Avant que j’oublie…. Mais oui, Jacqueline Mesmaeker pratique aussi le land art. Facétieuse, la voici qui propose de réintroduire les taupes dans nos jardins publics. L’artiste s’était déjà préoccupée de la disparition des lucioles ; cette fois, elle nous invite à protéger les taupes, ces petits mammifères fouisseurs vivant dans des galeries souterraines creusées dans la couche meuble de terre arable du sol, et dont la présence est signalée par les petits monticules de terre déblayée constituant les taupinières.
Les promeneurs verront-ils ces taupinières sur les pelouses de l’Abbaye de la Cambre à Bruxelles, là même où l’artiste a fait ses études ? Elles ont été « installées » à l’occasion de l’exposition « Avant que j’oublie », conçue par Michel Van Dyck, un événement artistique urbain, original et singulier convoquant l’éphémère, l’impermanence, le temps qui passe, un programme d’œuvres qui n’offriront qu’un moment, celui de leur vie, aux regards des passants. Pour réaliser une taupinière, précise l’artiste, il vous faut un pot en terre à large ouverture. On y verse une terre de jardin, brune, prélevée à la campagne, et très légèrement humidifiée si nécessaire. Puis à l’aide d’un morceau de bois on remue la terre en mouvement circulaire pour qu’elle s’écoule à travers le trou du pot et forme petit à petit le monticule de la taupinière. Le tour est joué. Celles de l’abbaye de la Cambre ont été réalisées par le jardinier Baudouin Rey.
A propos des taupes, rappelons que celles-ci ne sont ni aveugles, ni myopes. La taupe possède juste une très mauvaise vue. « J’ai vu que tu n’as pas vu », ce titre d’un œuvre vidéographique de Jacqueline Mesmaeker, qui évoque la grâce qu’il nous est donnée de voir et d’apercevoir des chose si fragiles et éphémères soient-elles, est ici de stricte actualité.
Aglaia Konrad inaugurait, il y a quelques années, une série de travaux consacrés à des architectures sculpturales. En filmant ou en photographiant la Maison Gilet à Angleur, la puissance brutaliste de l’église bâtie par Fritz Wotruba à Vienne ou celle de Nevers, dessinée par Claude Parent et Paul Virilio, Aglaia Konrad met l’accent sur la plastique du béton, sa tectonique, cette force intemporelle et spirituelle d’un chaos fusionné, maîtrisé. Cela l’a tout naturellement mené à Carrare, ce lieu qui condense par excellence cette relation même entre paysage, sculpture et architecture, chaos et ordonnancement.
Tous ces travaux récents s’inscrivent dans une perspective plus large. Depuis vingt ans, inlassablement, Aglaia Konrad observe, investit, traduit la ville et son urbanité, cette métropole globale, qu’il s’agisse de Pékin ou de Sao Paulo, du Caire, de Dakar ou de Chicago. Elle en analyse le champ sociologique, les paramètres socio-politiques, focalise son attention sur l’architecture, sa modernité générique et sa généalogie. Son travail s’inscrit au cœur même de la métropole, dont elle perçoit les pulsions, s’en échappant parfois afin d’en mieux comprendre les nœuds de circulation, l’expansion, les accès, la relation au paysage. Cette image urbaine, dans l’œuvre d’Aglaia Konrad, est délibérément pauvre. Elle n’a pas de support précis, pas de surface fixe, ne se revendique d’aucun des canons de l’acte photographique tel qu’habituellement codifié. Son œuvre est un vaste corpus interrogeant la ville, ses signes, sa modernité. L’image peut être argentique ou simple scan à jet d’encre, photocopie numérique, projection de diapositive, épreuve négative, impressions marouflées à échelle de l’espace mis en œuvre. La valorisation critique de l’image intervient en son utilisation ponctuelle et contextuelle. Et l’image peut être exposée ou publiée car l’édition prend ici un sens tout à fait singulier, là où la mise en page de l’image est aussi et surtout une mise en perspective.
