Archives par étiquette : Valerie Sonnier

Valérie Sonnier, Distant Proximity, Centrale for contemporary art, revue de presse (2)

Lu dans Le Soir, sous la plume de Jean Marie Wynants :

C’est un voyage extraordinaire auquel nous convie la nouvelle exposition de la Centrale. Un voyage tourné vers le monde extérieur, à la fois proche et distant, comme le souligne parfaitement le titre de la manifestation, « Distant Proximity ».
Cette « proximité distante » est illustrée magistralement, dès l’entame du parcours, par le travail de Lauren Moffatt. Dans une salle en forme de sas, plongée dans la pénombre, le visiteur découvre un étrange casque protégé par une vitrine et un film en noir et blanc aux images incertaines. Il faut se munir des lunettes 3D fournies à l’entrée pour apprécier celui-ci. On suit alors les pérégrinations d’une femme n’affrontant plus le monde extérieur que protégée par le fameux casque aperçu dans la vitrine.
Vrai-faux reportage, le film la montre dans le métro observant les gens qui l’observent. Mais il la montre aussi dans un studio de cinéma, interviewée par un interlocuteur invisible. Elle raconte les raisons qui la poussent à affronter le monde extérieur munie de cette protection. Ne supportant plus les regards extérieurs intrusifs, démultipliés par les caméras de toutes sortes, elle s’est fabriqué ce masque-caméra qui lui permet de regarder le monde à travers un filtre permanent…
En quelques minutes, Lauren Moffatt nous plonge dans un univers fictionnel finalement très proche de la réalité grâce à une réalisation sobre et efficace.
Le visiteur est alors prêt à plonger dans les univers suivants. La deuxième salle rassemble les travaux de plusieurs artistes qui, tous, brouillent les pistes en réinventant un monde extérieur : les assemblages d’ACM (Alfred et Corinne Marie) sont constitués de matériaux de récupération (pièces métalliques, électroniques, plastiques) donnant naissance à d’invraisemblables architectures, d’une folle complexité.
On peut en dire autant des dessins de Jeroen Hollander qui ne sont constitués que de lignes et de chiffres symbolisant les multiples réseaux de transport sillonnant une ville. Ceux-ci sont pourtant imaginaires et la ville n’existe que par leur représentation.
Peut-être est-ce la même cité que photographie Nicolas Moulin en débusquant des architectures massives, solitaires, où la vie semble avoir fui loin de ces hautes tours et de ces vastes esplanades. Il reste pourtant une vie, symbolisée par une pièce ancienne de Françoise Schein recréant la Belgique vue du ciel avec de petites lampes et des essuie-glaces à travers lesquels on découvre cette constellation à l’envers.
Totalement transformée, la grande salle frappe d’emblée par la présence d’une mystérieuse installation de Peter Buggenhout : les débris indéfinissables d’une construction, d’un engin mystérieux. Couverte de poussière, elle interroge et suggère toutes les catastrophes, les passés enfouis, les destructions incessantes.

Valerie Sonnier

Hantée par la maison de son enfance et son jardin sauvage, Valérie Sonnier fait revivre celle-ci au travers d’un étonnant travail vidéo et d’une série de dessins, tantôt minuscules tantôt monumentaux, à la fois étranges et d’une folle précision.

Contraste total avec le travail de Valérie Sonnier, entre dessins et vidéo, autour d’une maison de famille et de son grand jardin, qu’il faut se résigner à quitter. Mais le passé est là, qui hante les lieux et les âmes. Michel Mazzoni livre un peu plus loin les traces mystérieuses d’un monde bien réel, dans un étonnant mélange de formel et de sensible.
En bout de parcours, Wilmes & Mascaux nous invitent enfin à un dernier voyage incertain, fait d’images et de sons, dans un futur indéfinissable mais ressemblant beaucoup à notre quotidien. Un univers imaginaire créé à partir du réel. Une tentative de survie dans un monde qui continue inlassablement sa course folle vers la destruction. Si lointain et si proche.

