Archives par étiquette : Capitaine Lonchamps

Capitaine Lonchamps, Nyctalope,les images (2)

Capitaine Lonchamps, nyctalope

Judex, 1917, de Louis Feuillade
Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, nyctalope

« Judex », 1917. Louis Feuillade
Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, nyctalope

« Barrabas », 1920 de Louis Feuillade
Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

«Dans un quartier populaire de Paris
Durant le trajet, l’élégant docteur Chaleck s’était transformé en un voyou inquiétant ».
« Juve contre Fantômas », 1913. Louis Feuillade.
Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

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Jacques Lizène, Capitaine Lonchamps, Emilio Lopez Menchero, Pol Pierart, FFWD – REW, aux Chiroux

FFWD / REW

D’hier à aujourd’hui , à Liège, en Belgique et ailleurs, un point de vue partiel et partial sur la vitalité de la vidéo, son histoire, ses pionniers et leurs héritiers.
Une carte blanche offerte à Dominique Castronovo et à l’atelier Vidéographie de l’ESAL-Académie Royale des Beaux-Arts de Liège.
Entre bandes historiques et travaux contemporains, l’exposition propose une déambulation à travers les époques, les formes et les artistes, notamment Liégeois, qui ont activement participé ou qui prennent part aujourd’hui au développement de cet art incontournable, hétérogène et constamment en mouvement qu’est la vidéo, entre arts plastiques et cinéma, entre projection et installation, entre narration et essais formels, entre YouTube et galeries d’art contemporain…

Les Chiroux
Ve. 25.01 > Sa. 02.03.2013
Du lundi au samedi de 13:00 à 18:00 / Entrée libre

Jacques Lizène, interruption de lumière

Jacques Lizène
Interruption de lumière.
1971, NB, sans son, 8 mm, projet vidéo transféré sur DVD, 3’39. Ed. Yellow.
La caméra filme en plan fixe la prise électrique du projecteur qui éclaire le lieu de tournage. Après un très long moment, une main se glisse dans le champ et retire la prise de courant. Noir. Le générique sur panneau, tapé sur une Remington portative précise : « L’auteur n’apprécie pas vraiment son film. S’il l’a réalisé c’est parce qu’il se méprise un peu de temps en temps… (peut-être) ». Lizène ajoute aujourd’hui que les points de suspension sont céliniens et le (peut-être) référence à Beckett.

Jacques Lizène, contraindre le corps

Jacques Lizène
Contraindre le corps à rester dans le cadre de l’image en promenade d’un côté à l’autre de l’écran.
1971, couleurs, sans son, 8 mm, projet vidéo transféré sur DVD, 4’28. Ed. Yellow.
Devant un mur de briques, une constante dans l’œuvre lizénienne, les contorsions du petit maître pour rester dans le cadre de l’image tandis que la caméra resserre peu à peu le champ. Le petit maître se promène latéralement, d’un bord à l’autre du cadre de l’écran, sans sortir du champ. Deux prises successives.

Pol Pierart, film n°12

Pol Pierart
Film n°12. Super 8 transféré sur DVD, NB, son. 2 min 27. 2005.
Ce film cite et renoue avec l’esthétique des débuts du cinéma, de Feuillade en particulier. Son synopsis est simple : L’auteur, réalisateur et interprète se filme, marchant de dos dans un jardin. Un carton commente : « On part à la conquête de l’univers et on ne se connaît pas de dos ». Tandis qu’il a ainsi le dos tourné, une singulière Musidora, en bonnet et collants noirs s’introduit chez lui, fouille, dérobe un petit squelette en plastique qu’elle cache dans son giron, et est finalement surprise par le propriétaire des lieux. Querelle, l’homme lui arrache ce qu’elle considère déjà comme son bien ; l’œil mauvais, il secoue le petit squelette comme un prunier. « La mort est tellement dynamique, qu’elle doit bien avoir quelque chose de vivant ». Cependant, Musidora secoue, elle, un ours en peluche. Naître, donner la vie, vivre, mourir, autant de désespérances.

