Archives de catégorie : Des expositions d’ailleurs / exhibitions artists

Jacques Charlier, Jacques Lizène, Walter Swennen, The Importance of being, museo de Arte contemporaneo, Buenos Aires

Jacques Charlier

Jacques Charlier, 100 Sexes d’artistes, musée des Beaux-Arts de La Havane (Cuba)

Jacques Charlier, Jacques Lizène et Walter Swennen participent à l’exposition « The importance of being », un panorama de l’art contemporain en Belgique au travers des oeuvres de quarante artistes, une exposition conçue par la curatrice Sarah Alonso Gomez, successivement accueillie par les musées de La Havane, de Buenos Aires, de Rio de Janeiro et de Sao Paulo. Deuxième étape au Museo de Arte Contemporáneo, Buenos Aires, Argentina, du 4 juillet au 12 septembre.

Gathering 40 international artists, the exhibition “The Importance of Being …” will travel to 4 important museums in Latin America along one year and a half, offering a vast panorama of the contemporary art scene in Belgium, without intending to encompass thoroughly. Plural discourses and transversal approaches through a wide range of artistic supports make possible to highlight nowadays crucial problematics worldwide in order to think on possible connections with other latitudes while mapping similarities and differences.

The goal has been to go beyond the notion of Belgium. It is a departure point as laboratory/platform with specific but also global cultural dynamics and geopolitical approaches, in the center of Europe on the decision-making and towards the rest of the world. In this sense, subjects related to power and memory, to the binomial identity-alterity, conflicts and borders, human relations with both the technosphere and biosphere in the context of the globalization are developed on the exhibition. In this sense, the exhibition proposes 5 conceptual trends establishing a strong thread between the selected artworks.

In parallel to the show, a program of performances, workshops with local art schools, conferences and panels of discussion will take place along the exhibition. The first venue will be Museo Nacional de Bellas Artes in Havana as from February 13th this year.

Artists: Marcel Broodthaers, Chantal Akerman, Francis Alÿs, Charif Benhelima, Guillaume Bijl, Michaël Borremans, Dirk Braeckman, Jacques Charlier, David Claerbout, Leo Copers, Patrick Corillon, Cel Crabeels, Berlinde De Bruyckere, Jan De Cock, Peter de Cupere, Carl De Keyzer, Raoul De Keyser, Edith Dekyndt, Wim Delvoye, Fred Eerdekens, Jan Fabre, Michel François, Kendell Geers, Johan Grimonprez, Ann Veronica Janssens, Marie-Jo Lafontaine, Jacques Lizène, Kris Martin, Hans Op de Beeck, Walter Swennen, Pascale Marthine Tayou, Ana Torfs, Joëlle Tuerlinckx, Philippe Vandenberg, Koen van den Broek, Anne-Mie Van Kerckhoven, Koen Vanmechelen, Lieve Van Stappen, Bruno Vekemans, Angel Vergara Santiago.

Curator: Sara Alonso Gómez
Director: Bruno Devos

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Jacques Lizène, Constructeurs d’absurde, bricoleurs d’utopie, Abbaye Saint-André, Meymac

Jacques Lizène participe à l’exposition « Constructeurs d’absurde, bricoleurs d’utopie », à l’Abbaye Saint-André – Centre d’Art contemporain à Meymac. Du 12 juillet au 1er novembre.

Jacques Lizène

Jacques Lizène
Sculpture nulle 1980, sculpture génétique 1971, sculpture génétique cultuelle 2009, en remake 2010-2011. Plâtre peint, 88 x 20 x 20 et 80 x 20 x 20 cm

Jacques Lizène

Jacques Lizène
Art syncrétique 1964, sculpture génétique culturelle et cultuelle 1984 – 2010, en remake 2011. Vierge croisée Vénus croisé masque africain. Technique mixte, 147 x 25 x 25 cm

Malgré la progression des outils numériques, l’artiste plasticien reste un artisan (c’est-à-dire un empirique, quelqu’un qui façonne) plutôt qu’un ingénieur. Il exprime ce qui ne peut être dit ou montré avec les moyens ordinaires, à partir de ce qui est ou de ce que les gens croient ou imaginent être, craignent ou souhaitent qu’il soit. Sa fonction est aussi bien critique qu’anticipatrice. Son geste décide autant qu’il ne se pense. Avec cette constante, que sa proposition paraît formellement, toujours un peu décalée, à cause des écarts d’expression, même lorsqu’il s’agit d’aborder l’exception. Les hommes rêvent d’une prégnance magique (ou scientifique) sur le monde, souhaitant toujours autre chose que ce qui est, parfois l’impossible. Face à eux, le monde, confronté à leurs désirs, à la recherche du plaisir, apparaît le plus souvent opaque. De cette opacité nait le sentiment d’absurde, expression d’un désir imprécis, excessif et certainement contrarié. L’artiste pratiquant le constat subjectif et la projection dans l’imaginaire, à la fois nombriliste et par construction distanciée, révèle la faille, débusque les contradictions, les dit, les montre, les met en crise en exacerbant sur un mode ludique ou grave, ce qu’elles dissimulent de non-dits ou recèlent de fantasmes.