JEAN-MARIE WYNANTS

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Valerie Sonnier, Distant Proximity, Centrale for contemporary Art, Bruxelles (2)

(…) Valérie Sonnier’s (Fr) drawings and films also evoke ‘the house inside her’. It is her childhood home with its untended garden, a place ‘destined for demolition by the property developers, which obstinately seals her secrets, those of her nature and of her remembrances’. In this way Valérie Sonnier’s brilliant drawings become visualisations of the passing of time, of her life with its secrets and lies, bedrocks of any existence, but also of death. It is the uninterrupted course of an experience, which contains the substratum of another life. A past life that she tries to capture by video, like a ghost wandering around this abandoned house. As though haunted by the memory, all her works have a ‘worrying strangeness’ (Unheimliche by Sigmund Freud). It embodies an auratic form ‘which is situated between an in front of and an inside.’ The visitor is in an uncomfortable yet intense position ‘which defines our entire experience, when what looks back at us in what we see is revealed to us. (Carine Fol)

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier
sans titre (sous la neige)
technique mixte sur papier
26 x 20 cm
2010

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier
sans titre (sous la neige)
technique mixte sur papier
26 x 26,5 cm
2010

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier
sans titre (sous la neige)
technique mixte sur papier
26 x 20 cm
2010

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier
sans titre (sous la neige)
technique mixte sur papier
26 x 26,5 cm
2010

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Valerie Sonnier, Distant proximity, revue de presse

Valerie Sonnier

Dans La Libre du 14.03.2014

De l’art qui évoque nos chers et troublants fantômes
GUY DUPLAT

ARTS VISUELS Art Un parcours sur l’image et ses traces émotives, à la Centrale.
Sa première exposition, « Mindscapes », à la Centrale, à deux pas de la place Sainte-Catherine à Bruxelles, avait déjà donné le ton de ce que voulait faire Carine Fol, sa nouvelle directrice : créer des parcours de découvertes et d’émotions à travers l’art contemporain, mêlé parfois à l’art brut.

L’exposition « Distant Proximity » est dans cette veine. Ce titre de « proximité distante » est un paradoxe, un oxymore, proposé comme fil conducteur possible parmi les propositions des neuf artistes présentés. Les œuvres nous parlent de notre société, de notre vie, de nos souvenirs. Elles sont chargées de tout le poids d’émotions accumulées et oubliées, et sont, en même temps, distantes et imprégnées de cette « inquiétante étrangeté » dont parlait Freud. Le philosophe Eric Clémens cite cette belle phrase de Nietzsche : « Nous avons l’art pour ne pas mourir de la vérité ». L’art peut évoquer la réalité mais jamais y être identifié. Il reste une construction à travers nos sens et notre intelligence, d’un réel inatteignable.

Tout en poussières

Fort de cela, on découvre dans cette courte exposition quelques œuvres fortes. Comme l’ensemble des architectures folles et minuscules réalisées par des artistes d’art brut, ACM (pour Alfred et Corinne Marie). Ils reprennent des petites pièces de machines domestiques et les réassemblent en une « ville » qui nous est à la fois proche et infiniment éloignée (comme la maladie mentale). Autour de cet ensemble, on découvre les grandes photos de Nicolas Moulin qui assemble des images d’architectures vides de gens, de lieux fantomatiques, de villes utopiques devenues des déserts comme à Fukushima ou Tchernobyl.

Autour encore, une œuvre ancienne de Françoise Schein (qui bénéficie d’une grande expo pour l’instant au Civa), où elle exprime ses « Souvenirs belges », avec un nœud de veines lumineuses comme nos autoroutes éclairées la nuit, seul artefact humain visible de l’espace avec la muraille de Chine.

Le cœur de cette exposition est l’installation monumentale de Peter Buggenhout. L’artiste gantois a construit un grand objet non identifié et volontairement non identifiable, comme une trouvaille archéologique ressemblant à tout et à rien à la fois. Mélange d’avion crashé, de camion désossé et de déchets, le tout recouvert d’une couche de poussières évoquant le temps passé. A nouveau, un objet qui nous semble proche mais qui reste inaccessible. A nouveau, on peut penser à Tchernobyl ou Pompéi, quand la vie brusquement s’est arrêtée. Une œuvre imposante qui occupe pleinement les espaces difficiles de la Centrale.