rew- 5

Emilio Lopez-Menchero
Trying to be Balzac, vidéo-performance, 2002. 06’38″
Tenter d’être le « Balzac de Rodin », d’être à la fois le monument final tout comme ses diverses étapes de réalisation, dans une logique de démonstration, un film à rebours, une exhibition qui dénude le génial geste sculptural de Rodin, plus que le corps de l’artiste. C’est là que réside le sens de ce striptease. Se déshabillant, exhibant nudité et virilité, Lopez-Menchero démonte le geste de synthèse de Rodin qui sculpta d’abord le corps de l’écrivain avant de le couvrir de cette robe de bure.

Capitaine Lonchamps, Et où pourquoi comment où ?

Capitaine Lonchamps
Et où pourquoi comment où ?, vidéo, son, couleurs, production galerie Nadja Vilenne, 1996-2004, 10 min 50
Cagoulé de neige, embardant sa voiture sur de petites routes, Snowman désarticule le langage, répétant sans cesse et dans une fusion tonale des mots ces trois interrogations : « Et où ? Pourquoi ? Comment ? Où ? » Le film est absurde et inquiétant. Je repense dès lors aux performances du Cabaret Voltaire, à ces quelques phrases d’Hugo Ball qui écrit dans « La Fuite hors du temps » : « Nous étions tous sur place quand Janco arriva avec ses masques et aussitôt chacun de nous s’est empressé d’en choisir un. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange. Non seulement le masque appelait immédiatement un costume mais il dictait aussi une certaine façon de se mouvoir, prescrivant une gestuelle pathétique très particulière, frôlant même la folie. Sans avoir pu le prévoir le moins du monde, ne serait-ce que quelques minutes plus tôt, nous nous sommes mis à bouger, accomplissant les figures les plus bizarres, drapés et couverts d’objets inimaginables, chacun surpassant l’autre en invention »

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Capitaine Lonchamps, Nyctalope, les images (1)

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

« Tih-Minh », 1918, Louis Feuillade

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
Technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

Elisabeth Dollon sortant de la pension de famille M.Bourrat
« Le mort qui tue », Louis Feuillade, 1913.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
Technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope


– Du sang !
– Fandor ignorait que Cranajour venait de lui sauver la vie, mais il savait maintenant comment Jacques Dollon avait pu quitter le Palais de Justice.
«Le mort qui tue», Louis Feuillade, 1913.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Monsieur Pierre Navarre dans le rôle de Fantômas Générique de «Fantômas, à l’ombre de la guillotine» 1913. Louis Feuillade Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Monsieur Pierre Navarre dans le rôle de Fantômas
Générique de «Fantômas, à l’ombre de la guillotine» 1913. Louis Feuillade

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

Irma Vep !
« Les Vampires» . Episode 9. L’homme des poisons. 1916. Louis Feuillade.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

«Juve ! Je vous ai pris pour Fantômas Moi aussi, Fandor, je t’ai pris pour Fantômas ! Fandor, renseigné par Martialle, était venu se mettre à l’affût». «Juve contre Fantômas», 1913. Louis Feuillade. Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

«Juve ! Je vous ai pris pour Fantômas
Moi aussi, Fandor, je t’ai pris pour Fantômas !
Fandor, renseigné par Martialle, était venu se mettre à l’affût».

«Juve contre Fantômas», 1913. Louis Feuillade.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

«Fantômas venait chercher lui-même le document qu’il avait perdu chez Jacques
Dollon. Après la mort de son frère, on croira à un suicide».

«Le mort qui tue», Louis Feuillade, 1913.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm.

« Le rendez vous ». « Le mort qui tue », Louis Feuillade, 1913. Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

« Le rendez vous ».
« Le mort qui tue », Louis Feuillade, 1913.

