Archives mensuelles : mai 2014

John Murphy, Such are the vanished coconuts of hidden Africa, les images (1)

John Murphy

John Murphy
Such are the vanished coconuts in hidden Africa (The Joseph Conrad serie), 2003
Etching on offset and serigraphy (text), 85 x 101 cm. Ed. of 2.

John Murphy

John Murphy

John Murphy
The Deceptive Caress of a Giraffe, 1993
Oil on canvas, 264 x 168 cm.

John Murphy

John Murphy

John Murphy
E la nave va, 2013
Photo work, 239 x 179,5 cm.

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Jacques Charlier, Himmelsweg, Glorious Bodies, IKOB Eupen

Jacques Charlier

Jacques Charlier

(…) C’est à une autre mystique et non des moindre, Thérèse d’Avila, que Jacques Charlier fait appel lorsqu’il installe « Himmelsweg » (1987) en Pierreuse à Liège, chapelle Saint-Roch, en 1991. Un passage écrit par Thérèse d’Avila retient toute son attention : « Tout ce que les livres nous disent des déchirements et des supplices divers que les démons font subir aux damnés, tout cela n’est rien auprès de la réalité : il y a entre l’un et l’autre, la même différence qu’entre un portrait inanimé et une personne vivante, et brûler en ce monde est très peu de chose, en comparaison de ce feu où l’on brûle dans l’autre » (1). « Himmelseg », chemin du paradis, évoque la résurrection de la chair, la faute, l’enfer, le génie du mal et ses entreprises séductrices, tout comme le tunnel de la mort des camps d’extermination nazis. Ceux-ci donnent le nom d’« himmelsweg » à la rampe d’accès composée de barbelés et de branchages qui mène à la porte des chambres à gaz.

Ah, que l’image du Malin peut en effet être séduisante ! Jacques Charlier réinvestit une oeuvre majeure de la sculpture romantique,  deux versions du « Triomphe de la Religion sur le Génie du Mal », l’une par Joseph Geefs, l’autre par son frère Guillaume, la première conservée aux musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles, l’autre assise au pied de la chaire de vérité de style gothique fleuri de la cathédrale Saint-Paul à Liège, là même où l’on devrait trouver… la première. Oui mais voilà : l’ange déchu sculpté par Joseph Geefs fut considéré comme trop sublime. « Joseph campe un éphèbe songeur qui, le sceptre brisé et la couronne au bout d’une main lasse, séduit par sa beauté ambiguë », écrit Jacques Van Lennep à qui l’on doit une passionnante étude sur le sujet (2). A part les ailes de chauve-souris, c’est un homme à la grande beauté classique, quasi nu, un drapé lui frôlant l’aine ; sa taille a la courbe serpentine. Il est jeune, lisse et gracieux, presque androgyne. Même le serpent semble s’alanguir à ses pieds. Les paroissiennes ne resteront pas de marbre devant cette sculpture plus proche d’Adonis que de Lucifer et qui, d’ailleurs, semble provoquer une singulière dévotion et ferveur populaire. Devant tant d’intensité charnelle, la fabrique d’église commandera une seconde version de cet ange déchu, cette fois à Guillaume Geefs. Celui-ci représentera l’ange des ténèbres un tout petit peu moins dénudé, hanches drapées et dissimulées, cornu afin de le déshumaniser, plus proche ainsi de l’iconographie satanique. A ses pieds, roule la pomme de la faute consommée puisque marquée d’une morsure. Enchaîné et donc plus prométhéen que son prédécesseur, visage crispé, Lucifer se protège la tête du châtiment divin, ce qui bien sûr, est plus conforme à la commande d’origine et rassurera le clergé. Dans l’installation de Jacques Charlier, la photographie encadrée de la sculpture de Guillaume Geefs surplombe un guéridon drapé de noir. De lourdes chaines sont disposées sur l’étagère inférieure. Sur le guéridon, il ya trois livres : une étude carmélitaine sur Satan, un vieux livre scientifique sur l’Air ainsi que « Le Mémorial des Juifs belges exterminés à Auschwitz ». C’est là, la réalité du génie du mal ; et la plus grande faute serait l’oubli.

Il n’est évidemment pas anodin que Charlier choisisse une étude carmélitaine parmi les trois livres déposés sur le guéridon. Il crée, en effet, cette oeuvre alors que bat son plein la polémique du Carmel d’Auschwitz (1984 – 1993), installation à l’intérieur du camp d’extermination d’une congrégation de Carmélites, point de départ d’une crise grave qui dépassa très vite le conflit religieux, pou s’installer dans le sens même de l’histoire polonaise et mondiale. Appropriation de la mémoire, instrumentalisation des images, « Auschwitz est de plus en plus déconnecté de l’histoire qu’il a produit », pour reprendre les termes d’Annette Wieviorka. (3) D’aucuns se rendent compte qu’une mémoire saturée est une mémoire menacée dans son effectivité même, et qu’il est difficile de savoir ce qu’il faut faire pour désaturer la mémoire par autre chose que l’oubli. Comment dès lors réinventer la mémoire, une mémoire en processus, une mémoire qui ne soit pas qu’un résultat, sachant que l’oubli provoque la chute éternellement recommencée.(…)

(1). Cité dans « Le Merveilleux et la périphérie, Espace 251 Nord, Liège, 1991.
(2). Ibidem
(3). Voir à ce sujet la remarquable contribution de Georges Didi-Huberman, Ouvrir les Camps, Fermer les yeux, Editions de l’E.H.E.S.S. Annales, Histoire, Sciences sociales. 2006/5, pages 1001 à 1049.