Il faut encore voir, parmi les œuvres intéressantes, les dessins et la vidéo de Valérie Sonnier qui montrent l’image réelle ou rêvée de la maison où elle a grandi. Vide de ses habitants, envahie par la végétation, ouverte aux vents et aux fantômes. Fantasme ou réalité ? La vision qu’on a des choses est plus vraie que le réel qui nous échappe toujours. L’image est une manière de modéliser le monde autour de nous, selon nos affects. Une image pas moins « vraie » que la science ou une objectivité impossible.

Sur Musiq 3, le point des arts plastiques, par Pascal Goffaux

musiq3

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Valerie Sonnier, Distant Proximity, Centrale for contemporary Art, Bruxelles (1)

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier

Entre chien et loup, 2012
pierre noire et cire sur papier, 210 x 123 cm

Lorsque Valérie Sonnier entreprend son film « Des pas sous la neige » (2011) et retourne donc dans cette maison familiale de la rue Boileau à Versailles, elle a soin de laisser grand ouverts les battants de toutes les fenêtres. La maison est ainsi ouverte à tout courant d’air ou tout souffle, de quelque nature serait-il. La cinéaste a choisi la nuit tombante, la nuit tombée, le moment est incertain ; c’est un venteux soir d’orage et les rideaux, aux embrasures des fenêtres ouvertes, s’envolent. Avec ses pilastres, ses balustrades, le péristyle de la terrasse donnant sur un jardin où la nature a depuis longtemps repris ses droits, cette maison d’un autre âge, désuète et décrépie, conserve néanmoins une certaine noblesse. Sans doute, a-t-elle connu des jours fastes, une activité vivace. En fait, cette maison pourrait très certainement être un décor de film. La caméra de Valérie Sonnier explore des pièces de séjour désolément vides. L’image, naturellement dirais-je, est noire et blanche. Un fantôme apparaît dès les premiers plans du film, entré dans le champ de la caméra sur la pointe des pieds, sans doute par l’une des nombreuses fenêtres ouvertes. Ses discrètes apparitions, au détour d’un couloir, sur la terrasse, se font de plus en plus précises. Il est bien là, immatériel, intangible, impondérable. Il hante la maison et le jardin ; il hante une maison elle-même fantomatique. La neige étend son linceul sur le jardin ; le suaire du fantôme s’y confond. Celui-ci finit par disparaître derrières les frondaisons des arbres ployant sous la neige. Autant le ciel d’orage était noir, autant les dernières images du film sont blanches.
Volontairement, Valérie Sonnier renoue avec les chasses aux fantômes de l’enfance, avec cette magie illusionniste d’une apparition bien réelle qui exerce, de singuliers effets de fascination. Je repense au cinéma de Georges Mélies, à ses spectres comiques, aux fantômes évanescents et aériens qui surgissent par enchantement, ces œuvres d’une époque où la confrontation entre photographie spirite, spectacles de magie, pratiques médiumniques et celles du cinématographe laissent le spectateur littéralement sidéré, happé tant par ce qu’il voit que par la manière dont il voit, sans plus aucune mise à distance. on ne peut ici, qu’évoquer l’extrême similitude qui existe entre le film de Valérie Sonnier et cette célèbre photographie de Lartigue, prise en 1905, intitulée: « Mon frère Zissou en fantôme, Villa Les Maronniers, Château Guyon 1905 ». Il s’agit là d’une unique apparition d’un lointain, si proche soit-il », pour reprendre l’expression de Walter Benjamin. Avec la trace, nous nous emparons de la chose ; avec l’aura, c’est elle qui se rend maîtresse de nous ».