C’est justement au moment de décider d’une utilisation ponctuelle qu’est, paradoxalement, née la série des «undecided frames». Immergée dans son sujet, Aglaia Konrad multiplie les prises de vue d’un même sujet. Certains clichés sont parfois fort proches, tellement proches et chacun si singulier, que l’artiste reste dans l’indécision quant à celui qu’il faut prélever dans l’archive. D’où l’idée d’assumer le fait de ne pas choisir, ce qui entraînera un décision : celle, dès lors, de confronter les deux clichés, juxtaposés et de les nommer «Undecided frames».
D’Osaka à Créteil, de New York à Madrid, on se prend bien naturellement à jouer au jeu de la différence, constatant un mouvement latéral de l’objectif, une profondeur de champ distincte entre les clichés, placés côte à côte. Le regard passe, en effet, sans cesse d’une image à l’autre. Je repense bien sûr à ces quelques mots écrits par Marcel Duchamp en 1937, consignés dans ses Notes : «il existe une conception grossière du déjà vu qui mène du groupement générique, deux arbres, deux bateaux, aux plus identiques « emboutis». Il vaudrait mieux chercher à passer dans l’intervalle infra mince qui sépare deux identiques qu’accepter commodément la généralisation verbale qui fait ressembler deux jumelles à deux gouttes d’eau». Duchamp parlera de « semblablité » à propos de la similarité : le même, cette « approximation pratique de la similarité ». «Dans le temps, précise-t-il, un même objet n’est pas le même à une seconde d’intervalle». Oui, avec les «undecided frames» d’Aglaia Konrad, nous nous situons dans le domaine de l’infra mince. «J’ai choisi exprès le mot mince, explique Marcel Duchamp, qui est un mot humain et affectif et non une mesure de laboratoire. Le bruit ou la musique faits par un pantalon de velours côtelé comme celui-ci quand on le fait bouger est lié au concept d’infra mince. Le creux dans le papier entre le recto et le verso d’une fine feuille… A étudier !… C’est une catégorie dont je me suis beaucoup occupé pendant ces dix dernières années. Je pense qu’au travers de l’infra mince, il est possible d’aller de la seconde à la troisième dimension».
De fait d’un cliché à l’autre, dans le cas des photographies d’Aglaia Konrad, nous sommes face au même objet ou sujet, nous en avons une perception différente, et nous sommes aussi face à des objets ou sujets différents, ne fut-ce qu’en raison de l’intervalle de temps qui existe entre deux prises de vue. Cette dimension temporelle est particulièrement perceptible dans les vues aériennes, New York, Paris, où les images, différentes en raison en raison de la perception que nous avons du vol de l’avion, pourraient partiellement se superposer. «A chaque fraction de la durée, note Thierry Davila, à propos de l’infra mince duchampien, se reproduisent toutes les fractions futures et antérieures. Toutes ces fractions passées et futures coexistent dans un présent qui n’est déjà plus ce que l’on appelle ordinairement l’instant présent, mais une sorte de présent à étendue multiple. C’est dans ces multiples étendues du temps que le sujet ici abordé circule, c’est dans leur incessante activation qu’il trouve les moyens d’une plasticité renouvelée». Par rapport aux clichés isolés d’Aglaia Konrad, cette plasticité renouvelée, augmentée même, réside dans l’infra mince qui sépare deux prises de vue mise côte à côte. Nous ne sommes même plus devant deux photographies juxtaposées mais bien devant une image composée de deux clichés. Dans les choix qu’elle a opéré, Aglaia Konrad décline ces points de vue de toutes les façons, jusqu’à nous proposer des objets effectivement différents mais similaires. Ainsi ces deux «épis de Créteil», qui semblent à première vue être la même tour, bien que photographiées sous des angles distincts, mais qui sont deux tours rondes différentes, même pas jumelles, puisqu’elles appartiennent toutes deux à un ensemble de dix tours bâties par Gérard Grandval. Troublantes sont ces deux prises de vue dans la banlieue parisienne, devant des bâches de chantier représentant elles-mêmes la ville à venir, clichés si graphiques que la présence et le passage d’une passante sur le seconde semble presque virtuelle. D’autres nous rendent le mouvement particulièrement perceptible. Qu’il s’agisse de celui de l’objectif, – cette voiture dans un garage à Tokyo et sur le second cliché, la statue du bouddha qui disparaît à gauche, l’arbre qui apparaît à droite -, ou qu’il s’agisse du mouvement conjugué de l’objectif et de la circulation urbaine, comme dans cette double vue d’un coin de rue à Osaka où tout s’anime. Assurément, le choix de ne pas décider entre deux clichés nous donne à voir une réalité augmentée, une dimension supplémentaire dans la fusion des images ; cette dialectique du semblable et de la différence aiguise notre perception du réel.