Dans les siècles antérieurs, nombre d’artistes, savants eux-mêmes ou perçus comme tels (à la mesure du savoir de l’époque), parce qu’ils maîtrisaient le trait; travaillaient avec les architectes, les urbanistes et les ingénieurs, à la conception des monuments et des villes. Ils en dessinaient les formes ou imaginaient des machineries distrayantes, mettant en scène le merveilleux au service des pouvoirs, dans une vision prospective ou simplement amusante, mais jouant avec le surnaturel. Aujourd’hui certains, en plus de leurs propres réflexions sur le monde, travaillent avec des sociologues, des architectes, des physiciens, des informaticiens. Pour questionner et, peut-être, distraire par une pédagogie paradoxale, ils poussent les tendances (sociales, techniques ou scientifiques) vers des extrémités révélatrices, proches d’une réalisation fantasmatique ou paraissant absurde. Ils imaginent des contre espaces qui n’ont d’assise que l’imaginaire.

L’artiste, lorsqu’il se veut bricoleur d’univers ou constructeur d’absurde, mène une aventure à la fois intellectuelle, émotionnelle et physique qui le conduit vers des frontières à risques, des zones prospectives aux limites incertaines. Des zones à contrepied, souvent dérangeantes, qui mettent en cause des habitudes de regard, des stabilités de savoir sur lesquelles vogue ordinairement le monde.
Rappel : L’absurde est à l’intersection du signifiant et du signifié par un écart destructeur. L’utopie est au départ la volonté de construction d’une société idéale, qui ignorante de ses propres racines, relève en fait de l’imagination et du rêve. L’exposition rassemblera les travaux d’une vingtaine d’artistes bricolant des utopies sociales ou scientifiques, construisant des machineries qui tournent et se retournent sur elle-même, bidouillant des rêves de société idéale ou leurs cauchemars.

Commissariat : Caroline Bissière & Jean-Paul Blanchet, avec Eglantine Bélêtre.

Les artistes
Glen Baxter, Berdaguer & Péjus, Julien Berthier, Simon Boudvin, Alain Bublex, Robbie Cornelissen, David Coste, Nicolas Darrot, Dejode & Lacombe, Wim Delvoye, Eric Duyckaerts, Du Zhenjun, Cao Fei, Jean-François Fourtou, Yona Friedman, Aurélien Froment, Fabrice Gallis, Zacharie Gaudrillot-Roy, Paul Granjon, Thomas Huber, John Isaacs, Rémy Jacquier, Theo Jansen, Kirsten Johannsen, Filip Jonker, Ilya & Emilia Kabakov, Jan Kopp, Martin Le Chevallier, Jacques Lizène, Arnold Odermatt, Taiyo Onorato & Nico Krebs, Panamarenko, Robert et Shana ParkeHarrison, Philippe Ramette, Franck Scurti, Roman Signer, Laurent Tixador, Winshluss, Kacey Wong, Erwin Wurm.

Le Centre d’art contemporain est une association loi 1901. Sa mission est de promouvoir et de diffuser la création contemporaine, principalement dans le domaine des arts plastiques. Il est installé, depuis 1979, dans l’aile sud et la tour de l’Abbaye Saint-André, au coeur du centre historique de Meymac en Corrèze. Le bâtiment réaménagé est adapté à la présentation de la création contemporaine. Les espaces sont modulables et se transforment en fonction des nécessités imposées par les expositions. Le Centre d’art contemporain développe un programme faisant place autant aux artistes émergents qu’aux artistes de notoriété internationale, en alternant expositions thématiques et monographiques.

Abbaye Saint André – Centre d’art contemporain
Place du bûcher
19250 Meymac

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Benjamin Monti, Marie Zolamian, Le Bourgmestre de Furnes, Emergent, Furnes

Benjamin Monti et Marie Zolamian participent à l’exposition Le Bourgmestre de Furnes à la galerie associative Emergent à Furnes. Du 9 juillet au 20 septembre.

Benjamin Monti

Benjamin Monti
Sans titre
Encre de chine sur cartes perforées de la « Courage Organisation SA », 21 x 14,7 cm, 2010-2015

Benjamin Monti

Benjamin Monti
Sans titre
Encre de chine sur dessin trouvé, 22,7 x 14,5 cm, 2010-2015

A l’occasion du 25e anniversaire de la mort de Georges Simenon et d’une nouvelle traduction néerlandaise du roman « Le Bourgmestre de Furnes », paru en 1939, Emergent, galerie et association sise… à Furnes a invité deux curatrices, Anne Françoise Lesuisse et Nina Folkersma à sélectionner une série d’œuvres et d’artistes autour des thématiques abordées par le roman. Dans la très ancienne ville de Furnes, en Flandre-Occidentale, tiraillée entre le progrès venu d’Amérique et les souvenirs du Moyen Âge, le bourgmestre s’impose par son autorité, sa rigidité. C’est un personnage sûr de lui que le doute n’effleure pas. Pourtant un jour, le  » Baas  » (le maître, le patron), comme on l’appelle, se dépouille de sa carapace sociale pour connaître la passion et la déchéance. Roman à dominance psychologique que d’aucuns ont inscrit dans une suite d’œuvres où Georges Simenon aborde le spectre de la déviance, celle-ci est celle d’un individu qui refuse de continuer à remplir les fonctions que lui assigne la société au risque de la perte de soi. Portrait saisissant – un des meilleurs romans de Simenon selon Gaston Gallimard lui-même, Le Bourgmestre de Furnes est également une singulière vue de Flandres. Furnes, assurément est une ville simenonienne.

Marie Zolamian

Marie Zolamian
Dormition, 2011.
Acrylique sur toile, 27.4 x 21.8 cm.