Lorsque Valerie Sonnier dessine cette maison de la rue Boileau, choisissant un point de vue qui confère des allures de petit Trianon à l’austérité des arrêtes de la façade flanquée de grands arbres, elle opte pour un format panoramique proche du cinémascope. Et dès le moment où elle entreprend de dessiner la maison et le jardin sous tous leurs angles, c’est l’imaginaire d’un story-board qui la conduit. Valérie Sonnier travaille sur d’anciens cahiers de comptes, se fixant des cadrages parcimonieux ; son dessin est minutieux, précis, comme s ‘il s’agissait de consigner –et les marges comptables restent apparentes – le moindre mouvement du vent dans les broussailles. Ce que nous voyons nous est proche, comme instantané, alors que ces œuvres nous semblent lointaines et hors du temps. Qu’elle filme, dessine, ou peigne les rosiers du jardin, les images de Valérie Sonnier sont bien souvent les fantômes d’elles-mêmes. C’est là la mise à jour d’un inconscient de la vision. Comprendre une image, c’est se mettre, en la regardant, à l’écoute de sa teneur temporelle. L’image, elle-même, a sa capacité de revenance.

Née en 1967, Valérie Sonnier vit et travaille à Paris. Diplômée des Beaux-arts de Paris et licenciée en arts plastiques, elle est professeur de dessin et de morphologie aux Beaux-arts de Paris depuis 2003. Après avoir suivi le séminaire de Jeff Wall à l’université de British Columbia à Vancouver, elle a développé son travail personnel, jetant des passerelles d’un médium à l’autre. Dessins, peintures, photographies et films Super 8 tissent des liens entre souvenirs intimes et mémoire collective de l’enfance.

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier

Neuf heures et demie du soir. Eté, 2014
pierre noire et cire sur papier, 210 x 123 cm

Valerie Sonnier

Valerie Sonnier

24 juin, 22h20.2012
pierre noire et cire sur papier, 210 x 123 cm

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Valerie Sonnier, Distant proximity, Centrale for contemporary Art, Bruxelles

A la Centrale for Contemporary Art, du 13 mars au 8 juin. Vernissage le 12 mars.

Ce projet au titre paradoxal (la distance proche) propose un plongeon dans le temps, ou plutôt dans « les temps » de l’oeuvre et du regard, ou plutôt « des regards ». Il rassemble des évocations de la réalité, de l’urbanité, des réminiscences du passé, du devenir du monde qui nous entoure,… comme autant de manières d’ « être au monde » (Martin HEIDEGGER). Comme autant de révélations de « la charge affective du réel » (Georges BACHELARD). Les artistes mis en présence, de différentes origines et générations, questionnent singulièrement la proximité et la distance au monde extérieur par le biais d’oeuvres d’une grande intériorité. Le dispositif de Distant proximity se déploie comme un scénario : les oeuvres s’imbriquent au sein d’une structure qui guide le spectateur à travers un processus visuel et sensoriel, cérébral et corporel. Tout en respectant la spécificité et l’impact de chaque démarche des artistes présents, les oeuvres forment des pièces d’un puzzle dont l’assemblage est l’unité du projet. A l’issue de cette déambulation qui évolue d’une vision claustrophobique à une survivance d’images en noir et blanc à la couleur, le spectateur aura rencontré « des regards » oscillant entre réel et imaginaire, présent et passé, proche et lointain, … comme autant d’errances de l’esprit dans la Distant Proximity.

ACM // Peter Buggenhout // Jeroen Hollander // Michel Mazzoni // Nicolas Moulin // Lauren Moffat // Françoise Schein // Valérie Sonnier // Wilmes et Mascaux