Another photographic conundrum radiates from the series “Undecided Frames”. This work consists of pairs of photographs that are juxtaposed in a frame, with only a broad white border separating them. Although the photographs look similar at first, they display competing versions of one and the same image, the barely noticeable differences between them the results of a camera that has moved ever so slightly. One photographic pair, for example, shows a construction/destruction site in Chongqing, China. In the left image, the area is frontally photographed, with the camera pointed straight ahead, while the right captures the scene with the camera slightly tilted downward. In principal, nothing has changed: the lorry is still seen standing on the upper bridge and the man-potentially the driver-is still leaning on the rail. The photographs are shot within a relatively short timeframe, yet they present a different view: one photograph looks more balanced whereas the other shows the scene in a more dynamic way, as if stressing the dialectic between the construction of the highway and the destruction of the houses. Two very different takes, then, and yet, as the title intuits, no choice could be made? In sabotaging the moment of selection, Konrad’s Undecided Frames not only highlights the absurdity of the photographic act but also muddles the relationship between the four parties involved in photography: photographer, camera, world and viewer.
Suggested by the title, these pairs express an impossibility to choose « the right image. » As the camera makes no mistakes-each and every technical image is a viable alternative-there is no good or bad image logically speaking: photography simply measures and captures the light refracted by whatever falls within the scope of the lens. Put differently, to say that a photographic image fails is to introduce an act of judgement, performed by a discerning subject that declares the photograph good, bad, interesting, deficient, etc. Because the mechanical nature of the medium asserts that every image is nonetheless right and also because the criteria, standards, and convictions on which aesthetic judgement is based transfigure historically- a particular form of indecisiveness that is intimately linked to the photographic act as such comes to the fore. While the photographer and the camera start as an inseparable unity, the moment the photographer presses the button this unity is violently severed, both following for a brief moment of time their own path, their own logic. Only later on, when the image is developed and the photographer meets the result on the contact sheet, will he find himself included again in the photographic process, though now engaged in a discussion about which image to accept or reject. The photographic act installs an undecidability following directly from the action of the camera, but also, indirectly, from the discrepancy between that logic and the (mutable) set of aesthetic standards the photographer adheres to.
Two photographs of a rectangular column of marble in the Carrara quarries illustrate another of these inherently photographic paradoxes. Reading them left to right, these images infer a slight movement backwards and to the left. But we don’t really see such a movement, we only notice a jump between two different spatial positions (with the white, in-between border acting as « dead time »). Like other pairs in the series, this photographic couple differentiates our own, phenomenological sense of being in the world from the camera’s: where we experience a spatiotemporal continuum and glide fluently from one moment/place to another, the apparatus stutters and carves up the spatiotemporal continuum into discrete, discontinuous moments/places. On another level, the differences between the double takes could also be understood as a reference to Konrad’s working method. They would express her careful exploration of the subject, a continuous probing of it with the camera, the slight changes expressing a vivid but also somewhat fuzzy negotiation with the world. However, by each time limiting herself, in a body of work titled “Undecided Frames”, to only two images, she also points out that these photographs shouldn’t be seen as alternatives for one another, but as separate images in their own right. Immediately the problem of choosing reasserts itself, albeit with a slightly different and somewhat unexpected outcome: choosing becomes impossible not because these two images look similar, but because they are incomparably different.