Jacques Charlier

Jacques Charlier
Himmelsweg, 1986-1991. Technique mixte, 2 photographies encadrées (Joseph Geefs, L’ange déchu et Guillaume Geefs, Le génie du mal) 120 x 95
cm et 90 x 130 cm, sellette, chaînes, livres sous verre. Dimensions suivant installation

Jacques Charlier

Joseph Geefs, L’Ange du mal, marbre blancn 1842; MRBAB.

Jacques Charlier

Guillaume Geefs, Le Génie du Mal, 1848. Marbre blanc, 165 x 77 x 65 cm, cathédrale Saint-Paul à Liège. Photographie NB intégrée à Himmelsweg de Jacques Charlier

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Jacques Charlier, Sophie Langohr, IKOB, Nuit européenne des musées ce 17 mai & revue de presse

Glorious bodies IKOB (photo Laurence Charlier)

Dans le cadre de la Nuit européenne des musées.

Le 17 mai, l’ikob vous accueille chaleureusement de 13 à 22h et vous propose un programme à ne pas manquer.

16h. Traversée guidée de l’exposition Glorious Bodies par la curatrice et directrice Maïté Vissault.
19h. Projection en grand format du film Jacques Charlier « Pirate de l’art » suivie d’une discussion avec les artistes Jacques Charlier et Sophie Langohr.

Glorious Body

Cette soirée sera également l’occasion de découvrir la publication qui accompagne l’événement.
« Jacques Charlier – Sophie Langohr, Glorious Bodies », une publication sous forme de magazine.
64 pages, format 31,5 x 21,5 cm, nbr ill couleurs, texte : Jean-Michel Botquin. Français / English. Disponible à la galerie et à l’IKOB. Prix public : 12 euros.

A propos de l’exposition, Jean-Marie Wynants écrit dans LE SOIR de ce mercredi 14 mai :

A ma gauche, la Vierge au visage doux, apaisé, au regard extatique tourné vers le ciel. A ma droite, Morgane, sanglée dans son armure, entourée de corbeaux, le regard fier, l’épée à la main dans un inquiétant paysage brumeux. Deux visages, deux corps, deux images ayant traversé le temps. Deux personnalités au cœur de l’exposition de Sophie Langhor et Jacques Charlier à l’Ikob d’Eupen. Un parcours riche en œuvres mais particulièrement aéré et agréable dans sa circulation.

Au cœur du propos, ces Glorious Bodies qui donnent son titre à la manifestation. « Depuis toujours, explique Jacques Charlier, l’obsession première de l’homme est de durer, de défier la mort et de se donner une assurance contre celle-ci. C’est le sens de bon nombre d’images issues de notre tradition judéo-chrétienne. » Se sachant mortel, l’homme cherche de petits arrangements pouvant le mener vers une vie éternelle. Même par procuration. « On trouve la consolation par les images, poursuit Jacques Charlier. Aujourd’hui comme hier. La communion des people a juste remplacé la communion des saints. Mais c’est le même principe. Les people ont des fans, donc il y a un acte de foi et ils ont leurs martyrs comme Marylin Monroe ou James Dean. » Et plus récemment Kurt Cobain, Amy Winehouse ou Paul Walker.

Et chez les people comme chez les saints, on parle de transfiguration, même si les supposés événements miraculeux d’hier ont été remplacés par Photoshop et la chirurgie esthétique. C’est ce que montre magistralement le travail de Sophie Langhor. « Dans un premier temps, explique-t-elle, j’ai découvert dans les caves du musée Curtius, à Liège, une série de statues de la Vierge confiées au musée par les fabriques d’Eglise. Je les ai photographiées en gros plan, à la manière des images publicitaires pour les cosmétiques. Ensuite, j’ai recherché sur internet des images se rapprochant le plus possible de mes Vierges. J’ai ainsi constitué des diptyques et remis une couche en traitant les images de façon similaire. »

L’effet est saisissant. Dans un premier temps, le visiteur croit voir des portraits reproduits deux fois. Puis en s’approchant, on note les légères différences mais aussi et surtout l’incroyable similitude entre les icônes d’hier et les people d’aujourd’hui. Sophie Langhor a ensuite fait le même type de travail avec les hommes, photographiant une quinzaine de statues de saints de l’église Saint-Nicolas d’Eupen et leur trouvant des correspondances dans les célébrités masculines d’aujourd’hui. Un travail de longue haleine, aussi fascinant et déroutant que révélateur. « Il y a plusieurs dizaines d’années de différence entre ces portraits, constate l’artiste, mais les codes de l’image n’ont guère changé. »

De son côté, Jacques Charlier mêle pièces anciennes (sa sainte Rita ou sa Jeanne d’Arc revisitées, bien loin de celle du Front national) et récentes comme sa Morgane, pour montrer une autre facette plus noire, plus agressive de ces corps glorieux qui servent aussi ceux qui les manipulent. « Les gens ont besoin de mythes, conclut-il, et ceux qui s’approprient et manipulent le mythe, cherchent à s’en approprier la force et l’impact sur le public. » Une manipulation ayant existé de tout temps mais que l’on peut aujourd’hui décoder grâce au travail superbe et profond d’artistes tels que Jacques Charlier et Sophie Langhor.

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Valerie Sonnier, Distant proximity, Eric Clemens

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier,
sans titre, 2006
crayon et cire sur papier
27,5 x 26 cm

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier
Sans titre, 2006
crayon et cire sur papier
27 x 25,5 cm

Ce 14.05.2014 à 19:00

Soirée rencontre autour de l’exposition Distant Proximity avec le philosophe Eric CLEMENS et les artistes, Peter BUGGENHOUT, Michel MAZZONI et WILMES & MASCAUX.
Une occasion unique de voir ou revoir l’exposition à travers un dialogue avec des artistes et un philosophe autour de l’art et du regard.
« Nous avons l’art pour ne pas mourir de la vérité ». Cette phrase attirante de NIETZSCHE, que peut-elle bien nous promettre ? Que l’art peut encore être une expérience, une chance de découverte… Et d’abord que l’artiste fait cette expérience ! Mais laquelle exactement ?
Extrait du texte d’Eric CLEMENS dans le cahier Distant Proximity.

