Raphaël Van Lerberghe participe à « Bird’s eye view of… Regards sur une ville et une collection », exposition conçue par Benoît Dusart et organisée au musée des Beaux Arts de Charleroi. Cette exposition rassemble les oeuvres de quinze artistes contemporains belges et internationaux, en dialogue avec des oeuvres d’artistes de la collection du musée.
« Charleroi pourrait évoquer tout, écrit Benoît Dusart Un désordre fait de rouille et de cendres, rayonnant de mystères et d’ombres. Charleroi est un fantôme, une comptine cruelle, une insaisissable adolescente. Charleroi est un paradoxe qui tient bon. On a trop dit sur les collines, la sueur et les gens. On a dit et rien dit, on a fait des images. Elles s’agglutinent en un collage infini… Charleroi absorbe, assimile, se métamorphose. On vit à Charleroi comme on marche en forêt. En déséquilibre. Il faut être un peu savant, poète au quotidien, légèrement à distance. La ville est toujours ailleurs. De l’autre côté du miroir, elle tient pour elle le secret de la mélancolie.
La première oeuvre qui accueille le spectateur n’en est pas vraiment une. Il s’agit d’une carte postale représentant un paysage industriel. Elle doit dater de la première moitié du XXième siècle. On y devine la Sambre et les terrils. On y voit des usines. La légende est : Bird’s eye view of Charleroi.
Tous les éléments sont là. Pourtant, les pièces du puzzle résistent. Si toutes les usines se ressemblent, je sais n’avoir jamais vu celles-là. Même à Marchienne. Même à Roux. Je suis des yeux le parcours du chemin de fer. Je ne l’ai jamais connu lorsqu’il traversait Jumet et Gosselies. Ma mère vivait à Heigne et voyait en continu les trains débordant de charbon embrumer le paysage. En rentrant de l’école, elle s’effrayait de la mine patibulaire des « gueules noires ». Y pensait-elle parfois lorsque, sous ses pieds, ils creusaient des kilomètres de galeries ? Ma mère a regardé longtemps l’image. Elle ne se rappelle pas avoir vu la Sambre si bleue. »
Et Benoît Dusart précise à propos de la participation de Raphaël Van Lerberghe :
« Marcel Leborgne réalisa dans l’entre-deux-guerres des villas cubistes, des immeubles à appartements, une maternité de couleur rose qui synthétisait toutes les préoccupations esthétiques et sociales qui animaient l’époque. Beaucoup de ces bâtiments ont été détruits. L’immeuble de Heug, son chef d’oeuvre, tombe en ruine, des pavillons de la Cité de l’enfance sont aujourd’hui à l’abandon ou dénaturés par l’adjonction degarages ou de châssis en PVC. Parfois demeure la quincaillerie signée Gropius, des placages en bois précieux, quelques vitres bombées épousant les courbes généreuses de bâtiments conçus comme des paquebots. Charleroi, ville moderne, vu naître Bourgeois, Leborgne, Depelsenaire… Les rares archives accumulées sur Leborgne se partagent l’espace d’exposition avec des tableaux d’Emile Tainmont, Karel Maes, Fernand, Verhaegen, René Magritte. Six collages de Raphaël Van Lerbeghe font contre point à cet ensemble d’oeuvres. L’artiste a mis aussi en scène quelques images sur Leborgne. Le travail de Raphaël Van Lerberghe travail, d’une subtilité rare, occulte autant qu’il ne révèle. Lui demander de présenter ces documents se justifie en raison de la trace de plus en plus ténue laissée par l’architecte. »
Musée des Beaux Arts de Charleroi, jusqu’au 25 février 2012
Artistes représentés : Jacques Alsteen, Alain Bornain, Samuel Buckman, Andréas Bunte, Paul Casaer, Marie-Noelle Dailly, Félix de Boeck, Paul Delvaux, Audrey Finet, Agnès Geoffray, Jean De Lacoste, Marcel Leborgne, Karel Maes, René Magritte, Xavier Noiret-Thomé, Juan Paparella, Pierre Paulus, Mira Sanders, Emile Tainmont, Adrien Tirtiaux, Emmanuel Van Der Auwera, Hannelore Van Dijk, Raphaël Van Lerberghe, Fernand Verhaegen. Organisée par l’espace d’exposition Incise en collaboration avec le Musée des Beaux-Arts de Charleroi, dans le cadre de Charleroi 1911-2011.