel, relatant même une situation concrète. A première vue, avouons-le, il n’en paraît rien. On semble ressentir, note Yves De Smet en 1971, une certaine forme d’ordre ou de cohésion. Mais nous sommes incapables de reconstruire cet ordre par nous-mêmes ; c’est pourquoi il nous semble étrange.  Ainsi, le deuxième tableau est-il une simple conversion en couleurs du premier. Le troisième classe les artistes du plus jeune au moins jeune. Jenny Van Driessche voulait confronter des artistes de diverses générations : Sjoerd Buisman est né en 1948, Paul De Vree en 1909. Rudolph Rommens et Bernd Lohaus, dont la date de naissance n’est pas mentionnée dans la livraison de la revue Plus Niews qui présente le One Day Show ont été suggérés avec un contour blanc. Oui, cette publication participe de la règle. Le quatrième réordonne alphabétiquement la liste des artistes. Le cinquième révèle les votes de préférence émis par le public. Yves De Smet arrive en tête, Leo Copers occupe la seconde place. Werner Cuvelier décide pour le sixième de combiner les tableaux II, III, IV et V. Vingt quatre possibilités par permutation s’offrent à lui. Il en choisit une, mais le nombre aurait pu être exponentiel. 13 Le septième tableau est une répétition du deuxième, mais seules apparaissent les trois couleurs primaires. Werner Cuvelier introduit le code numérique établi dans son huitième tableau. La largeur des rectangles colorés correspond au chiffre du code, la hauteur des registres est relative au classement établi par le public. On le voit, le système se complexifie, les critères se croisent. Enfin deux reliefs complètent l’ensemble. Le tableau IX reprend, une fois encore, le tableau II, la hauteur des volumes y correspond à l’ordre alphabétique. Enfin le tableau X  exploite les réponses faites aux dix-neuf questions posées aux artistes. Un dessin préparatoire comptabilise les oui, les non, les abstentions. Werner Cuvelier le traduit en trois dimensions. Ce ne sont là que quelques suggestions, précise l’artiste. Il va s’en dire que ce projet peut être prolongé jusqu’à l’infini.

Notons, enfin, que Werner Cuvelier reviendra brièvement sur le Statistic Project II. Deux esquisses serrées dans ses cartons à dessins en témoigne : en 1975, il trace un nouveau dessin préparatoire au tableau X. Cette fois, le dessin compte douze registres : Werner Cuvelier s’est glissé dans la liste, il a lui aussi répondu au dix-neuf questions posées. Retour au point de départ du projet, ce problème de l’art.

(…)

Persbericht 6/XI/1971 : aankondiging van een kunstmanifestatie. Archives W. Cavelier.

 2 Lettre du 5 août 1971 de Jenny Van Driessche, archives W. Cuvelier

 3 Werner Cuvelier benut de realiteit als material, 1971, texte publié dans les publications accompagnant les deux premières expositions de Werner Cuvelier à la galerie Plus Kern en 1971 et 1972

 4 Werner Cuvelier, Cuvelier-Project, Zaffelare 1971. Plus Kern 26/X/1971 – Tot 4/XII/1971

 5 Dans le communiqué de presse précité. Egalement dans Plus Nieuws, périodique paraissant toutes les 6 semaines, édité par Plus Kern/Gent. Troisième année, n°15. Livraison consacrée à l’exposition de Raoul De Keyser à la galerie et au One Day Show. Chaque projet y est présenté. Seul Guy Mees déclare : ik heb niets toe te voegen aan op Steetensgoed, Je n’ai rien à ajouter au Steetensgoed. Ce qui est un projet en soi : laisser la nature intacte, sans intervention de l’artiste.

 6 Le projet Cuvelier pour Zaffelare porte le n° II, et ses résultats seront rendus public en octobre 1971 à la galerie Plus Kern. Les recherches  sur le Statistic Project I ont débutées en 1970. Les résultats ne seront rendus publics qu’en mai 1972, également à la galerie Plus Kern. Notes consignées par Werner Cuvelier dans le Tekenboek I(1970 – 1996). A propos de Zaffelare, il écrit : Ce projet de moindre envergure sera réalisé pour la première fois à l’occasion du deuxième one day show à Zaffelare.

7 Werner Cuvelier, Cuvelier-Project, Zaffelare 1971. Plus Kern 26/X/1971 – Tot 4/XII/1971

8 Barry Barker, Marcel Broodthaers, a silent conversation or a personal point of view, in Marcel Broodthaers, Milton Keynes Gallery, 2008

9 Traduit du néerlandais, texte rédigé par l’artiste le 10 juin 1972, alors qu’il expose les résultats de son Statistic Project I à la galerie Plus Kern (mai – juillet 1972) Archives Werner Cuvelier. Notice complémentaire dans le Tekenboek I.