Né en 1945, à Bruxelles, Eric Clémens poursuit une double activité fictionnelle, de poésie et de philosophie, marquée par l’interrogation et la passion du langage. Ou plutôt, du geste à la couleur en passant par les notes ou les nombres, des langages, car tous – et singulièrement le langage verbal – constituent pour lui l’espace-temps où notre liberté et notre égalité peuvent se risquer dans leur plus grande intensité génératrice. La fiction, mieux : le fictionnel (distinct du fictif qui se situe dans l’imaginaire) est ce creuset humain où les langages façonnent notre relation au réel pour former notre monde.
Avec Christian Prigent et Jean-Pierre Verheggen, il a participé à l’aventure, d’écriture et de performance orale, courue pendant plus de 20 ans par la revue TXT. Dans la foulée de Mai 68, il a subi l’épreuve de vérité du militant révolutionnaire. Il a été conseiller dramaturgique de « L’Infini Théâtre », dirigé par Dominique Seron. Il a donné et donne des cours de philosophie dans diverses universités et institutions de Belgique, de France et du Québec.
ôté philosophique, à partir de la phénoménologie et de la déconstruction, il ne cesse de rechercher l’ouverture pour notre temps des pensées politique ou éthique, poétique ou artistique et physique ou biologique… Il a publié Le même entre démocratie et philosophie (aux éditions Lebeer-Hossmann, coll. Philosophiques, Bruxelles, 1987), La fiction et l’apparaître (aux éditions Albin Michel, coll. Bibliothèque du Collège International de Philosophie, Paris, 1993), Un mot seul n’est jamais juste. Pour une démocratie des alternances (aux éditions Quorum, Louvain-la-Neuve/Gerpinnes, 1998), Façons de voir (aux Presses Universitaires de Vincennes, coll. Esthétique/hors cadre, Paris, 1999), La démocratie en questions, avec Erwin Jans (aux éditions La Lettre volée, Bruxelles, 2010), Les brisures du réel. Essai sur les transformations de l’idée de « nature » (Editions Ousia, Bruxelles, 2010).
l a publié un choix des Ecrits de Magritte avec une postface “Ceci n’est pas un Magritte” (aux éditions Labor, coll. Espace Nord, Bruxelles, 1994) ; de Max Loreau, il a publié une anthologie, De la création avec une postface “Pour introduire à la création” (éd. Labor, coll. Espace Nord, 1998) et son chef-d’oeuvre posthume, Genèses, rassemblé avec Francine Loreau à partir de plans et de fiches (éd. Galilée, Paris, 2000). (Source Bela)

Place Sainte-Catherine 44 Sint-Katelijneplein – Bruxelles 1000 Brussel

Exposition accessible jusqu’au 8 juin 2014

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Sophie Langohr, Glorious Bodies, IKOB, Eupen (2)

Sophie Langohr

The pretty faces of apostles

I think of Ludwig Feuerbach, disciple and critic of Hegel, of this passage which Guy Debord did not hesitate to highlight in his “Société du Spectacle” (Society of the Spectacle) in 1967: “No doubt our time prefers the image to the thing, the copy to the original, representation to reality, appearance to being, writes the philosopher. What is sacred to him, is only illusion, but what is profane, is the truth. Better still, sacredness grows in his eyes as truth decreases and illusion increases, so that the highest degree of illusion comes to be the highest degree of sacredness.” Sophie Langohr has perfectly perceived this dialectic, this dichotomy – and confusion – between illusion and sacredness, even to the point of profanation, I would say, in the full sense of the term: to make the holy and pious image even more profane than it is, to reduce this image, while sublimating it, into an image of desire and happiness than can only be desired without ever attaining it. This glorious body, the body of the Blessed, the resurrection of the flesh, would it be that of the Christian resurrection or of a rampant ageism, a starified ideal, an iconizing paradigm, arty, crowned with both the glory and mystery of creation and transfiguration?

The question arises in the context of the new series of images produced by Sophie Langohr. After having transfigured the muses of fashion in virgins and saints, here she reverses the process and revamps the Fathers of the Church! And this time, it is a homogeneous set of fourteen polychrome sculptures of the 17th century, the happy compromise between a late Gothic and a measured Baroque style, that the artist appropriates. Sophie Langohr uses all the artifices of professional shooting and studio work to transfer all the glory and fame of the models, celebrities and models of today to these saints carved by Jeremias Geisselbrunn in around 1640 for the church of the Miners in Cologne, now standing at the pillars of the church of Saint Nicolas in Eupen. Here are the icons of the Apostles, posing for this unexpected second (of) eternity. The casting is rather curious, to say the least.

Apart from the apostle John who is, of course, the youngest, all these apostles are bearded, wise and in the fullness of life. Sophie Langohr has, in this respect, fashion and trends to thank for: thanks to the hipsters, advertising today is full of bearded and hairy men. Shaggy hair is all the rage. The hipster is actually “trendy”, his look is stylishly neglected, he sports a dishevelled hairstyle; hirsuteness is actually essential, to the point where some get hair implanted at great expense. The hipster is an “early adopter” who buys quickly and turns away even faster, from the moment he finds that what he consumes has become too common. Hipsters are therefore well known to the marketers who sell them what they think they invent. This is a target which advertising presents as an icon of modernity. As a phenomenon of the new century, the hipster is about to be dethroned. The webzines and social networks announce – and orchestrate – the arrival of “Normcore” in the fashion world. The phenomenon, whose name derives from the contraction of the words normal and hard-core, is based on the “non-style”; the aim is to express specialness to the point of sameness. Be crazy, be normal, look like a teenager from the early 90s or, if you are fifty or more, like Steve Jobs himself. This will make the heyday of black turtlenecks and straight-legged and faded blue jeans .