Marie Zolamian

Marie Zolamian
Dormition, 2011.
Acrylique sur toile, 29 x 27,5 cm

Avec : Eylem Aladogan, Thorsten Brinkmann Dirk Braeckman, Tom Callemin, Michael Dans, Pierre Gérard, Paul Kooiker, Lucas Lenglet, Benjamin Monti, Sébastien Plevoets, Arjan van Helmond Ina van Zyl, Anne Wenzel et Marie Zolamian

vernissage le dimanche 5 juillet
10h30 Inauguration par… le bourgmestre de Furnes
Entrée libre de 11h à 13h.
15h Après-midi littéraire : Anna Luyten, Rokus Hofstede, Jacques Dubois, Michiel Hendryckx, François Beukelaers, Nina Folkersma & Anne-Françoise Lesuisse.
19h Projection du film Le Bourgmestre de Furnes, BRT (1984) Régie: Dré Poppe, avec entre autres: Ward de Ravet, Dora van der Groen, Ingrid De Vos.

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Jacques Charlier, Canalisations souterraines, Musée d’Ixelles

Jacques Charlier

Canalisations souterraines, une caricature des dernières tendances paysagistes. 1969, Installation vidéo. Film performance de Jacques Charlier filmé en septembre 1969 sur le terril de Saint-Gilles à Liège. Caméra : Nicole Forsbach. Sonorisation : Jacques Charlier. Couleurs. 13.20 min. Suite de coupures de presse prélevées dans des revues de travaux publics parvenant au Service Technique Provincial de la Province de Liège, projetées en diapositives. Accompagnée d’un certificat signé et daté Jacques Charlier, 1968.

Jacques Charlie est dessinateur expéditionnaire au Service Technique Provincial de la Province de Liège. Quotidiennement, il trace des canalisations, des profils de route, normalise des cours d’eau, dessine l’implantation de zonings industriels et introduit ces réalités professionnelles dans le champ de l’art contemporain, les dédiant, avec une étrange lucidité, aux amateurs de minimalisme, d’art pauvre ou de land art. Rares sont ceux qui comprendront qu’il s’agit d’une réponse très radicale et conceptuelle aux discours des Nouveaux Réalistes, aux artistes Pops qui, les uns et les autres, introduisent dans l’art des réalités sociales, urbaines, publicitaires, médiatiques. Charlier introduit dans le champ de l’art ses réalités professionnelles, et celles-ci concernent, entre autres, le fait de recomposer le paysage en fonction même de la nature des travaux publics. Il se crée ainsi une fiction personnelle, il prend ses distances par rapport aux discours théoriques en pratiquant un humour piquant, il les assimile avec une surprenante acuité. C’est en fait une forme vécue, un activisme qu’il pratique, dit-il, sans exaltation. En 1969, l’artiste gravit le terril de Saint Gilles aux abords de Liège, armé d’une pelle et d’une pioche, accompagné par la photographe et cinéaste Nicole Forsbach. Au sommet, à grands coups de pioche, il saigne cette colline résiduelle, creuse une tranchée, y dépose un linceul et tel un Sisyphe moderne, rebouche le trou, ensevelit ainsi cette « terre démobilisée ». La performance est filmée avec pour seuls témoins de hasard deux gosses endimanchés. Certes, on pourrait lire cette performance comme une caricature, une sorte de «land art parodique et de proximité » alors que Robert Smithson s’apprête à investir le Grand Lac Salé, excusez nous du peu; mais ce serait trop court. Lorsqu’il redescend du terril, Charlier accompagne son film d’une création sonore proche d’une musique minimale et industrielle et, surtout, décide de projeter par-dessus des diapositives de canalisations, de celles que le Service Technique Provincial installe sous les paysages de la région. Et il écrit à leur propos : «Leur caractère énigmatique peut non seulement rivaliser avec certaines recherches plastiques contemporaines, mais aussi les dépasser par leur monumentale capacité d’expression. Mais cela, personne ne le dira jamais, ou peut-être trop tard. Ainsi en est-il de l’art d’aujourd’hui qui détourne à son profit, sous l’alibi d’une création ésotérique, la réalité du travail, insupportable pour la minorité culturelle dominante» .

Jacques Charlier présentera ce film, à Liège, en 1970, lors d’une exposition qu’il intitule «Zone Absolue» . Celle-ci est une satire du tout béton, de l’urbanisation galopante, une œuvre nourrie par la littérature situationniste et anarchiste en vogue fin des années 60, une proposition délirante de résoudre de la façon la plus sauvage et radicale la problématique de l’habitat et de la circulation dans les villes. A titre monumental, expérimental et pédagogique, Jacques Charlier projette d’installer, dans l’espace public, côte à côte, une dalle de béton et une zone arable de mêmes dimensions. La première est lisse et minimale comme l’idéal sculptural de Carl André, ce principe d’une simple juxtaposition d’unités standard de plaques industrielles posées au sol les unes à la suite des autres, sans aucune hiérarchie de place ni de volume, ce que Charlier, en bon spécialiste de la voirie nommera non sans humour, une « sculpture horizontale ». La seconde zone est, elle, parfaitement naturelle, collective et anarchique. Charlier veut inviter qui le souhaite à y planter la végétation qu’il veut, un chaos végétal, une biodiversité extrême et incontrôlée, concentrant jusqu’à l’exaspération ce fantasme naturaliste, et nostalgique, véhiculé par tous les tenants du retour à la terre, des hippies les plus illuminés aux Zépétistes les plus effrénés. Remblayons la ville, accélérons l’urbanisation béton ! Laissons au contraire la nature reprendre tous ses droits : l’installation, destinée à se pérenniser, parfaitement dimensionnée, fonctionne comme une structure zygote, un espace d’intention aux propositions de même proportions mais parfaitement antagonistes. Le jalon et le théodolite sont effet des outils critiques. En fait, cette «Zone Absolue» agit aussi comme une réponse à deux œuvres contemporaines de Robert Smithson : «Asphalt Rundow», d’une part, ce déversement d’asphalte pour métaphore entropique le long d’une colline dans la région de Rome, réalisée en 1969 et, d’autre part, «Floating Island to travel around Manhattan », cette barge emplie de rochers, de terre, plantée d’arbres et de végétaux reproduisant le biotope de Central Park qui, quelques mois plus tard, fit lentement le tour de la presqu’île de Manhattan. Elle agit, enfin, comme un monument extrême, critique de tous les extrêmes, au-delà même des discours idéologiques contemporains à sa création. Radicalement, elle ne fut jamais réalisée, réduite à un pur concept, une intention, matérialisée par une simple ligne au sol divisant en deux part identiques l’espace d’un lieu d’exposition. (Jean-Michel Botquin)