Valerie Sonnier

Valérie Sonnier, sans titre, crayon et cire sur papier, 210 x 123 cm, 2012-2013

Lorsque Valérie Sonnier entreprend son film « Des pas sous la neige » (2011) et retourne donc dans cette maison familiale de la rue Boileau à Versailles, elle a soin de laisser grand ouverts les battants de toutes les fenêtres. La maison est ainsi ouverte à tout courant d’air ou tout souffle, de quelque nature serait-il. La cinéaste a choisi la nuit tombante, la nuit tombée, le moment est incertain ; c’est un venteux soir d’orage et les rideaux, aux embrasures des fenêtres ouvertes, s’envolent. Avec ses pilastres, ses balustrades, le péristyle de la terrasse donnant sur un jardin où la nature a depuis longtemps repris ses droits, cette maison d’un autre âge, désuète et décrépie, conserve néanmoins une certaine noblesse. Sans doute, a-t-elle connu des jours fastes, une activité vivace. En fait, cette maison pourrait très certainement être un décor de film. La caméra de Valérie Sonnier explore des pièces de séjour désolément vides. L’image, naturellement dirais-je, est noire et blanche. Un fantôme apparaît dès les premiers plans du film, entré dans le champ de la caméra sur la pointe des pieds, sans doute par l’une des nombreuses fenêtres ouvertes. Ses discrètes apparitions, au détour d’un couloir, sur la terrasse, se font de plus en plus précises. Il est bien là, immatériel, intangible, impondérable. Il hante la maison et le jardin ; il hante une maison elle-même fantomatique. La neige étend son linceul sur le jardin ; le suaire du fantôme s’y confond. Celui-ci finit par disparaître derrières les frondaisons des arbres ployant sous la neige. Autant le ciel d’orage était noir, autant les dernières images du film sont blanches.
Volontairement, Valérie Sonnier renoue avec les chasses aux fantômes de l’enfance, avec cette magie illusionniste d’une apparition bien réelle qui exerce, de singuliers effets de fascination. Je repense au cinéma de Georges Mélies, à ses spectres comiques, aux fantômes évanescents et aériens qui surgissent par enchantement, ces œuvres d’une époque où la confrontation entre photographie spirite, spectacles de magie, pratiques médiumniques et celles du cinématographe laissent le spectateur littéralement sidéré, happé tant par ce qu’il voit que par la manière dont il voit, sans plus aucune mise à distance. on ne peut ici, qu’évoquer l’extrême similitude qui existe entre le film de Valérie Sonnier et cette célèbre photographie de Lartigue, prise en 1905, intitulée: « Mon frère Zissou en fantôme, Villa Les Maronniers, Château Guyon 1905 ». Il s’agit là d’une unique apparition d’un lointain, si proche soit-il », pour reprendre l’expression de Walter Benjamin. Avec la trace, nous nous emparons de la chose ; avec l’aura, c’est elle qui se rend maîtresse de nous ».

Lorsque Valerie Sonnier dessine cette maison de la rue Boileau, choisissant un point de vue qui confère des allures de petit Trianon à l’austérité des arrêtes de la façade flanquée de grands arbres, elle opte pour un format panoramique proche du cinémascope. Et dès le moment où elle entreprend de dessiner la maison et le jardin sous tous leurs angles, c’est l’imaginaire d’un story-board qui la conduit. Valérie Sonnier travaille sur d’anciens cahiers de comptes, se fixant des cadrages parcimonieux ; son dessin est minutieux, précis, comme s ‘il s’agissait de consigner –et les marges comptables restent apparentes – le moindre mouvement du vent dans les broussailles. Ce que nous voyons nous est proche, comme instantané, alors que ces œuvres nous semblent lointaines et hors du temps. Qu’elle filme, dessine, ou peigne les rosiers du jardin, les images de Valérie Sonnier sont bien souvent les fantômes d’elles-mêmes. C’est là la mise à jour d’un inconscient de la vision. Comprendre une image, c’est se mettre, en la regardant, à l’écoute de sa teneur temporelle. L’image, elle-même, a sa capacité de revenance.

Née en 1967, Valérie Sonnier vit et travaille à Paris. Diplômée des Beaux-arts de Paris et licenciée en arts plastiques, elle est professeur de dessin et de morphologie aux Beaux-arts de Paris depuis 2003. Après avoir suivi le séminaire de Jeff Wall à l’université de British Columbia à Vancouver, elle a développé son travail personnel, jetant des passerelles d’un médium à l’autre. Dessins, peintures, photographies et films Super 8 tissent des liens entre souvenirs intimes et mémoire collective de l’enfance.