But back to our bearded men of advertising which Sophie Langohr has tracked on the net. The issues are not the same as with the muses of New Faces. Here, there is no question of smoothing the image down to the pixel; everything has to do with the expression, an artificial natural air corrected under the lights of the shoot and during the postproduction of the images. The care of the self, to use the terms dear to Foucault, the ego business, the staging and eroticisation of the appearance, the self esteem, hedonism, tribal fusion, the rational and the passionate: the male icons of advertising must above all be charismatic. These are style icons. This time, Sophie Langohr, confronting the apostles with the icons of fashion, sought similarities, affinities in the traits and attitudes, and photographed the faces of statues as if they were stars and models. The shooting has since taken over the infographical treatment; the artist only gave the pretty faces of these apostles some basic facial care. From that point on, blur, grain and backlight are all that is needed. Advertising has since long understood: “the starting point is absolute blackness, wrote Gérard Blanchard already in 1968 in Les Cahiers de la Publicité about the eroticisation of advertising, because the myths are more or less laced with shreds of night. The artifices of photography, soft focus, lighting and backlight are all ways to give the image an ambiguous air of interpretation. The Amphitrite of advertising is born at night.” The recipe still works.

So here we have St. Peter, as the false fraternal twin of Philip Crangi, a New York jeweller who uses historical quotes, ancient artefacts, Japanese armour, baroque silverware in his urban, punkish and ethnic creations. St. Matthew, the dark introverted one, has only to get a tattoo of a living dead on the shoulder or a Christ-like face crowned with thorns on the arm to fully resemble the Greek model Dimitris Alexandrou. Largely forgotten despite his prestige in the early church, James the minor was the leader of the Church of Jerusalem and wrote one of the apocryphal gospels. In life, we need to be able to bounce back, revive ourselves, says Aiden Shaw, writer and composer turned model after scouring the gay porn studios in Los Angeles, a route that has enabled him to enact the figure of the old dandy whose experiences make for a great face. He apparently enjoys cult status and his latest music video is called « Immortal ». Martin Scorsese has directed St. Paul while shooting the short film for Blue Channel, a veritable turnip by the way. Simon the Zealot and Jeremy Irons will have to choose: all that is needed is a cosmetic surgery on a nasal appendage for the one to pass as the other. Lee Jeffries photographs the faces of the homeless in major cities: his features are a perfect match with those of Saint Andrew. Model Mariano Ontanon has the look of the Latin lover, even if he just grew his beard for Givenchy’s Fall/Winter 2013 campaign. And now he looks like Saint Bartholomew. Among these diptychs, there is one particular exception to the rule of the portrait: Sophie Langohr has appropriated a profile photograph of Thomas Medard, a young singer from Liège, photographed by Gilles Dewalque. From the front he looks like Saint Thomas, you have to see it to believe it.

Sophie Langohr profaner? Yes, in the sense that – without secularising them, quite the contrary – she desacralizes the faces of saints by placing them under the lights of the current media illusions. Yes, since she appropriates their use, abolishing all separations through a subjective photographic practice that is quite opposite to the usual documentary truth when it comes to photographing works of art. Sophie Langohr somehow takes the works of Jeremias Geisselbrunn out of the museum.

By confronting works of the past, distant auratics in the sense understood by Walter Benjamin, with immediate, virtual images, gleaned on the Internet, her works make us aware of the collapse of distance and the intense proximity within which we live. Undoubtedly, the works of art of the past are no longer seen by artists as a repertoire of subjects or models to imitate or rebel against; “they appear under the guise of an “already there”, a familiar environment whose components are just as real and current as any everyday object.” The artist, and this is good, experiences them as material, interacts with them, uses them as tools. Indeed, he rediscovers their use.

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Sophie Langohr, Glorious bodies, IKOB, Eupen

Sophie Langohr

Saint Matthieu par Gérémie Geisselbrunn (1595 – 1660) photographié comme Dimitris Alexandrou par Errikos Andreou, de la série Glorious Bodies, photographies noir et blanc marouflées sur aluminium, 2 x (33 x 45cm), 2013 -2014

DE BELLES GUEULES D’APôTRE

Je repense à Ludwig Feuerbach, disciple et critique de Hegel, à cet extrait que Guy Debord n’hésita pas à placer en exergue de sa « Société du Spectacle » en 1967 : « Et sans doute notre temps préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être, écrit le philosophe. Ce qui est sacré pour lui, ce n’est que l’illusion, mais ce qui est profane, c’est la vérité. Mieux, le sacré grandit à ses yeux à mesure que décroît la vérité et que l’illusion croît, si bien que le comble de l’illusion est aussi le comble du sacré ». Sophie Langohr, a parfaitement perçu cette dialectique, cette dichotomie – et cette confusion – entre illusion et sacré, jusqu’à la profanation, dirais-je, dans le plein sens du terme : rendre l’image sainte et pieuse plus profane encore que ce qu’elle est, réduire cette image, tout en la sublimant, à une image du désir et du bonheur que n’on ne peut que désirer sans jamais l’atteindre. Corps glorieux, corps du Bienheureux et de la Bienheureuse, celui de la résurrection de la chair, serait-ce celui de la résurrection christique ou celui d’un jeunisme effréné, d’un idéal starifié, d’un modèle égériaque, « arty », auréolé de toute la gloire et du mystère de la création comme de la transfiguration ?

