Pour l’exposition Figures, l’artiste-illustrateur Benjamin Monti est invité, en tant que commissaire, à puiser aux sources de ses images. Son travail est nourri d’une incessante recherche d’imprimés de toutes sortes, qui forment aujourd’hui une impressionnante collection d’un art qu’on dit « modeste », depuis les cahiers d’enfants jusqu’aux artefacts de la culture populaire. Ici, il laisse libre à cours à son obsession pour un type tout particulier d’images: une série de lithographies représentant différentes figures humaines grandeur nature, réalisées par l’imprimerie Wentzel à Wissembourg entre la fin du 19° et le début du 20° siècle. Archétypes singuliers, représentant·es d’un groupe social ou d’une fonction, elles parviennent jusqu’à nous aujourd’hui dans toute leur désuétude. Á travers les couleurs éclatantes et l’absurdité des postures, résonne leur humanité. Cette humanité précaire, on la retrouve dans les marionettes liégeoises que Benjamin Monti met en dialogue avec ces images. Rustres, elles touchent par leur humilité, leur simplicité économe. En contrepoint, et pour naviguer du papier au bois et inversement, Benjamin convie les gravures sur bois du dessinateur Olivier Deprez, préparatoires à son travail imprimé, qui nous montrent à leur tour des figures hors du temps, des silhouettes sans âge inscrites dans la matière.
Benjamin Monti assemble. Il collecte, décline, associe et détourne des images sur lesquelles — comme il le dit lui-même — « la main repasse ». Ce dernier geste, celui de l’artiste, transcende les images et annonce le dernier, celui de la signature.
C’est sur ceux qui le précèdent que s’attarde « Figures ». C’est le collecteur, le regardeur, que Les Drapiers mettent à l’honneur, célébrant ainsi une autre forme d’assemblage, celui que créent quand elles dialoguent entre elles les sources matérielles de son imaginaire.
Figures, Benjamin Monti & Olivier Deprez, Les Drapiers. Du samedi 16 novembre au samedi 21 décembre 2024
Benjamin Monti participe a l’exposition collective (H)auteur·es d’enfance. Maison de la culture de Tournai, jusqu’au 28 décembre 2024
(H)auteur·es d’enfance invite à traverser les âges et les expériences de vie. Les artistes et leurs oeuvres y content l’enfance, la leur ou celle des sujets représentés, sous différents angles d’approche. Il·elles naviguent entre les âges et leurs expériences respectives.
Les dessins intitulés Early works, réalisés à l’âge de quatre ans, de l’incontournable Wim Delvoye y côtoient les photographies de l’anthropologue involontaire Norbert Ghisoland, les dessins prolifiques et inclassables de Catherine Versé ou Francis Goidts (réalisés vers l’âge de dix ans), les créations et collections de Benjamin Monti et les installations de Benjamin Demeyere.
Maison de la Culture de Tournai, Galerie de la maison Avenue des Frères Rimbaut 2 7500 Tournai, jusqu’au 28 décembre 2024
Invitée l’été dernier en résidence au Manoir, centre d’art et de villégiature à Mouthier-Haute-Pierre, implanté dans la Haute Vallée de la Loue, pays de Gustave Courbet, Valérie Sonnier y expose cet automne. Peindre, dessiner, filmer la vallée de la Loue, titre de l’exposition, rassemble trois artistes issus des Beaux-Arts de Paris, là où Valérie Sonnier enseigne le dessin morphologique. Tous trois sont donc partis sur les traces du Maître d’Ornans. Courbet, on le sait, s’est largement inspiré des paysages de son pays natal et plus particulièrement de cette vallée de la Loue, le ruisseau du Puits noir, la grotte Sarrazine, la roche Bottine et bien sûr la source de la Loue.
Au Manoir, Valérie Sonnier prend ses marques. Elle y rencontre d’abord le fantôme des lieux, c’est plus rassurant de se sentir accompagnée. Elle installe ensuite ses fantômes les plus familiers sur la cheminée, des fantasmagories finement installées dans des cadres dorés de style Napoléon III, celui-là même qui comptait remettre la légion d’honneur à Courbet, distinction que l’artiste, en républicain farouche, refusa tout de go dans une célèbre lettre ouverte. Il y a là, sur la cheminée, tout le petit monde de Victor Hugo, dont Valérie Sonnier a également fréquenté assidument le fantôme à Hauteville House, Gustave Courbet, son épouse, ses amis, ainsi que Constance Quéniaux, oui, celle de l’Origine. Deux fantômes plus intimes de l’artiste se mêlent à la compagnie. Voici les lieux habités.