10 Il aurait pu être développé à l’occasion d’une exposition qui ne se fera pas : « Suite à une invitation à réaliser quelque chose avec des entreprises de Tielt, en collaboration avec un certain nombre d’artistes, j’ai pensé à un projet statistique qui serait le quatrième de la série. Je pense montrer ici l’intérieur de l’exposition via des tableaux statistiques à réaliser en collaboration avec l’éditeur Roland Pattew et avec l’imprimerie Lannoo (Tielt) avec laquelle la collaboration entrepreneuriale pourrait être mise en place. Les questionnaires destinés aux artistes seront très développés et porteront sur trois thèmes : l’homme, son travail et ses idées. Je poserai des questions en trois structures ou plus, en m’inspirant de la Metabletica du professeur Vandenberg ». Statistic Project IV, notice dans la Tekenboek I, page 3. Septembre 1972

11 Werner Cuvelier annonce d’emblée cette deuxième phase du travail dans la livraison de Plus Nieuws précitée. La présentation des résultats fera l’objet d’une exposition à la galerie Plus Kern. Quatre expositions simultanées s’y tiennent du 27 octobre au 4 décembre 1971. Gianni Colombo (I), François Morellet (F), Joël Stein (F) et Werner Cuvelier qui produit donc l’ensemble des œuvres relatives au Statistic Project II en moins de cinq semaines.

 12 Il existe divers dessins préparatoires relatifs à l’établissement de ce code lettres et couleurs. Werner Cuvelier a envisagé ne travailler qu’avec 5 couleurs, vert, rouge, orange, jaune, violet. Il envisage aussi d’attribuer une couleur différente à chaque lettre de l’alphabet. Il expérimente d’ailleurs cette alternative à l’occasion d’une réunion privée, l’appliquant aux noms et prénoms des personnes présentes. (Dessin du 14 septembre 1971).

 13 Sur 24 possibilités (par permutation, 4 x 3 x 2 x 1), une seule a été exécutée, la possibilité G. En fait, ces 24 nouveaux tableaux pourraient être permutables les uns par rapport aux autres jusqu’à ce que : 24 x 23 x 22 x 21 x 20 x 19 x 18 x 17 x 16 x 15 x 14 x 13 x 12 x 11 x 10 x 9 x 8 x 7 x 6 x 5 x 4 x 3 x 2 x 1 = ? Nombre de possibilités obtenues.

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Werner Cuvelier, Statistics Projects, galerie Nadja Vilenne, dès ce dimanche 7 février

Werner Cuvelier
Statistic Project V, 1973
1. documenta 4 – Kassel 68, 2. Sammlung Karl Ströher, 3. Sammlung Peter Ludwig. 4. When Attitudes become form – Bern 69-70, 5. Sonsbeek buiten de perken – Arnhem 71. 6. Documenta 5 – Kassel 1972

La galerie Nadja Vilenne a le plaisir  de vous inviter à découvrir   

WERNER CUVELIER 

Statistic Project I (1971) – Statistic Project II, Zaffelare (1971) – Statistic Project V (1973) – Statistic Project VII (1973) R. Boehm / W.Cuvelier (1973) – Statistic Project XII Las Hortichuelas (1974), Statistic Project XXVI, Coördinaten / Coordonnées (1975-77)

dès ce dimanche 7 février 2021

Exposition accessible durant ces mois de février et mars. Jeudi – samedi de 14 à 18h et sur rendez vous. 

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Agenda Février 2021

Werner Cuvelier

-Liège (B), Werner Cuvelier, Statistics Projects, galerie Nadja Vilenne, 7 février – 15 mars 2021

Maen Florin

– Mechelen (B), Maen Florin, Playing at being Human, De Garage, Museum Hof van Busleyden en Sint-Janskerk, prolongation jusqu’au 14 février 2021

Suchan Kinoshita

-Bruxelles (B) , Risquons-Tout, Wiels , 12 septembre 2020 – 28 mars 2021

Sophie Langohr

– Liège, Art au Centre, 4 février- 30 avril 2021 

Jacqueline Mesmaeker

– Machelen aan de Leie (B), Jacqueline Mesmaeker, De page en page, Musée Roger Raveel, 13 décembre – 7 mars 2021 (solo)

– Bremen (D), gerlach en Koop, Was machen Sie um zwei? Ich schlafe. GAK, Gesellschaft für Aktuelle Kunst, du 18 septembre au 28 février 2021

– Gent (B), Uit de collectie, Why are you Angry ? Du 13 février au 30 mai 2021

Loic Moons

– Liège (B), Loïc Moons, Golden Boy, Vitrine Jeunes Artistes, Les Brasseurs, 6 janvier – 13 février 2021

Benjamin Monti

– Tournai (B), Paradis Perdus, Musée des Beaux Arts de Tournai, 3 octobre – 21 mars 2021

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