La question se pose devant la toute nouvelle série d’images produites par Sophie Langohr. Après avoir transfiguré les égéries de la mode en vierges et saintes, voici qu’elle renverse le processus et relooke les Pères primitifs de l’Eglise ! Et cette fois, il s’agit d’un ensemble homogène de quatorze sculptures polychromes du 17e siècle, heureux compromis entre le gothique tardif et un baroque mesuré que l’artiste s’approprie. Sophie Langohr use de tout l’artifice du shooting et du travail en studio afin d’imposer toute la gloire et la célébrité des mannequins, stars et modèles actuels aux saints sculptés par Gérémie Geisselbrunn vers 1640, destinés à l’église des Mineurs de Cologne et aujourd’hui campés aux piliers de l’église Saint-Nicolas d’Eupen. Voici les icônes des apôtres posant pour cette inattendue seconde (d’)éternité. Le casting est pour le moins singulier. A part l’apôtre Jean, bien sûr, le plus jeune, tous sont barbus, sages et dans la plénitude de la vie. Et Sophie Langohr peut, à ce sujet, rendre grâce à la mode et la tendance : grâce aux hipsters, la publicité est aujourd’hui pleine de barbus et chevelus. Le poil en bataille à la cote. Le hipster est effectivement « tendance ». Son look est faussement négligé, sa coupe de cheveux est déstructurée, le port du poil est indispensable, quitte même à se le faire implanter à grands frais. C’est un « early adopter », qui achète vite et se détourne encore plus vite, dès le moment où il juge que ce qu’il consomme devient trop commun.
Les hipsters sont bien connus des marketeurs qui leur vendent ce qu’ils croient inventer. C’est donc une cible que la publicité présentera comme une icône de la modernité. Phénomène de ce début de siècle, le hipster est en passe de se faire détrôner. Les webzine et réseaux sociaux annoncent – et orchestrent – l’arrivée du « Normcore » dans la sphère fashion. Contraction des mots normal et hardcore, le phénomène se base sur le « non-style », l’objectif étant d’être tellement différent qu’on en devient normal. Soyez fou, soyez normal, vous ressemblerez à un ado du début des années 90 et, pour les quiquas ou plus, à Steve Jobs, soi-même. Cela fera les beaux jours des cols roulés noirs et des jeans bleus, droits et délavés.

Mais revenons-en à nos barbus de la pub que Sophie Langohr a traqué sur le net. Les enjeux ne sont pas les mêmes que pour les égéries des «New Faces ». Ici, il n’est plus question de scruter le lissage de l’image au pixel près ; tout se joue dans l’expression, un faux naturel corrigé sous l’éclairage du shooting et lors de la postproduction des images. Le souci de soi pour reprendre les termes chers à Foucault, l’égo business, la mise en scène et l’érotisation de l’apparence, le self estime, l’hédonisme, la fusion tribale, le rationnel et passionnel : les icônes masculines de la publicité se doivent d’être avant tout charismatiques. Ce sont des icônes du style. Cette fois, Sophie Langohr, confrontant les apôtres et les icônes de la mode a recherché les ressemblances, les affinités dans les traits et les attitudes et a photographié les visages des statues comme s’il s’agissait de stars et mannequins. Le shooting a dès lors pris le dessus sur le traitement infographique ; l’artiste a juste dispensé quelques soins du visage à ces belles gueules d’apôtre. Floutage, grain, contre-jour sont dès lors parfaitement efficients. La publicité l’a compris depuis longtemps : « Il faut partir du noir absolu, écrivait déjà Gérard Blanchard en 1968 dans « Les Cahiers de la Publicité » à propos de l’érotisation de la publicité, car les mythes sont plus ou moins entremêlés de lambeaux nocturnes. Les artifices de la photographie, le flou artistique, l’éclairage en faisceau, le contre-jour sont autant de manière de donner à l’image une marque équivoque d’interprétation. L’Amphitrite publicitaire nait la nuit ». La recette fonctionne toujours.

Voilà donc saint Pierre faux jumeau de Philip Crangi, un orfèvre new-yorkais qui use de la citation historique – artefacts antiques, armures japonaises, orfèvrerie baroque –, dans ses créations urbaines, punk et ethniques. Saint Matthieu, l’introverti ténébreux, n’a plus qu’à se faire tatouer une morte vivante sur l’épaule ou un visage christique couronné d’épines sur le bras pour s’identifier totalement au mannequin grec Dimitris Alexandrou. Grand oublié malgré son prestige dans l’Eglise primitive, Jacques le Mineur fut chef de file de l’Eglise de Jérusalem et écrivit l’un des évangiles apocryphes. Dans la vie, il faut pouvoir rebondir, renaître de soi-même, tel Aiden Shaw, écrivain, compositeur, reconverti dans le mannequinat, après avoir écumé les studios de porno gay à Los Angeles, un itinéraire qui lui permet aujourd’hui de camper la figure de l’old dandydont le vécu vaut la tête bien faite. Il est culte paraît-il et son dernier clip s’appelle « Immortal». Martin Scorsese a dirigé saint Paul lors du tournage du court-métrage pour Bleu de Chanel, un navet soit dit en passant. Simonle Zélote et Jérémie Irons devront choisir : il ne manque qu’une opération de chirurgie esthétique de l’un ou l’autre appendice nasal, pour que l’un puisse se faire passer pour l’autre. Lee Jeffries photographie les visages des sans domicile fixe des grandes villes : le mimétisme est parfait avec le visage de saint André. La mannequin Mariano Ontanon a le look du latin lover, mais c’est juste pour la campagne automne/hiver 2013 de Givenchy qu’il s’est laissé pousser la barbe. Ainsi ressemble- t-il à saint Barthélémy.