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Valerie Sonnier, Acquisitions récentes 2009-2013, Frac Picardie, Amiens, l’image

Valerie Sonnier

Valérie Sonnier enseigne depuis 2003 le dessin et la morphologie à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris. Son travail plastique consiste à réactiver et transformer ses souvenirs, les objets ou situations rattachés à l’enfance. L’imagerie qu’elle convoque fait défiler tour à tour jouets, scènes de jeu, vues de la maison familiale où elle séjournait petite. Sa pratique la conduit à travailler indifféremment le dessin, la peinture ou le film super 8. Si le matériau de ses oeuvres repose parfois sur son propre vécu (extraits de films familiaux ou l’artiste enfant figure, photographies ou vidéos de la maison de sa grand-mère), il ne s’agit pas pour autant d’en établir le récit minutieux. Chaque moment , chaque scénette représentée évoque des sensations, une atmosphère qui trouvent résonnance dans les souvenirs de chacun. Le t raitement plastique leur confère une charge émotionnelle particulière, tant dans les dessins minutieux, les acryliques aux couleurs saturées que les films aux séquences pâties par le temps.

Comme point de départ à une série de dessins intitulée Les morts minuscules, la rencontre de Valérie Sonnier avec des objets lors d’une promenade aux Puces à Paris au début des années 1990. Elle revient chez elle avec, sous le bras, un jouet en bois et un livre de compte aux fins quadrillages. Ce jouet, en l’occurrence un camion laitier, est mis en scène et cohabite le plus souvent avec d’autres jeux. Le dessin s’attache à représenter avec minutie cet univers marqué par une inquiétante étrangeté. Le camion engage des relations équivoques avec une poupée et un squelette -marionnette quand il ne fraye pas avec la mort, dans la ligne de mire d’un révolver ou au contact d’un crâne.

D’autres dessins appartenant à la même série constituent les pages d’un cahier intitulé Le cahier de morts minuscules. Il retrace le parcours du camion, sorti de sa boite que l’artiste lui avait spécialement confectionnée et partant à la découverte du monde. Le caractère anodin de ces natures mortes est trompeur, il en sourd un sentiment plus ambivalent, voire grinçant. Si les différents éléments évoquent naturellement les jeux de l’enfance, ils sont manipulés par l’artiste de telle sorte à rappeler le temps qui passe, la mort à l’oeuvre, la destruction des choses. Les objets s’enlacent ou s’accouplent, le camion s’aventurant à l’intérieur devient un élément d’ érotisation, comme pour nous rappeler qu l’ enfance recèle inévitablement une part de violenc et de désir. Le cadrage cinématographique de certains dessins renforce la dimension fictionnelle, joue sur les échelles, permet au regard de tourner autour des objets.

Propos sur l’artiste :

Derrière leur apparente légèreté – derrière l’apparente légèreté des dessins de Valérie Sonnier –, les jouets sont d’une richesse symbolique et culturelle immense. Ils préparent à la vie de « grand » autant qu’ils permettent de s’en émanciper en éveillant notre imagination. C’est la raison pour laquelle il est si difficile de s’en séparer. Leur abandon est douloureux, car il signifie notre entrée dans l’âge adulte, fait d’amour et de rencontres, mais aussi de compétition, de responsabilités et au final, de néant. De même que le jouet est une réduction poétique du monde réel, le destin du petit camion laitier est la contraction mélancolique d’une vie humaine. (Bruno Girveau, L’insoupçonnable gravité du jouet).