Valérie Sonnier dessine dès lors le manoir qui l’accueille et prend enfin de la distance, peignant les belvédères au loin, quatre fragments de paysages karstiques et panoramiques posés sur petits bois cirés. Plein jour, pleine lune, temps d’orage et songe d’une aurore boréale, Valérie Sonnier décline les atmosphères. Au passage, elle dessine sur papier comptable, un petit âne en bois sur roulettes portant sur son dos un célèbre camion rouge, celui-là même qui l’embarqua aux débuts de sa carrière d’artiste et même bien avant. Pour l’heure, l’âne s’appelle Gérôme, clin d’œil à Gustave. Quel âne ce Gérôme, n’est-ce-pas ? On connaît l’anecdote : Courbet appelait son âne Gérôme, pour le plaisir de dire : Gérôme est un âne., faisant ainsi allusion à Jean-Léon Gérôme, son contemporain, champion de l’académisme.
Enfin, Valérie Sonnier remonte la vallée de la Loue. Elle en ramène un petit film de six minutes, des plans serrés où l’eau, la roche, la végétation se mordorent rapidement. L’eau devient lave, la roche tellurique. Elle en ramène également un grand dessin de la source de la Loue que Courbet représenta maintes fois, la peignant sous tous ses angles, n’en retenant souvent que des éléments particuliers, comme un territoire initiatique qui ne manqua pas de provoquer bien des interprétations psychanalytiques.
En 2005, Emilio Lopez Menchero réincarnait Frida Kahlo. Presque 20 ans après, il rentre dans la peau de l’un des plus célèbres des amants de l’artiste mexicaine, Lev Davidovitch Bronstein, mieux connu sous le nom de Léon Trotsky. Et pour ne pas faire les choses à moitié, l’artiste tente également d’être Iossif Vissarionovitch Djougachvili, Joseph Staline. Une rivalité, un duel, un face à face entre l’intellectuel juif idéaliste et le brigand géorgien taciturne, entre le flamboyant champion du communisme universel et celui d’une URSS laboratoire politique. Tout a commencé, explique Emilio Lopez Menchero, lorsque j’ai ouvert un livre hérité de mon grand-père, qui lui aussi a été exilé, une traduction en espagnol de Staline, la biographie écrite par Trotski, son dernier ouvrage avant qu’il ne soit assassiné au Mexique par Ramon Mercader, stalinien catalan et agent du NKVD . Tenter d’être, le même jour, Lev Trotsky et Iossif Staline, tout cela a eu lieu l’été dernier, à l’invitation de Jordi Colomer, à Agullana en Catalogne, lieu le plus emblématique du grand exode républicain et catalan de 1939. J’ai appris à danser la Sardana, une danse traditionnelle catalane où les danseurs en cercle se tiennent par la main. Je la danse au son de l’Internationale, explique Emilio Lopez Menchero. A Liège, dans le cadre de ART AU CENTRE, Emilio Lopez-Menchero expose les résultantes de cette performance, films et photographies.
Aglaia Konrad participe à l’exposition Art in Stone, organisée par la Fundació Catalunya La Pedrera à Barcelona. Commissaire : Pénélope Curtis.
ART IN STONE. 4 October 2024 – 2 February 2025
The exhibition will highlight the stone work of some of the most outstanding sculptors of the 20th century
Stone is transformed into a means of artistic expression in the new La Pedrera exhibition. ‘Art in stone’, organized by Fundació Catalunya La Pedrera and curated by Penelope Curtis, former director of Tate Britain and the Calouste Gulbenkian Museum, proposes a journey through modern sculpture, exploring the deep bond between artists and this material ancestral The exhibition, which can be visited from 4 October until February 2025, reveals how the stone has inspired generations of artists and is still a key element in contemporary art.