Parmi ces diptyques, l’un déroge de façon singulière à la règle du portrait : Sophie Langohr s’est approprié une photographie de profil de Thomas Médard, ce jeune chanteur liégeois, photographié par Gilles Dewalque. De face, c’est saint Thomas qui apparaît, il faut le voir pour le croire. Sophie Langohr serait-elle profanatrice ? Oui, dans le sens où, sans les séculariser, bien au contraire, elle désacralise ces visages de saints, les plaçant sous les feux des actuelles illusions médiatiques. Oui, puisqu’elle s’en octroie l’usage, abolissant toutes les séparations par la mise en oeuvre d’une pratique photographique subjective opposée à la vérité documentaire usuelle lorsqu’il s’agit de photographier des oeuvres d’art. Sophie Langohr « démuséalise », en quelque sorte, les oeuvres de Gérémie Geisselbrunn. Confrontant des oeuvres du passé, lointaines auratiques, au sens où Walter Benjamin l’entend et des images immédiates, virtuelles, glanées sur internet, ses travaux nous font prendre conscience de cet effondrement de la distance et de l’intense proximité dans laquelle nous vivons. Sans aucun doute l’oeuvre d’art du passé n’est plus aujourd’hui perçue par les artistes comme un répertoire de sujets ou de modèles à imiter ou à combattre ; « elle apparaît sous les traits d’un ‘déjà-là’, d’un environnement familier dont les composantes s’avèrent tout aussi réelles et actuelles que tout objet du quotidien ». L’artiste, et c’est tant mieux, les éprouvent comme matérielles. Il dialogue avec elles, il les utilisent comme outils. En fait, il en retrouve l’usage.

Sophie Langohr

Saint André par Gérémie Geisselbrunn (1595 – 1660) photographié comme un sans abri par Lee Jeffries, de la série Glorious Bodies, photographies noir et blanc marouflées sur aluminium, (33 x 33) et (33 x 31cm), 2013 -2014.

Saint Jacques le mineur par Gérémie Geisselbrunn (1595 – 1660) photographié comme Aiden Shaw par Kalle Gustafsson pour Uniforms for the dedicated , de la série Glorious Bodies, photographies noir et blanc marouflées sur aluminium, 2 x (80 x 53 cm), 2013 -2014.

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Suchan Kinoshita (et alii), Tokonoma, Ludlow 38, Goethe Institut New-York

Tokonoma

Tokonoma I, 2012, détail

MINI/Goethe-Institut Curatorial Residencies Ludlow 38 is pleased to present the exhibition Tokonoma with Olivier Foulon, Joerg Franzbecker, Kris Kimpe, Suchan Kinoshita, Aglaia Konrad, Willem Oorebeek, Eran Schaerf, and Walter Swennen.

A tokonoma is a built-in recessed space in a traditional Japanese room in which items are displayed for artistic appreciation. Derived from the concept of the personal Buddhist altar, it has become a standard domestic feature with a decorative purpose. One only enters this space in order to change the display following a strict etiquette. Toko literally means « raised floor » or « bed », while ma describes the gap, space, or pause between two structural parts. A tokonoma is not created by compositional elements, but rather refers to one’s consciousness of place and awareness of form and non-form. It creates an experiential space emphasizing the interval, the in-between.

Suchan Kinoshita has been using her ongoing, continuously changing series Tokonoma to open similar in-between spaces of thought between the practices of different collaborators since 2012. Tokonoma functions as an open score to be performed by and negotiated with invited interpreters. The only preconditions of the Tokonoma are a set of fragile architectural elements, composed of a diagonal line that is supported by vertical planes. Together, these form an open structure of intervals to be punctuated by works chosen by the respective contributors. This installational setting facilitates a negotiation of the given conditions and positions, while challenging the status and manifestations of artistic media via various transitions: from sculpture to installation, to gesture, to presence and participation. Tokonoma thus opens a microcosm of inquiry into who, where, how, and what is being negotiated while on view—a microcosm for the investigation of how to confront the various realities and materialities of artwork, how to compose its different aspects, and finally of how to present individual works without granting one more importance than the other.

Tokonoma operates as an archive as well as an exhibition, bringing together varying working methods, processes, and works. Beside the notion of collaboration, it allows an approach towards performativity and the timeline of a show beyond singular events. Influenced by her study of musical composition, Suchan Kinoshita has been concerned with the possibilities of integrating time as a structural part of a total entity throughout her career. In relation to other artistic strategies and interpreters, she uses Tokonoma to destabilize claims for completeness via a structural embrace of transformation and change within the course of the presentation.

For Tokonoma at Ludlow 38 in New York, Suchan Kinoshita, Olivier Foulon, Joerg Franzbecker, Kris Kimpe, Aglaia Konrad, Willem Oorebeek, Eran Schaerf, and Walter Swennen—all of whom have collaborated in different constellations in recent years—come together during the month of May to enter a visual and spatial dialogue within a new interpretation of Tokonoma for a second time.

Tokonoma with Olivier Foulon, Joerg Franzbecker, Kris Kimpe, Suchan Kinoshita, Aglaia Konrad, Willem Oorebeek, Eran Schaerf, and Walter Swennen

Opening: Sunday, May 11, 6:00pm
Exhibition
05/12/14 – 06/14/14
MINI/Goethe-Institut Curatorial Residencies Ludlow 38
38 Ludlow Street
New York, NY 10002

MINI/Goethe-Institut Curatorial Residencies Ludlow 38 is the Goethe-Institut New York’s contemporary art space, made possible with the generous support of MINI. Located on Manhattan’s Lower East Side, it has provided for curatorial experimentation in the tradition of the German Kunstverein since 2008. Its mission is to introduce new international perspectives to the downtown art community and to foster dialogue within the greater aesthetic and political context of New York and the United States. In the last three years, the trajectory of exhibitions has been determined by annually rotating curatorial residents from Germany, who bring their own unique perspectives to the art space. Ludlow 38 was initially programmed by a different German Kunstverein each year: Kunstverein München in 2008, followed by the European Kunsthalle Cologne and Künstlerhaus Stuttgart. In 2011, a residency program for young curators from Germany was launched in partnership with MINI. Since then, exhibitions and events have been organized by curatorial residents Tobi Maier (2011), Clara Meister (2012), Jakob Schillinger (2013), and Eva Birkenstock (2014) respectively.