In refusing to choose, Konrad also reclaims her position as an intermediary between image and viewer. Bringing the differences between the two images (however small they might be) to the notice of the viewer, she makes clear that every photographic image is the result of her subjective choices. Moreover, by naming these double takes « undecided » she manoeuvres the viewer into a situation he normally never has to deal with, the moment of choosing being a solitary moment, safely hidden from the prying eyes of the public. Now the question of choosing becomes our problem: are we supposed to make the choice Konrad didn’t want to make? Maybe, but for us, this idea of choosing is even more senseless than it was for her, because we have no stake in this choice. The only option we are left with is to nod our head from left to right (and back again), searching in vain for a way out of this either/both/neither dilemma. We find ourselves forever stuck in the impossible logic of the photographic system.
Steven Humblet teaches theory and history of photography at LUCA School of Arts, Brussels. He has studied philosophy and anthropology, wrote a dissertation on Benerice Abbott’s “Changing New York”, and publishes regularly on photography.
Le titre de cette œuvre conçue en 2019 par Sandrine Morgante, Figlie dei Militari (Filles de Militaires) s’inspire directement du nom d’un singulier pensionnat de jeunes filles, fondé à Turin en 1866-68, l’Istituto Figlie dei Militari. Créé au lendemain de l’Unification italienne à l’initiative de la Marchesa Maria Luisa del Carretto di Santa Giulia avec la contribution et le soutien de Vittorio Emanuele, l’institut est initialement réservé aux orphelines de guerre, aux filles d’invalides et militaires décorés pour bravoure. Figlie dei Militari est également le nom du fond d’archives de cette institution, fond déposé aux Archives de l’État à Turin, un fond qui semble particulièrement riche et prometteur. Dès le premier classement des documents, note l’Association Archivio delle Donne in Piemonte, « le débat sur une nouvelle éducation féminine qui ressort des procès-verbaux de la commission de promotion et du conseil d’administration, la reconstruction de la vie interne sur la base des nombreux règlements, l’évolution des cours activés dans le cadre des différentes réformes scolaires et, surtout, les idées pour reconstruire les histoires des femmes qui ont fréquenté l’institut en tant qu’élèves, enseignantes, directrices ou membres des institutions administratives du collège apparaissent d’un intérêt considérable (…) Cette école laïque dont on sait très peu de choses, unique en Italie est un point de référence pour un certain type d’éducation de genre au point de rivaliser avec le plus célèbre pensionnat Poggio Imperiale de Florence. La recherche s’enrichira grâce aux histoires des nombreuses protagonistes de la vie de l’institut, des histoires de femmes qui peuvent devenir des points d’étude et d’approfondissement dans le domaine peu exploré de l’histoire des femmes »(1).