Source : Frac Picardie, Des mondes dessinés

Frac picardie, Amiens 13 novembre 2013 – 21 février 2014

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Valerie Sonnier, Acquisitions récentes 2009-2013, Frac Picardie, Amiens

Valerie Sonnier

Pour célébrer ses 30 ans, et à l’instar de ses homologues dans chacune des régions françaises, le fracpicardie propose un cycle d’expositions dont l’ambition est d’allier tout à la fois la singularité que chacun lui associe, celle d’un intérêt indéfectible pour le dessin, et les relations entretenues avec les lieux emblématiques de sa région qui contribuent de manière régulière ou pour la première fois à la diffusion d’un fonds dépassant aujourd’hui les mille œuvres. En deux accrochages distincts, à la maison de la culture d’amiens d’abord, au fracpicardie ensuite, la singularité d’une politique d’acquisition ambitieuse, longtemps déclinée hors des sentiers battus, s’affirme de nouveau par la diversité des choix d’un comité technique d’acquisition dont la curiosité et l’audace ne s’émoussent pas. Sous toutes ses formes, toutes ses origines, tous ses propos, l’esprit graphique du dessin en demeure le vecteur incontesté, trait ou ligne quels qu’en soient les outils, les gestes ou les supports. Il vaut au fracpicardie de s’être imposé en trente ans comme une institution référent parmi d’autres plus prestigieuses et parfois séculaires. Il a aussi suscité les prémisses d’un dialogue avec des ressources patrimoniales régionales, au voisinage des cabinets d’arts graphiques de plusieurs musées comme celui du Musée Condé à Chantilly. Pour accompagner cette démarche, un nouveau partenariat avec le centre national des arts plastiques – ministère de la culture et de la communication est initié. Des dépôts significatifs, tant en intérêt qu’en nombre, contribuent au développement des ensembles thématiques ou monographiques pré existants. Cette dynamique bénéficiera au contenu de la diffusion et de la médiation initiées en collaboration avec des collectivités locales et de multiples partenaires culturels et éducatifs, comme en cette fin d’année à Saint-Riquier, Soissons, Beauvais et en gare d’Amiens.

Jean-Michel Alberola, François Burland, Edith Dekyndt, Daniel Dezeuze, Roland Flexner, Bernard Moninot, Yazid Oulab, Carmen Perrin, Chantal Petit, Valérie Sonnier, Catharina Van Eetvelde, Françoise Vergier dessins et œuvres du fracpicardie et du centre national des arts plastiques ministère de la culture et de la communication. frac picardie 13 novembre 2013 – 21 février 2014

Valerie Sonnier

Valérie Sonnier Sans titre (de la série Les morts minuscules) 35 x 45 cm, crayon, acrylique et cire sur papier, 2011 [sociallinkz]

Valérie Sonnier, The Drawer, Les Choses

Valerie Sonnier, sans titre

Parution ce 17 octobre du cinquième numéro de la revue de dessin monomaniaque, thématique, artisanale et transversale (dessins et contributions écrites d’une trentaine d’artistes contemporains), The Drawer.

En empruntant son thème à Georges Perec, le volume 5 de The Drawer se fait inventaire, catalogue, collection d’objets et de formes dessinées. Il accumule et assemble des choses plus ou moins ordinaires, plus ou moins quotidiennes, plus ou moins manufacturées, qui deviennent autre chose une fois sur le papier. On y reconnaîtra – ou pas – une rampe de skateboard, des cailloux, un trou, deux trous, trois trous, cinq chaises, une table. Il rassemble surtout une trentaine d’artistes, de designers et de créateurs qui excellent à révéler le pouvoir des choses, des formes et des objets.

Textes et dessins de Pierre Alféri, Anne Brégeaut, Champion Métadier, Claire Chesnier, Julien Colombier, David Coste, Matthew Darbyshire, Yona Friedman, Gilgian Gelzer, Benjamin Graindorge, Jana Gunstheimer, Andrea Heller, Arjan van Helmond, Benjamin Hochart, Maria Jeglinska, Pascale-Sophie Kaparis, Vincent Kohler, Briac Leprêtre, Jean-Paul Lespagnard, Mathieu Mercier, Amy O’Neill, David Porchy, Ugo Rondinone, Pia Rondé, Alexander Ross, Valérie Sonnier, Roland Stratmann, Ionna Vautrin.

Revue constituée de dessins et consacrée au dessin, The Drawer laisse la parole et le champ – presque – libre aux seuls « dessinateurs ». Terrain de jeu, d’expression et de création autour d’une thématique commune, The Drawer réunit semestriellement les dessins et les contributions écrites d’une trentaine d’artistes et de créateurs.