Eva Birkenstock is the 2014 MINI/Goethe-Institut Curatorial Resident at Ludlow 38. Since 2010, she has been Curator of the KUB Arena at Kunsthaus Bregenz, Austria. Previously, she was the Artistic Co-Director of the Halle für Kunst, Lüneburg, Germany. Together with Galit Eilat and Eyal Danon she initiated the Mobile Archive, a growing video archive that has been touring the world since 2007. She has curated and co-curated exhibitions with artists including Yona Friedman, Dani Gal, Dora Garcia, Nick Mauss, Katrin Mayer, Ulrike Müller, Emma Hedditch, Falke Pisano, Tris Vonna-Michell and Ian White. Notable group projects include On Performance, 2010 (curated with Joerg Franzbecker); Nairobi – A State of Mind, 2012; and Beginning Good. All Good. – Actualizations of the Futurist Opera ‘Victory Over the Sun’, 2011 (with Kerstin Stakemeier & Nina Koeller). She most recently co-edited Art and the Critique of Ideology After 1989 and On Performance (2012), both for Kunsthaus Bregenz, as well as the artist books Tris Vonna-Michell (JRP|Ringier, 2011) and Dani Gal – Chanting Down Babylon (Argo, 2009). Birkenstock holds an MA in Art History and Cultural Anthropology from the Freie Universität Berlin

 

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Marie Zolamian, Ecouter les yeux au jardin botanique, biennale de Dakar 2014

Marie Zolamian

Marie Zolamian participe à Dak’Art, 11e biennale de l’art africain contemporain de Dakar. Elle intervient au jardin botanique des plantes expérimentales utiles (JEPU) de la faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie (FMPO) de l’UCAD et y propose une oeuvre sonore, visite guidée de ce jardin médicinal en compagnie de guérisseurs et de tradipatriciens. « Dans le secteur des plantes utiles et des plantes médicinales, le visiteur, muni d’une carte et d’un lecteur mp3, explique Marie Zolamian, déambule parmi les espèces qui servent à soulager les maux. Certaines plantes, identifiées, numérotées sur la carte, racontent leurs vies intérieures à travers une plage sonore correspondante sur le lecteur mp3. Chaque plage sonore porte la voix et la connaissance d’un guérisseur ou tradipraticien que j’ai rencontré durant mon séjour à Dakar. Le visiteur prend alors le temps, en observant la plante, d’écouter ses paroles. Je suis sensible à ce qui se passe autour de moi, à ce qui m’environne, au quotidien, et comment ceux qui m’entourent vivent et occupent leur patrimoine environnant. Chaque fois que j’en ai l’opportunité, je tente de sonder le lieu où j’arrive et certains de ses occupants. J’écoute les récits, tantôt entre fiction et réalité, tantôt sur le fil de l’anecdote, tantôt chargés de sens imperceptibles, pour ensuite les partager. À Dak’Art, saisie par l’opportunité de travailler dans les jardins botaniques, et plus spécifiquement dans un patrimoine végétal, le secteur des plantes médicinales (2/3 de ces espèces recensées de nos jours vivent dans les pays tropicaux d’Afrique et d’ailleurs), j’ai plongé naturellement dans la médecine traditionnelle et l’envie de faire parler ces plantes divines à travers leurs meilleurs alliés, les maîtres guérisseurs et les tradipraticiens. À une époque où la médecine occidentale se remet elle-même en question sur bien des points (médicaments chimiques peu compatibles avec un corps vivant et producteurs de pollution environnementale, augmentation en flèche des maladies dues à cette pollution, résistance aux antibiotiques, effets secondaires fréquents, coût élevé de nombreux traitements, etc.) et où bien des personnes, en Europe ou aux États-Unis, se tournent vers les médecines dites parallèles ou alternatives, cette visite sonore ravive l’importance des espèces médicinales disparues et en voie de disparition ».

Le communiqué de presse :

Cette année, la biennale d’art contemporain africain, sera marquée par une grande innovation consistant à investir le campus de l’UCAD avec le projet « ART-VERT ». Celui-ci vise à sensibiliser le public estudiantin sur les enjeux de la préservation de l’environnement à travers des ateliers de créations artistiques autour du triptyque : Esthétique-Environnement- Développement Durable. « ART-VERT » aura pour cadre le jardin botanique des plantes expérimentales utiles (JEPU) de la faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie (FMPO) de l’UCAD. Ce jardin d’une superficie de 2,9 hectares, est niché derrière le Pavillon de la Pharmacie. C’est un des rares sites de verdure naturelle à Dakar dédié essentiellement à l’expérimentation de la conservation des plantes médicinales dont certaines sont menacées.
Des artistes plasticiens d’horizons divers, dont la démarche artistique repose sur l’éthique environnementale prendront part à ce projet. Ils seront assistés, dans la réalisation de leurs oeuvres, par des étudiants qui se chargeront de recycler et de récupérer des débris de matière végétale trouvée dans le JEPU.