Sandrine Morgante, toujours investie dans l’étude du langage en tant que facteur psychologique et variable, s’est particulièrement intéressée à une liasse de travaux scolaires datés de 1917, liasse extraite de ce fond d’archives, des dissertations, un apprentissage rhétorique de stricte actualité, appliqué au contexte historique, celui de la première guerre mondiale. Les travaux sont destinés à un concours, celui de la meilleure dissertation de l’année ; les demoiselles résidentes de l’Institut sont invitées à évoquer la gloire, la patrie, le sentiment national, le sacrifice, adressant symboliquement leurs missives aux héros du temps. « Je ne sais pas comment te glorifier, écrit l’une d’elle, comment exprimer l’admiration que tu suscites dans mon âme, la force merveilleuse de sourire encore et encore, dans les luttes et les angoisses que je ressens en tant que citoyenne italienne, en tant que fille, en tant que sœur ; je ne sais pas comment te faire comprendre le désir que j’ai de souffrir, moi aussi, fortement, rudement, sereinement, comme toi, comme tant de tes nobles compagnons, enfants devenus hommes si rapidement et prématurément ». La rhétorique exalte le sentiment national, l’accomplissement, la douleur, l’honneur, la fierté, l’héroïsme, le sens du devoir, l’adversité sublimée. « Les mots deviennent hyperboliques, sacrés, absolus », constate Achille Filipponi, qui commente le portfolio consacré à l’œuvre de Sandrine Morgante, paru dans la revue Archivio Magazine.(2) «La langue écrite se transforme en une force écrasante, constate-t-il encore. Sandrine Morgante s’intéresse particulièrement à ce processus d’unification : les différents essais paraissent se ressembler, et il est facile de confondre les auteurs. Des mots tels que : héros, douleur, obscurité, sang et cœur soulignent le corps comme cœur d’un processus de dévouement inévitable à la noble cause. La douleur vous transforme, la mort est un sacrifice. La langue absorbe l’effet du nouveau régime psychologique qui régit la nation et la période de l’histoire ». Solennité, dramaturgie et faculté d’émouvoir : « La guerre simplifie à l’extrême le discours, pour reprendre les propos du philosophe Alexis Philomenko. Il est saisissant de constater comment une profusion d’images se retrouve ramenée à la plus extrême simplicité dans le discours de la guerre. Cela va si loin que toute guerre dont les mobiles apparaissent aux yeux de l’historien, critique ou érudit, comme infiniment complexes et surtout comme très nombreux, se présente à l’esprit des combattants sous une forme linéaire presque pure, tracée par quelques formules » (3).
Sandrine Morgante a parfaitement compris le sens rhétorique de cette forme linéaire et conforme, jusqu’à s’emparer du concept de copie conforme. Certes, il y a cette réduction linguistique générée par le discours autoritaire, explicitement requise par le contexte de la guerre, mais il y a aussi l’action expressive et psychologique de l’écriture agissante. Elle décide donc de fondre l’ensemble des dissertations en une seule, choisissant les extraits, les transcrivant sur papier carbone ; elle contrefait les écritures manuscrites, construit ainsi sa propre dramaturgie mise en page. Il n’y a plus qu’une seule composition où s’immergent et disparaissent les compositions originales. Celles-ci ne sont plus qu’une, tandis que l’artiste s’empare de toutes, dans une symbiose qui aborde et absorbe la langue comme un organe variable résultant d’un paysage culturel.
En résulte cette vingtaine de feuillets. Achille Filliponi attire notre attention sur l’importance d’une esthétique de la géométrie en temps de guerre, l’ordre pour redoutable scénario visuel, la parade pour dramaturgie, et dieu sait si, en Italie, les fascistes en ont usé. Osons dès lors la comparaison : chacun de ces feuillets alignés ici agit comme une centurie de mots, certes uniformisés et faisant bloc, mais composée d’autant de destins particuliers.
(2) World Sign relic, Archivio magazine #4 The Unreal issue, Torino, 2019
(3) Alexis Philomenko, « Essai sur la philosophie de la guerre », éd. Vrin, Paris, 1976.
“War, war, war” is the cry of a thousand youthful mouths, the cry of struggle and hope that flew from the eternal white of the Alps to the red of the island of fire. It was an immense cry, it was the call of youth and justice and no one remained motionless listening to it. But if the strong word that shocks and improves comes to us from those who suffered directly for its sacred duty, from those who peacefully sacrificed their beautiful vermilion blood as heroes, the emotion is deeper and more intense, the will for good is firmer and more tenacious, the whole soul is purified, for the infinite gratitude, for the new force that welcomes. To die, when everything inside and around us says “live”, when life, a powerful and splendid force, manifests itself, multiple and blazing in everything, is sad! And death is sad, as well it is atrocious to survive it, no longer healthy and vigorous in the body but either with a worn organism or with an atrophied sense or limb!