Jacques Charlier

Jacques Charlier

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Jacques Charlier, Paysages professionnels du STP au Musée d’Ixelles

Jacques Charlier

(…) Charlier roulerait-il les pratiques conceptuelles et minimales d’avant-garde dans la farine tout en consacrant le Road Art comme nouveauté académique ? Ou tenterait-il de prouver que l’on peut « faire du land Art près de chez soi » ? L’artiste entretient à l’époque les meilleurs rapports qui soient avec l’art international comme avec toute la culture underground, mais il considère l’un comme l’autre avec une distance très critique. L’une de ses pratiques fondamentales consistera, en effet, dès les années 60, à retirer de leur contexte une série de documents professionnels du Service Technique Provincial où il est employé, afin de les distiller dans le champ artistique, de les y « présenter» ; ce sont des documents destinés à l’élaboration de projets d’amélioration de voirie, d’égouttage, de normalisation de cours d’eau, d’implantation de zonings industriels. Et Charlier œuvre dans l’incompréhension la plus totale. À l’époque, rares sont ceux qui comprendront qu’il s’agit d’une réponse très radicale et conceptuelle aux nouveaux réalistes, aux artistes pops qui, les uns et les autres, introduisent dans l’art des réalités sociales, urbaines, publicitaires, médiatiques.(…)

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier

(…)

– Vaste programme que cette Zone Absolue. Il semblerait que cela dépasse de loin le titre d’une œuvre ou d’une exposition, en l’occurrence cette exposition qui se déroule à Liège en janvier 1970.

– Il faudrait en effet resituer les choses dans leur contexte et préciser comment j’en suis arrivé à imaginer tout cela. J’entre, après mon service militaire, au Service Technique de la Province en 1958 comme dessinateur expéditionnaire. En fait, on me confie une série de tâches fort simples : taper des rapports, tirer des plans, me rendre sur le terrain, porter la mire pour faire des relevés topographiques. Il s’agit d’améliorer les routes de la première circonscription du Service Technique Provincial et d’établir de nouveaux zonings industriels. En dehors de mes heures de travail, je réalise des collages d’objets, je peins aussi, des toiles gestuelles. Ma formation en art est complètement autodidacte. En fait, je m’intéresse à l’art moderne depuis mon adolescence. Je me nourris beaucoup de littérature également, principalement de Franz Kafka qui réussit cet étonnant métissage entre son œuvre d’écrivain et sa profession de rédacteur aux Assurances Générales de Prague.

– Un peu votre situation, non ? Ou du moins ce que vous allez faire au S.T.P.?

– Effectivement. Lorsque le Pop Art et le Nouveau Réalisme font irruption chez nous, je me demande comment affirmer notre identité par rapport au dadaïsme revisité de ce rouleau compresseur américain. Comment faire aussi par rapport à Restany et ses Nouveaux Réalistes. J’en parle souvent avec Marcel Broodthaers avec qui je partage cette préoccupation. Où trouver notre place, alors que ces artistes ont déjà conquis Bruxelles et Anvers ? En gros, je considérais que le Pop Art résultait du fait de considérer la publicité comme un objet trouvé et de littéralement la balancer dans le champ artistique en lui conférant quelques modifications esthétiques. C’est là que je me suis dit qu’il pouvait être intéressant de profiter de mon milieu professionnel, cette activité purement alimentaire, et d’en faire un moteur critique par rapport à l’art du Nouveau Réalisme et du Pop. C’est ainsi que je commence à collecter ces petites photographies prises par le Service dans lequel je travaille.

Je me lie d’amitié avec le mécanographe et le photographe que je côtoie souvent puisque des journées entières, je vais tirer des plans à l’ammoniaque, des plans de routes qui mesurent six à sept mètres de long. Je découvre dans les poubelles du service de mécanographie des petites photos de champs de betteraves. Ce sont des photos parfaitement banales destinées à illustrer les rapports du Service. Ce qui me fascine, c’est leur côté brutal et inesthétique. En général, elles sont sans avant-plan ; techniquement, ce sont des clichés de bonne qualité mais sans aucune recherche de mise en page. Quant aux lieux photographiés, ils sont évidemment aux antipodes de la photographie habituelle. Je me trouve face à une réalité qui est tout à fait nouvelle, brutale, et qui pourrait convenir de manière idéale à la réponse imagée que je vais tenter de balancer contre le Pop. Parallèlement, je dessine des projets de routes provinciales, des profils en long et en travers, des projets d’ouvrages d’art que l’on trace avec précision. Et là aussi, je me demande comment introduire ces dessins dans le champ de l’art. (…)

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier

(…)

– Qu’est-ce qu’un dépaysement collectif ?