Lancement, accrochage, performance le jeudi 17 octobre, 18-21h. Galerie du jour agnès b. 44 rue Quincampoix, 75004 Paris.

Valerie Sonnier, sans titre

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Repeat, repeat, Valérie Sonnier, sans titre

Valérie Sonnier

Valérie Sonnier
Sans titre, 2012
Crayon et cire sur papier, 125 x 200 cm

(…) Il y a quelques mois, invitée à exposer à Vancouver, Valérie Sonnier conçoit un livre d’artiste à partir de son film, Des pas sous la neige. Très naturellement, celui-ci s’appelle tout simplement « Footsteps in the snow ». Sa conceptrice décide de camper délibérément à mi chemin entre film et livre. Celui-ci est une suite de photogrammes ; hors le titre, il n’y a pas de texte. Le livre agira comme un flipbook, un folioscope, un peu singulier il est vrai : le format de la publication, la dimension et le positionnement des photogrammes sur la page blanche nous invite bien plus à nous arrêter sur chaque image qu’à tenter de reconduire le mouvement filmique entre pouce et index. Fascinante est cette propension à passer d’un médium à l’autre, tout en jetant des passerelles entre eux. Sans encombre, ceci conduit Valérie Sonnier à filmer ce qu’elle a dessiné, à peindre ce qu’elle a filmé. Chaque médium possède ses qualités intrinsèques qui enrichissent le sens du propos, ce ressassement d’un univers clos, ouvert sur toutes ressouvenances, toutes réminiscences. Pour ses films réalisés dans la maison ou le jardin, Valérie Sonnier choisit le format super 8 mm ; c’est celui des films de familles. Lorsqu’elle dessine cette maison de la rue Boileau, choisissant un point de vue qui confère des allures de petit Trianon à l’austérité des arrêtes de la façade flanquée de grands arbres, aux balustrades classiques de la toiture en terrasse, elle opte pour un format panoramique proche du cinémascope. C’est par ailleurs ce point de vue qu’elle adopte pour première image de son film sous l’orage et la neige. Dès le moment où elle entreprend de dessiner la maison et le jardin sous tous leurs angles, ce n’est pas l’idée d’un story-board qui la conduit, mais les dessins, les uns tracés à la suite des autres, le donnent à l’imaginer. Valérie Sonnier travaille sur d’anciens cahiers de comptes, se fixant des cadrages parcimonieux ; son dessin est minutieux, précis, comme s ‘il s’agissait de consigner –et les marges comptables restent apparentes – le moindre mouvement du vent dans les broussailles. Ce que nous voyons nous est proche, comme instantané, alors que ces œuvres nous semblent lointaines et hors du temps.(…)

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Art Brussels 2913, les images (3)

Valérie Sonnier
Vous pouviez tout prendre chez moi sauf mes roses, 2007-2010
Acrylique et crayons sur toile, 130 x 130 cm.

Valérie Sonnier
Sans titre (sous la neige), 2010
Technique mixte sur papier, 26 x 20 cm.

Aglaia Konrad
Carrara Cut, 2013
Pigment digital print on fibaprint mate 280 gr and aluminium, (3) x 200 x 100 cm.

Raphaël Van Lerberghe
La cravate 2012
Bois, 30 x 50 cm

Raphaël Van Lerberghe
Madame est servie 2012
Crayon sur papier, 55 x 73 cm

Raphaël Van Lerberghe
Fréjus, 2011
Carte postale et graphite sur papier découpé, 21× 29,7 cm.

Raphaël Van Lerberghe
Période latino byzantine, 2012
Carte postale et graphite sur papier découpé, 21× 29,7 cm.

Raphaël Van Lerberghe
Caché trouvé, 2012
crayon, impression jet d’encre, papier collant et papier, 29,7 x 21 cm

Raphaël Van Lerberghe
Période latino byzantine, 2012
Carte postale et graphite sur papier découpé, 21× 29,7 cm.

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