“Chi per la patria muor, vissuto ha assai” [“He, who dies for the Motherland, has lived a great deal”]. Think, dear, how much truth there is in this verse. He lived a great deal because he did a little good for his homeland, because he contributed to making it great and glorious by giving it the most precious thing he owns: his life. And on the captain’s chest, he affixes the silver medal for his military valour. He kisses him on his brown-haired head and, moved by the emotion of the wounded, has tears in his eyes, tears that contrast his severe, almost rigid, figure. His dull eyes will receive the vision of Victory, as he saw it then, when he ran forgetful of himself at the heads of his soldiers, towards the flaming red horizon of blood and fire, and he will see it shine like light in the darkness. Well done, young men! And it is precisely in suffering, in adversity that the strong and generous hearts are known. Your pain, like all pains, is not unsuccessful. It improves you and sublimates you because it does to your soul what the plough does to the land: it tears it apart, but fertilises it. Oh, brave children of this country blessed by nature, it is to you that we will owe the great progress of our country and to you, therefore, will go all the roses of the gardens of beautiful Italy.
I simply do not know how to glorify you, how to express the admiration that you evoke in my soul, the wonderful strength to smile again and again, in the struggles and anxieties that I feel as an Italian citizen, as a girl, as a sister; I do not know how to make you understand the desire I have to suffer, too, strongly, rudely, serenely, like you, like so many noble companions of yours, children turned to men quickly and prematurely.
The night is dark, everything is silent. A few beams of light from reflectors, a few imperceptible sounds, and nothing else. Yet, in the midst of that silence, our soldiers, the children of the same great Mother, are heroically fulfilling their duty. They carry out every act with serenity and indescribable enthusiasm, without any sacrifice. If there is terrain to explore, if there is some dangerous reconnaissance to do, a thousand volunteer for it, and all would like to be there, where the brawl is stronger and the fight is harder. Many seriously wounded continue to heroically fight, not caring at all about the blood that flows on the ground, the pain that tortures them. In order to redeem itself entirely, every day the homeland needs deaths and misery, and all of that which constitutes the best means of achieving the high goal that was set, must not be called sacrifices. And you, poor wounded, suffer with a smile on your poor, pale lips.
Maybe because before you were weak and unstable and now you are strong and firm. If once your heart was afraid of the fight, now it welcomes it with delight; if it feared pain now it uses it as an instrument to inspire many good deeds. “Oh sister, I’m so happy! …” the soldier doesn’t finish his phrase; his voice is broken by the sobs. He cries like a child, and little by little he calms down, becoming serene. He looks forward to the general, the iron man with the golden heart that he has so often admired. And the commander finally enters, accompanied by several officers, approaches the beds of patients and has a word of praise for everyone, words of affectionate encouragement. And since the honour and pride of having given so much prevent you from looking with regret at the cruel consequences of what you gave away, I hope with all my heart that those who you love and those who love you, will understand and help you to stay proud, serene and strong, like today, and prevent you from regretting, even remotely, the happiness of seeing and enjoying life like everyone else. Let this strong and blessed glory be the beacon of light not only of your whole life, but also of all the youth of Italy, now and forever over the centuries. And he feels this form that sublimates him, and contemplates him in the darkness of its endless night. How many hearts, through the suffering.
they felt, will abandon vain affections, will suffocate vulgar feelings, because the pain improves the man, extinguishes the bad germs in him. Never before has there been such an unselfish competition to help those who suffer more than us like there is today, when we are all, in one way or another, affected by pain. It is the pain that makes us better, that healthy pain that makes everyone stronger and that, increasing the ranks of our heroes, makes the Italian people grander and more glorious.