– Le dépaysement collectif, c’est peut-être une façon de considérer l’art autrement, la situation poétique et sa réalité. C’est dans cette limite-là que je le vois. Même si l’action est poussée à l’extrême, je ne la vois pas comme une sorte de transgression des tabous. Et lorsque je verrai débouler l’école de Vienne et ses bouffeurs de saucisse, les performances actionnistes, je trouverai cela très rigolo, mais sans y croire. Sur le plan théorique, la seule chose qui me semble importante, c’est en 1967, l’exposition BMPT au Musée d’Art moderne à Paris. À la fois, cela me fait rire et c’est très intelligent. C’est d’ailleurs bien dommage qu’on ait mis le côté humoristique de la chose sur le côté. Il y avait là une autre façon de considérer la situation et une réelle charge ironique. En fait, c’est la première fois que je constate un discours aussi radical quant à l’interchangeabilité des pratiques. Et je me rends compte qu’avec un peu d’attention, tout spectateur peut accéder à la signification de ces gestes. En fait, on quittait là le romantisme des Nouveaux Réalistes pour accéder à ce qui était à voir et rien d’autre. C’était une mise en scène spectaculaire, presque outrancière, une bouffée d’air frais assise sur ce « plan théorique à la française » que j’ai toujours trouvé marrant. (…)

Jacques Charlier

Jacques Charlier

Jacques Charlier

(…)

– Il me semblait que le Pop et le Nouveau Réalisme avaient abandonné une part de la réalité qui était peut-être à introduire dans le champ de l’art, la réalité sociale. Warhol se sert des clichés de presse, Rosenquist de la publicité, Rauschenberg reprend les Merzbau de Schwitters et les configure dans le paysage américain. Ce dernier surtout me passionne ; c’est celui dont je me sens le plus proche car il va puiser dans la poésie en restant ouvert à toutes les disciplines. Pour ma part, je décide donc de m’approprier une réalité professionnelle, des objets qui ont été fabriqués par des ouvriers, et de les introduire dans le champ artistique en les signant, en leur conférant le statut d’objet d’art. D’un point de vue idéologique, cela me perturbe. Le fait de prendre une réalité sociale, une réalité de la rue, de l’introduire dans l’art, de la signer, d’en faire donc une oeuvre et par ce fait même un objet de spéculation, c’est en quelque sorte une supercherie et une appropriation quasi-religieuse. Bon nombre d’artistes en feront leur cheval de Troie, et l’on pourrait presque dire que c’est devenu l’art pompier du siècle. Je m’en rends compte dès le moment où j’envisage mes « photographies professionnelles ». (…)

Jacques Charlier
paysages professionnels, 1970. Photographies N.B. et texte imprimé.
9 panneaux de 50 x 60 cm

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Jacques Lizène, Paysages de Belgique, Musée d’Ixelles, les images

Au Musée d’Ixelles, dans le cadre de l’exposition « Paysages de Belgique » conçue par Denis Laoureux :

Jacques Lizène

Jacques Lizène

Jacques Lizène, Documents rapportés d’un voyage au cœur de la Civilisation Banlieue, 1973. Avec modèle contraignant son corps à s’inscrire dans les limites du cadre pour réaliser une tentative de reconstitution du portrait de l’indigène de la Civilisation Banlieue. (Collection Muhka. Photo : Christine Clinckx)

Jacques Lizène

« Documents rapportés d’un voyage au coeur de la civilisation banlieue (Ougrée, banlieue industrielle liégeoise), par un petit maître liégeois, pauvre pitre en art, artiste de la médiocrité, représentant de la banlieue de l’art » (1973, Liège)

Jacques Lizène

« Modèle contraignant son corps à s’inscrire dans les limites du cadre pour réaliser une tentative de reconstitution de portrait de l’indigène de la civilisation banlieue »

Jacques Lizène

Jacques Lizène

Jacques Lizène

Jacques Lizène

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Sophie Langohr, Les Ediles, Fluide 2015, Thuin.

Sophie Langohr

Sophie Langohr

Pour Fluide, Sophie Langohr intègre trois plaques émaillées à la façade ouest de l’église Notre-Dame d’el Vaux. Par le travail des formats, de la matière et de la couleur, les images sérigraphiées évoquent des panneaux d’affichage public à l’abandon. Elles renvoient aussi aux anciennes stèles funéraires encastrées dans les autres murs de l’église. Bien que ces bas-reliefs soient en partie effacés par le temps, ils portent le nom de « pierres parlantes » ; « muettes parce qu’elles ont pour la plupart perdu leur inscription identificatrice mais néanmoins très parlantes si on veut en examiner les éléments [1] », un principe de lecture que Sophie Langohr adopte pour ces pièces.

L’artiste s’inspire encore d’un autre fait de l’histoire de Thuin : le récit du passage de Victor Hugo dans la ville en 1861. L’écrivain visita Aulne et on raconte que, sous l’emprise de l’atmosphère mystique de l’abbaye abandonnée, il aurait, sur un mur des vestiges, laissé sa signature aujourd’hui disparue. Avec cette installation, empreinte des thèmes hugoliens que sont le monde contemporain, l’histoire, la religion et la politique, Sophie Langohr joue sur le caractère de pérennité de son intervention. La permanence de l’œuvre implique une double recherche : sur la forme, l’anticipation du délabrement et sur le fond, la question de la survivance des images et des croyances.