Les artistes :
 Serigne Mbaye Camara
 Cheikh Diouf
 François Méchain
 Barthélémy Toguo
 Nils-Udo
 Bob Verschueren
 Marie Zolamian

En écho à cette activité des plasticiens ci-dessus nommés, des stylistes choisis pour leur souci reconnu de l’éthique environnementale répondront par une « parade verte ». Comme les plasticiens, les stylistes se sont comportés de façon éco-responsables en confectionnant des costumes réalisés à 80% avec de la matière naturelle.
Médiatrice du projet : Ndeye Rokhaya Gueye.
Lieu : Jardin Botanique, Faculté de Médecine, Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Du 9 mai au 8 juin.

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Jacques Charlier, Glorious Bodies, Ikob Eupen, St Rita pray for Art (2)

Jacques Charlier

Jacques Charlier has also, for a long time, investigated this artificial ideal of transubstantiation, observer of the theologies of art, of the redeeming art object, of its appropriation by the market, capable, he says, to transform the slightest air current in a transfigured object, under the strategist eye of a global Curie.
The art scene is like a temple. It has its priests, preachers, Pharisees and publicans and a growing crowd of followers. “The churches and cathedrals have emptied while museums were erected, says Charlier. These legitimize the realities of the market, accumulate the consumer goods which collectors, in turn, take ownership of. As an extraordinary act of faith, the slightest breeze can, in this way, attain the status of transubstantiation, be resurrected, saved from Apocalypse. In addition, our concept of death has changed: we now need to construct in real time. This resurrection of the body, of the glorified bodies of Christianity, is a race toward youth. And the Eucharist, the Christian body, is the art object, a redemptive object. » In his hilarious “Lettre à un amateur d’art d’actuel” (Letter to a contemporary art lover), a list of recommendations to a future fifty-year-old collector, a very lucid text and hardly parodical, Jacques Charlier persists: the association with art and its acquisition, provided that the rules are applied, is a guarantee for an escape from “botox, alcohol, hair implants and other warning signs of premature senility. »

Jacques Charlier is, like Sophie Langohr, also interested in Saint-Sulpician art or its popular corollaries, and in particular in St. Rita, of whom he has collected all kinds of testimony. It is known that Francis Alÿs collects St. Fabiola, the patron saint of battered women and nurses, widows, the abused, the deceived and the divorced. Alÿs set out on a tenacious quest and collected hundreds of copies of a single portrait of the Saint, a lost work, painted by Jean-Jacques Henner, the last of the Romantics. For Jacques Charlier, it is Saint Rita, the advocate of hopeless causes, who captures his attention. Much like Yves Klein, by the way, who went to Cascia in 1961 to donate an ex-voto dedicated to the Saint to the monastery, a small Plexiglas box containing pure pigments, gold leaf and three small ingots of this precious metal: “the blue, the gold, the pink, the intangible,” writes Yves Klein on a piece of paper slipped into the ex-voto. He was undoubtedly fascinated by the miraculous power that comes with the intangible qualities of emptiness. Jacques Charlier, for his part, preferred to invoke the queen of lost causes and disappointed hopes, the saint of impossible and disillusioned dreams. He invokes her in his “Prière des Désespérés” (Prayer of the Desperate): “Saint of the humiliated, he writes, of those without status, of the incurables, the rejects, prostitutes, artists and imprisoned, who else but you to hear our distress?”. So Rita of Cascia – her name resounds like that of a star – becomes patron of the humble, the poor, the homeless, the transsexuals, the unemployed soon without benefits and all the other desperates. Without doubt, it is the media image of Rita that attracted Jacques Charlier. Just think that, at birth, a swarm of white bees swirled around the cradle of Rita, putting honey in her mouth. The population of Cascia has reported many signs and inexplicable wonders since her death in 1457. Rome beatified her in 1627, at which time Cardinal Fausto Poli initiated an exemplary media campaign. Pope Leo XIII canonized her in 1900. Today, the Saint has her own Facebook page, her own official websites, her unofficial sites and, of course, her online business. Barely a year ago, the French newspaper La Voix du Nord ran a headline on the pilgrimage to Vendeville where, since 1923, she is credited with a healing miracle: “With the crisis, every day 300 people come to pray to St. Rita in Vendeville. » Sign of the times.

The Saint first appears in Jacques Charlier’s work in 1991. He places a large polychrome plaster statue of Rita of Cascia on a base. In lavish Sulpician style, she holds a rose in one hand, a bunch of grapes in the other. It is the rose that bloomed in the middle of winter upon her death and the grapes of a dead vine she patiently watered until it eventually bore fruit, because, for Rita, nothing is impossible. The backdrop of this theatre of objects is celestial and crepuscular; words here swarm like gleams of light: certitude, appeasement, quietude, forgiveness, healing, grace, calm.
Among them, the three letters of the word Art. The artist adds, moreover, a third attribute to the Saint: an easel. Disenchantment with art, the instrumentalisation of its history and the market: Charlier stakes everything on the intervention of the holy miracle-worker.
A second petition, in 1993, allows him to be even more explicit: he creates an installation with a canvas depicting a dark immensity, a cup of grapes, a whip for self-mortification and a statue of the saint. This time, like a dedicator, he supports his plea: “St. Rita, pray for art.” Finally, this year, on the occasion of « Kontakt 93 », he presents a monumental Rita in the park of Eupen. The polychrome plaster statue comes directly from Cascia in Umbria. It is set on an impressive pedestal. In her hands, St. Rita holds a crucifix, a reminder of the stigma of the thorn in her forehead.
In Cascia, the body of the Saint rests in a shrine made of glass and silver. In 1682, according to tradition, her incorruptible body apparently lifted to touch the top of the shrine. Jacques Charlier puts the Saint upright again. In this way, she extends her blessings to the park, standing in a vertical casket. And every night, the unemployed youth of the neighbourhood come to drink cans of beer at her feet.

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