Jacqueline Mesmaeker participe à l’exposition Janelas, une exposition d’art postal proposée par Marc Buchy et Tiago De Abreu Pinto, Bibliothèque Jean Laude, Musée d’art moderne et conte=mporain de Saint etienne, du 14 octobre au 31 décembre 2022
Janelas est une exposition présentant une série d’enveloppes à fenêtre, envoyées en 2021 à 70 artistes de 25 nationalités vivant dans 17 pays, qui étaient accompagnées d’une proposition de participation et d’un protocole.
Par ces instructions, l’enveloppe fermée se transformait en espace d’exposition miniature et sa fenêtre — janela, en portugais — le seul moyen de voir la création des artistes.
Ce projet était une manière légère de communiquer, travailler et réfléchir entre des collègues artistes durant la période sombre traversée alors. Le caractère ludique de Janelas est lié à son origine, à sa forme de communication aujourd’hui considérée comme désuète, ainsi qu’au nécessaire voyage physique ayant pris place entre les organisateurs et tous les participants.
Le MAMC+ accueille le premier volet d’une large sélection d’œuvres qui abordent et revisitent des notions liées l’histoire du Mail Art. Ce processus d’art postal a conduit les artistes à expérimenter la matérialité, la spatialité, la visibilité, l’humour, la dimension politique et la dissidence d’un tel type de création.
Pour l’émission Façon de Voir sur La Première, Fabrice Kada rencontre Aglaia Konrad dans son exposition Umbau au FOMU à Anvers. Le podcast (à écouter, à télécharger) est ici : https://www.rtbf.be/auvio/detail_par-oui-dire?id=2952151 (Auvio)
#focus2022 | Nouvelles acquisitions de la Collection artistique de la Province de Liège
Du 22 octobre au 20 novembre 2022, au Palais Provincial – Place Saint-Lambert,
Vernissage le vendredi 21 octobre à 18h
Sortie du STP est le fruit d’une collaboration entre Jacques Charlier et le réalisateur Jef Cornelis, un film 16 mm produit en 1971. Jef Cornelis est à Liège, il est venu tourner une séquence à propos de Rocky Tiger, nom de scène de Claude Delfosse, collègue de Jacques Charlier au Service Technique Provincial de la Province de Liège et chanteur amateur de rock. Rocky est le sujet d’une séquence d’un film que Charlier destine à la Biennale de Paris de 1971. Afin de ne pas gâcher de pellicule et après avoir réalisé la séquence concernant Rocky Tiger, Charlier et Cornelis installent la caméra à la fenêtre du premier étage d’une maison située rue Darchis, juste en face du bâtiment du Service Technique Provincial. Cette double porte flanquée de la plaque émaillée du STP que Charlier a déjà utilisée comme motif ou, au sens broodtharcien du terme, comme décor pour différentes photographies où l’artiste met ses collègues en scène (entre autres, pour le Départ du Faune), sera l’élément central de cette séquence filmique, longue de près de huit minutes. La caméra enregistre en plan fixe les mouvements à l’heure de la sortie des bureaux. Les badauds passent, les voitures et bus descendent la rue, la porte s’ouvre et se referme. Les employés du STP sortent, les uns après les autres, seuls, parfois à deux, et quittent la sphère de leur labeur quotidien, leur univers professionnel. Il ne se passe rien d’autre. Ce plan fixe est le degré zéro de l’écriture cinématographique. Il est un clin d’œil à La Sortie de l’usine Lumière à Lyon, film réalisé par Louis Lumière en 1895, considéré comme le premier film de l’histoire du cinéma. En caméra cachée, il est l’enregistrement de l’heure de sortie des employés comme la collecte des Signatures Professionnelles (collection SMAK, Gent), extraites au fil des mois du Service, témoignaient des heures de prestations des employés (entrée à 8h, sortie à 16h45). Ainsi ce film appartient à une constellation d’œuvres que Jacques Charlier qualifie lui-même de Documents relatifs à l’univers socio professionnel, des essuies plumes aux buvards et papier de tables, des photographies amicales aux fiches de présence, documents qu’il extrait de leur contexte d’origine pour les présenter dans le contexte de l’art contemporain.