En outre que provoquer la confusion entre passé et présent, ces trois portraits, reconstitués à partir de multiples sources iconographiques, laissent naître un doute sur la nature même de l’œuvre. En effet, ici, le traitement infographique hybride les genres conventionnels de la peinture, de la photographie, du bas-relief et de l’affiche.

[1] » in : Jean-M. Horemans, Les pierres parlantes de l’église Notre-Dame-del-Vaux à Thuin, héritières lointaines de Rogier de le pasture dans Revue Sambre et Meuse n°40.

Sophie Langohr est diplômée en philologie romane, de l’Université de Liège, puis en peinture, à l’Académie des Beaux-Arts de la même ville. L’image, dont la prolifération actuelle touche et affecte tous les territoires de la vie personnelle, sociale et politique, est au centre de ses recherches artistiques. Ses travaux, qu’elle conçoit le plus souvent en fonction du contexte de leur exposition, font référence à l’histoire de l’art ou à un patrimoine proche : Camées néo-classiques, motifs décoratifs de style rococo, sculptures religieuses, drapés baroques, « jolités » spadoises, peintures de nus du XIX e et XX e siècle… sont revisités dans ses séries de photographies Les Camées (2007), Fleurs, oiseaux et fantaisies (2009), New Faces (2012), Glorious Bodies (2013), Drapery (2013)… ou dans des œuvres d’art public comme Jolité (Spa, 2010) et Nus (Tournai, 2014). Qu’elle manipule des images existantes ou qu’elle en crée, Sophie Langohr se réapproprie celles que nous avons consciemment ou inconsciemment en mémoire. Par un délicat travail de refabrication, elle les parodie, les subvertit, y distille un trouble qui, bien au-delà de toute entreprise de mystification, interroge notre façon de percevoir le monde au travers de notre industrie médiatique et consumériste.

(source : BPS22)

Sophie Langohr

Sophie Langohr

Sophie Langohr

Sophie Langohr

Sophie Langohr

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Jacques Charlier, Jacques Lizène, Paysages de Belgique, au musée d’Ixelles

Jacques Charlier et Jacques Lizène participent à l’exposition « Paysages de Belgique », conçue par Denis Laoureux, au musée d’Ixelles. Jacques Charlier y montrera ses Paysages professionnels ainsi que le film Canalisation tourné sur le terril de Saint Gilles dans la région liégeoise. Deux oeuvres hautement conceptuelles du tournant des années 70. Quant au Petit Maître, il ramène quelques documents d’un voyage au coeur de la civilisation Banlieue.

Jacques charlier

Jacques Charlier, paysages professionnels, 1970. Photographies N.B. et texte imprimé.9 panneaux de 50 x 60 cm

Jacques Lizène

Jacques Lizène, Documents rapportés d’un voyage au cœur de la Civilisation Banlieue, 1973. Avec modèle contraignant son corps à s’inscrire dans les limites du cadre pour réaliser une tentative de reconstitution du portrait de l’indigène de la Civilisation Banlieue. (Collection Muhka. Photo : Christine Clinckx)

À travers l’exposition PAYSAGES de Belgique, le Musée d’Ixelles propose une sélection d’œuvres, de 1830 à aujourd’hui, montrant comment la nature se fait art. Car la question est bien là : par quel(s) moyen(s) l’artiste déplace-t-il la nature dans le cadre d’une œuvre d’art ?
C’est donc à travers des œuvres multiples et variées que l’exposition vous propose de déambuler dans la géographie belge des artistes : peinture, photographie, vidéo, installation, film, etc. Une performance est également programmée (voir événements annexes). Les dispositifs plastiques sont aussi variés que l’exige la nature pour se laisser enfermer dans une œuvre d’art. La nature devient alors un outil artistique, elle devient le prétexte à l’utilisation de procédés plastiques variés et soigneusement sélectionnés pour la sublimer.
Mais le paysage, en particulier dans la jeune Belgique du XIXe siècle, est aussi un point de vue, une vision exprimée à travers le choix de ce qu’on représente : la Mer du Nord, la Campine, les bords de la Meuse, les terrils… L’artiste choisit ce qu’il veut montrer, voire démontrer. Au XXe siècle, la tradition se perpétue en autant de paysages nationaux parfois proches d’un engagement idéologique. Le paysage est aussi un portrait puisque la nature est transformée par l’homme… Six sections thématiques déclinent cette métamorphose au fil d’une exposition conçue comme une échappée belle dans l’art du paysage belge.

Avec les œuvres de : Artan, Baron, Bernd et Hilla Becher, Bertrand, Boch, Bogart, Boulenger, Broodthaers, Burssens, Bury, Bytebier, Charles, Charlier, Claus, Coosemans, Crépin, Decelle, Degreef, Dubois, De Cordier, De Saedeleer, Degouve de Nuncques, Delvaux, De Peelaert, De Smet, Donnay, Dotremont, Doudelet, Dujardin, Ensor, Evenepoel, Fastenaekens, Felten-Massinger, Finch, Frédéric, Goethals, Hamesse, Hänsel, Héger, Heymans, Khnopff, Lacomblez, Le Brun, Lismonde, Lizène, Luce, Magritte, Mahieu, Mendelson, Meunier, Mineur, Oosterlinck, Op de Beeck, Ozcetin, Paulus de Châtelet, Permeke, Pirenne, Quinet, Ransonnet, Rops, Rose, Schlobach, Sommelette, Spilliaert, Stevens, Toussaint, Ubac, Vandamme, Van den Abeele, Vandercam, Van der Hecht, Van de Spiegele, Van Lint, Vanriet, Vercheval, Verwée, Vilet, Vogels, Wyckaert.