‘Art in stone’ gathers more than eighty works, including nearly fifty sculptures and thirty drawings and engravings. This selection represents a journey through the 20th century and presents us with a group of modern sculptors who, born between the end of the 19th century and the beginning of the 20th century, contributed decisively to transforming sculpture as we understand it today. World-renowned figures such as Hans Arp, Louise Bourgeois, Eduardo Chillida, Naum Gabo, Barbara Hepworth, Henry Moore, Isamu Noguchi and Jorge Oteiza are some of the artists who star in this exhibition. His work not only redefined the limits of what was considered sculpture, but opened up new avenues of artistic exploration, often parallel and with points of confluence.
The exhibition tour also includes contemporary artists who have continued to work with stone as the central material of their creations. Xavier Corberó, Stephen Cox, Luciano Fabro, Barry Flanagan, Cristina Iglesias, Anish Kapoor, Ettore Spalletti and Alison Wilding are some of the creators who, with their work, have managed to keep this dialogue with stone alive, reinterpreting its creative possibilities. In addition, the exhibition has a series of photographs by Aglaia Konrad, taken in the emblematic quarries of Carrara, where the stone takes on an almost mythical dimension due to its beauty and history. (Nora Barnach, in Bonart, 3 october 2024)
Barcelona (E), Art in Stone, Fundació Catalunya La Pedrera, du 4 octobre au 2 février 2025. Curator : Penelope Curtis.
Vient de paraître : Emilio Lopez Menchero, Théorie des Bulles, Editions de la Lettre Volée.
Auto-engendrement, dédoublement et sérialisation, gommage, mais aussi, au-delà des procédés purement formels, engagement et prises de position : refus du vieil humanisme, critique des dérèglements de la société industrielle, mise à nu des violences stéréotypées – tout cela se retrouve dans cette Théorie des bulles d’Emilio Lopez-Menchero qui combine de manière simple et lisible – double gage· d’efficacité – les techniques les plus radicales pour dynamiser les traits essentiels du langage de la bande dessinée. Ce faisant, le livre en accroit aussi le potentiel critique. La théorie du titre ne signifie en rien quelque souhait de rester en marge de la pratique. Elle vise au contraire une façon de mieux construire des armes pour rebondir dans tes débats et enjeux de tous les jours. Telle quête conduit l’auteur vers l’essence de son médium – qui n’est nullement l’horizon ultime du travail créateur mais le tremplin que se donne Emilio Lopez-Menchero pour intervenir dans le monde plus large de l’art et, plus largement encore, de l’action sociale. L’essence en question est ce que le philosophe belge Henri Van Lier a nommé le multi cadre, terme aussi simple que juste, à mille lieues des idées que l’on continue à se faire sur la bande dessinée.
Jan Baetens
Présentation de l’ouvrage à l’occasion du finissage de l’exposition Bocadillos, Paviijloen Etterbeek, Thibaultlaan 2, 1040 Etterbeek, ce samedi 16 novembre de 15 à 17h.
Du 25 octobre 2024 au 6 janvier 2025, la RATP et Paris Photo mettent à l’honneur le travail de 7 photographes dans le grand couloir souterrain de Montparnasse, reliant la ligne 4 du métro aux lignes 6 et 13. Oeuvres de Claudia Andujar, Aglaia Konrad, Hiroyuki Takenouchi, Jonathan Llense, Viktoria Binschtok, Isabelle Wenzel et Christian Patterson.
Du 25 octobre 2024 au 6 janvier 2025, la RATP et Paris Photo mettent à l’honneur le travail de 7 photographes dans le grand couloir souterrain de Montparnasse, reliant la ligne 4 du métro aux lignes 6 et 13. Oeuvres de Claudia Andujar, Aglaia Konrad, Hiroyuki Takenouchi, Jonathan Llense, Viktoria Binschtok, Isabelle Wenzel et Christian Patterson.
The Arsenal Gallery in Bialystok, Poland is presenting the exhibitions Alevtina Kakhidze: Plants and People and William Kentridge:I am not me, the horse is not mine, both curated by Monika Szewczyk.
Alevtina Kakhidze is a Ukrainian artist of Ukrainian-Georgian descent. Her work primarily focuses on performance and drawing, but she also creates videos, installations, and texts. She lives in Muzychi, Ukraine, 26 kilometers from Kyiv, and grew up in the Donetsk region.
Kakhidze documents these dramatic events with the distance and objectivity of a scientist analyzing a system—or rather, multiple systems: legal, educational, colonial, consumerist, and systems of violence. She actively engages in contemporary discourses, often provoking significant debate. Her drawings created after February 24, 2022, frequently reflect on the cultural dynamics between Russia and Ukraine, going beyond the immediate realities of war to explore deeper themes within the history and culture of both nations, highlighting Russian colonialism and imperialism.
Kakhidze’s longstanding interest in plants has taken on a deeper significance in the context of war. She sees plants as some of the purest examples of pacifism on our planet; to her, they represent a model worthy of imitation but ultimately unattainable. As she writes in one of her works: “If I am wounded, I wish I could regenerate the way plants do.”
Pairing the exhibitions of Alevtina Kakhidze and William Kentridge at the Arsenal Gallery in Białystok is not an accidental decision. Their shows are united by decolonial thought reworking the cultural legacy of countries from the orbit of the former Soviet Union. Both of them also consistently reflect on their condition as humans and artists. This unique status—the intersection of art and those who create it—serves as both a starting point and a medium for their work, as much as any other material (perhaps even more so). They have long embraced their roles, yet they continue to question, marvel at, and test the transformative power of art.
En 2005, Emilio Lopez Menchero réincarnait Frida Kahlo. Presque 20 ans après, il rentre dans la peau de l’un des plus célèbres des amants de l’artiste mexicaine, Lev Davidovitch Bronstein, mieux connu sous le nom de Léon Trotsky. Et pour ne pas faire les choses à moitié, l’artiste tente également d’être Iossif Vissarionovitch Djougachvili, Joseph Staline. Une rivalité, un duel, un face à face entre l’intellectuel juif idéaliste et le brigand géorgien taciturne, entre le flamboyant champion du communisme universel et celui d’une URSS laboratoire politique. Tout a commencé, explique Emilio Lopez Menchero, lorsque j’ai ouvert un livre hérité de mon grand-père, qui lui aussi a été exilé, une traduction en espagnol de Staline, la biographie écrite par Trotski, son dernier ouvrage avant qu’il ne soit assassiné au Mexique par Ramon Mercader, stalinien catalan et agent du NKVD . Tenter d’être, le même jour, Lev Trotsky et Iossif Staline, tout cela a eu lieu l’été dernier, à l’invitation de Jordi Colomer, à Agullana en Catalogne, lieu le plus emblématique du grand exode républicain et catalan de 1939. J’ai appris à danser la Sardana, une danse traditionnelle catalane où les danseurs en cercle se tiennent par la main. Je la danse au son de l’Internationale, explique Emilio Lopez Menchero. A Liège, dans le cadre de ART AU CENTRE, Emilio Lopez-Menchero expose les résultantes de cette performance, film, dessins préparatoires et photographies.
Le narratif du film
Agullana, lieu emblématique du grand exode républicain et catalan de 1939, la Retirada, après la victoire des Franquistes. Pendant la retraite, des délégations de diverses administrations publiques de la République se sont installées à Agullana, à la frontière française, comme le Grand État Central de l’Armée, le Ministère d’État, le Ministère des Finances, le Ministère de l’Agriculture, la Présidence de la Generalitat, le Ministère de la Culture de la Generalitat et des délégations du Gouvernement du Pays Basque et de l’URSS. Mai 2024. Performance d’Emilio Lopez Menchero. Le drapeau soviétique flotte à nouveau sur l’ambassade.
Trying to be Lev Davidovitch Bronstein, mieux connu sous le nom de Léon Trotsky.
Léon Trotsky rencontre les villageois avant de danser la Sardana, une danse traditionnelle catalane où les danseurs en cercle se tiennent par la main. La Sardana qui fut interdite sous la dictature de Primo de Revira et étroitement « surveillée » sous le régime de Franco est considérée comme expression de l’identité catalane.
Trying to be Iossif Vissarionovitch Djougachvili, Joseph Staline.
En l’honneur de Joseph Staline, banquet géorgien à La Concordia, salle des fêtes du village, témoignage du modernisme que connut la vallée lorsqu’au 19e siècle Agullana était producteur de chêne liège.
Camarades, Trying to be Lev & Iossif, vidéo, couleurs, son, 14 min 45. Une coproduction de La Infinitac de l’Hospitalet & Les antipodes. Activité du MACBA, Barcelone. Captation vidéo : Sylvestre Gobart et Nath Viktor Film. Montage : Sylvestre Gobart.