Jacques Charlier

Jacques Charlier, Canalisations souterraines, une caricature des dernières tendances paysagistes. 1969, Installation vidéo. Film performance de Jacques Charlier filmé en septembre 1969 sur le terril de Saint-Gilles à Liège. Caméra : Nicole Forsbach. Sonorisation : Jacques Charlier. Couleurs. 13.20 min. Suite de coupures de presse prélevées dans des revues de travaux publics parvenant au Service Technique Provincial de la Province de Liège, projetées en diapositives. Accompagnées d’un certificat signé et daté Jacques Charlier, 1968.

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Wild Open Space, Les Moissons de la Cité, Grand Curtius Liège

Jacques Lizène

Eleni Kamma, Jacques Lizène, Emilio Lopez-Menchero, Sophie Langohr, Pol Pierart et Marie Zolamian participent à l’exposition “Wild Open Space, Les Moissons de la Cité”, exposition rétrospective des 80 oeuvres acquises par la Space Collection. Au Grand Curius à Liège, du 25 juin au 13 septembre. Vernissage le 24 juin.

Lancée en 2002 par l’artiste belge Alain De Clerck, la SPACE Collection construit un réseau de villes européennes liées entre elles par une collection transfrontalière d’art contemporain.
Les œuvres sont acquises grâce à des sculptures interactives implantées dans l’espace public. Quand un passant glisse une pièce dans une des bornes de la SPACE, il anime une sculpture et reçoit un ticket avec un poème ou un cadeau culturel. L’argent récolté est augmenté grâce à du mécénat et permet d’acheter des œuvres d’art. A Liège et à Maastricht, les deux premières génératrices de culture ont déjà permis d’acquérir 80 œuvres mélangeant les genres, les supports, les techniques et les artistes.

Launched in 2002 by Belgian artist Alain De Clerck, SPACE Collection is building a network of European cities linked by a trans-border collection of contemporary art.
The works are acquired thanks to interactive sculptures set up in public spaces. Whenever a visitor inserts a coin into a SPACE machine, he animates the sculpture and gets a ticket to poetry or cultural prize. Then, money is collected, increased by sponsorphip and transformed into works of art. In Liege and Maastricht, the first culture machines already allowed to buy 80 works mixings genres, material supports, techniques and more or less renowned artists.

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Eleni Kamma, 5e biennale de Thessalonique

Biennale de Thessalonique

Eleni Kamma participe à la 5e Biennale de Thessalonique, dont le commissariat a été confié à Katerina Gregos.

Eleni Kamma

Eleni Kamma
It takes courage and breath to speak up.
HD video, color, stereo sound, 16:9, NL, 2014, 5 min 59 sec

Between the optimism of the will and the pessimism of the intellect

Katerina Gregos

The title of the 5th Thessaloniki Biennial is inspired by an aphorism invoked by Antonio Gramsci in the The Prison Notebooks (Quaderni del carcere) that he wrote between 1929 and 1935 while he was imprisoned by the Facist regime in Italy at the time. In these voluminous writings which he composed during his eleven years incarceration Gramsci repeatedly cites this phrase; in one of the letters he writes: “The challenge of modernity is to live without illusions and without becoming disillusioned … I’m a pessimist because of intelligence, but an optimist because of will.” This duality constitutes a point of departure to talk about the current situation of crisis – and how to overcome it -­‐ that governs much of the Mediterranean, which will once again be the focal point of the next biennial.

As a diverse blend and composite of cultures, religions, ethnicities, languages, traditions and norms – the and the crossroads of three principal religions and continents – it becomes very difficult to define the Mediterranean area, except in geographic terms. Indeed there is much debate on whether we can even speak of a Mediterranean identity, culture or even region; and equally, it is impossible to treat the countries of the area as an undifferentiated group, nor arrive a singular understanding of what constitutes ‘The Mediterranean’. It is as much a real as an imagined space, whose perception has been determined and coloured by idyllic as well as negative stereotypes and misperceptions. But what many of the 26 countries (not including the Turkish Republic of Northern Cyprus and Palestine, both of which are contested territories) seem to face today are a series of serious ongoing crises (whether social, economic, or political) as well as several zones of armed conflict. In fact, it would not be an exaggeration to call the Mediterranean a crisis zone of sorts. Greece, Spain, and Italy are all in the throes of economic crises, Turkey is in the midst of a political crisis, while a large part of the Southern shores of the Mediterranean simmer with political and social unrest as democracy is being challenged, and the Eastern shores remain mired either in armed conflict or decades long unresolved political, religious and territorial disputes.

So while the Mediterranean cannot be defined in terms of a common identity, it constitutes a hotbed for some of the more burning issues of the moment including social and economic equality, democracy, civil rights, migration and mobility, and personal autonomy, the overall area treading the fine line between order and disorder. Many countries of the Mediterranean are, in fact, to a large extent facing a situation of impasse, which is engendered by prolonged or unresolved crises. Gramsci himself defined crisis as precisely that situation where “the old is dying and the new cannot be born” and added that “in this interregnum a great variety of morbid symptoms appear.” Given the failure of both politics and the political imagination, what remains in many parts of the Mediterranean world is an anticipation of alternatives and the hope for a better world. It is in the vacuum or grey zone of this anticipation that the Mediterranean currently finds itself, fuelled by desire but bogged down by reality but also realpolitik. It rests with artists, cultural practitioners and grass roots activists to exercise the creative and radical imagination, in order to critically dissect what is happening right now (thus engaging the pessimism of the intellect) as well as to

envisage or allude to another way of being (by harnessing the optimism of the will). It is precisely the imagination that fuels this optimism of the will that appears lacking today in much of the politics and policies that govern Europe and also the Mediterranean today.

‘Pessimism of the intellect’ might mean looking at the world as it is with all its flaws, but at the same time challenging the certainties and scaremongering that are propagated by those in power who fear losing it; the pessimistic intellect entails putting things under scrutiny and into doubt. It views the world critically, puts things and givens into question, which is the basis for any advancement. In a sense the pessimism of the intellect is pragmatic, but not necessarily cynical. ‘Optimism of the will’, on the other hand does not necessarily denote a naïve view of the world but rather evokes the imagination and the mental strength necessary to bypass adversity, something that most humans inherently possess, and have also harnessed since time immemorial to get through times of hardship and move forward.

In light of the general fatalism that governs many aspects of politics, economics, and public life today, as well as the dominant view that capitalism is ‘inevitable’, Gramsci’s phrase seems as relevant as it was when first written. It is the optimism of the will that when implemented finally sparks change and can sow the seeds for a better future.
What we seem to miss now, more than ever, is the optimistic will put into action. The Thessaloniki Biennial will explore the multiple meanings of this dual phrase as well as mine that grey zone in between. Gramsci’s aphorism could also provide an inspirational point of departure for looking beyond crisis, at a time increasingly characterized by apathy and a general defeatist attitude in relation to the intensification of capitalism, growing social and economic inequalities, and the threat of socially oriented programmes and protections, not only in the Mediterranean, but throughout Europe in general. The biennial will thus shed light on some of the critical issues affecting the Mediterranean region so far, but will also allow room for what Ernst Bloch has called “forward dreaming”, so essential to move beyond the impasses that humanity faces at the moment. In this case, art has a seminal role to play as a form of emancipatory praxis. The artists in the biennial will thus engage in critical, oppositional cultural practices, and exercise the freedom of the imagination thus symbolically engaging with Gramsci’s aphorism. The latter perhaps provides the key to counter the situation of hopelessness today, which as David Graber correctly has pointed out, is not a natural state of affairs: “Hopelessness isn’t natural. It needs to be produced. If we want to understand this situation, we need have to begin by understanding that the last thirty years have seen the construction of a vast bureaucratic apparatus for the creation and maintenance of hopelessness, a kind of giant machine that is designed, first and foremost to destroy any sense of possible alternative futures [….]this apparatus exists to shred and pulverize the human imagination, to destroy the possibility of envisaging alternative futures”.
Art is one of the ways that this sense of inevitability can be challenged by opening up critical ways of looking at the world not only as it is, but as it could be and that is precisely what the artists presented at the Biennial will set out to do.

Sources:

Antonio Gramsci, Selections from the Prison Notebooks, Lawrence & Wishart, London, 1973
David Graeber, Revolutions in Reverse: Essays on Politics, Violence, Art, and Imagination, Minor Compositions, London

The 5th Thessaloniki Biennale of Contemporary Art is the third one of a three part program which started in 2011 and is funded under the Operational Program Macedonia-Thrace 2007-2013, co-financed by the European Union (European Regional Development Fund) and Greece. The organization is run by the State Museum of Contemporary Art, realized with the participation of the “5 Museums’ Movement of Thessaloniki” (Archaeological Museum of Thessaloniki., Museum of Byzantine Culture, Macedonian Museum of Contemporary Art, State Museum of Contemporary Art, Teloglion Foundation of Arts), supported by the Municipality of Thessaloniki and with the collaboration of many local institutions.

Main Exhibition
The main exhibition bears the title « Between the Pessimism of the Intellect and the Optimism of the Will”, which was given by the curator Katerina Gregos, inspired by an aphorism by Antonio Gramsci. It will be housed in Periptero 6 (venue into the premises of the Thessaloniki International Fair). 44 artists, one artists’ collective group from 25 countries all around the world, will show their artworks, new and old productions, making the title of the exhibition more up to date than ever.

Participating artists
Carlos Aires (ES), Can Altay & Jeremiah Day (TR/US), Ivan Argote (CO), Marwa Arsanios (US), Bertille Bak (FR), Taysir Batniji (PS), James Beckett (ZA/NL), Adelita Husni Bey (IT), David Brognon & Stéphanie Rollin (BE/LU), Marianna Christofides (CY), Depression Era (GR), Ninar Esber (LB), Mounir Fatmi (MA), Peter Friedl (AT), Mekhitar Garabedian (SY/BE), Ganzeer (EG), Marina Gioti (GR), Piero Gilardi (IT), Hamza Halloubi (MA), Nick Hannes (BE), Sven Johne (DE), Annika Kahrs (DE), Eleni Kamma (GR), Hayv Kahraman (IQ), Mikhail Karikis (GR), Chrysanthi Koumianaki (GR), Erik Van Lieshout (NL), Thomas Locher (DE), Angela Melitopoulos & Angela Anderson (DE/US), Tom Molloy (IE), Nikos Navridis (GR), Qiu Zhijie (CN), Pavel Pepperstein (RU), Antonis Pittas (GR), Theo Prodromidis (GR), Meriç Algün Ringborg (TR), Anila Rubiku (AL), Marinella Senatore (IT), Nedko Solakov (BG), Nikos Tranos (GR), Thomas Weinberger (DE), Olav Westphalen (DE)

June 23– September 30, 2015
General title: “Old Intersections-Make it Νew ΙΙΙ”

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