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

Judex / Jacques de Trémeuse et Jacqueline
Judex, 1917, de Louis Feuillade

Capitaine Lonchamps
Neige, 2011
technique mixte sur photographie ancienne, 23 x 16 cm

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

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Capitaine Lonchamps, Nyctalope

Monsieur Pierre Navarre dans le rôle de Fantômas Générique de «Fantômas, à l’ombre de la guillotine» 1913. Louis Feuillade Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

Apollinaire et Max Jacob, Blaise Cendras ou Jean Cocteau, Louis Aragon et André Breton, Julien Gracq, René Magritte, André Delvaux, Robert Desnos, auteur d’une célèbre «Complainte » dédiée à ce « spectre aux yeux gris », tous, d’une manière ou d’une autre, ont rendu hommage à Fantômas, ce voyou exemplaire. Voici dès lors le Capitaine Lonchamps en bien belle compagnie, lui qui vient, en effet, d’enneiger Fantômas. Le geste tombe à point nommé puisque on célèbre en 2013 le centenaire des « Fantômas » réalisés par Louis Feuillade, génie du cinéma muet. C’est là comme un flocon sur le gâteau ; les hasards du calendrier font parfois bien les choses.

Nul n’ignore, parmi les amateurs de l’œuvre pataphysique du Capitaine Lonchamps, la proximité qui existe bel et bien entre le personnage de Fantômas et Snowman, ce «vampire feuilladien tacheté qui s’immisce et s’impose partout » (1), écrit Dominique Païni. Et cette parentèle transcende les lointains cousinages. Le rapprochement, aujourd’hui, n’aura jamais été aussi grand, le second s’introduisant dans l’entourage du premier, comme une ombre fantomatique tachetée de neige qui, sans pour autant tomber le sien, serait bien tenté de s’approprier le masque du premier. Quoi de plus normal d’ailleurs : ces deux personnages excellent dans l’art de disposer du visible, de le façonner, de le manipuler au travers d’identité multiples. Spécialistes de l’apparition fantomatique et de l’escamotage, ils sont aussi compagnons de la nuit, nyctalopes, comme le héros du même nom, contemporain de Fantômas, créé par Jean de la Hire, alias d’Adolphe d’Espie, et dont les aventures feuilletonesques parurent dans « La Dépêche » dès 1911. Faut-il rappeler que Nyctalope, lui aussi habitué aux métamorphoses, tient sa véritable identité secrète ?

Dès le générique du premier film de Feuillade, « Fantômas à l’ombre de la guillotine » (1913), apparaît le visage à nu de René Navarre, tel qu’on n’aura que rarement l’occasion de le voir dans la fiction. En surimpression se fondent, une à une, différentes physionomies de Fantômas, le docteur Chalek, le détective américain Ted Bob, Gurn le vieux magistrat, ou ce groom d’hôtel dont Lonchamps enneige le photogramme, mouchetant de flocons la casquette et la veste d’uniforme à brandebourgs du personnage. Fantômas est ainsi coiffé de neige, et fort subtilement détourné. Ce photogramme est le premier d’une singulière série : Snowman s’introduit dans un bon nombre de films désormais cultes de Louis Feuillade. Ainsi, dans « Juve contre Fantômas » (1913), il campe « l’élégant docteur Chalek, lui-même transformé en voyou inquiétant » (2), comme il sera Fandor surgissant de sa malle en osier alors que le commissaire Juve est aux prises avec le serpent, cet « exécuteur muet » aux ordres de Fantômas. Il s’introduit chez la sœur du peintre – céramiste Jacques Dollon, talonné par Fantômas lui-même, pressé de récupérer une lettre dénonçant la machiavélique machination fantômassienne du « mort qui tue » (1913) tout en s’apprêtant, au passage, à supprimer la détentrice du document. Snowman tient là le rôle d’un Apache. Il participe à la fusillade du quai de Bercy, scène culte de « Juve contre Fantômas », amplifiant la confusion régnante : « Juve, je vous avais pris pour Snowman ! ». « Moi aussi Fandor, je t’ai pris pour Fantômas ! »(3). Dans « Le mort qui tue », il est aussi l’un des protagoniste du « rendez-vous », photogramme dont René Magritte s’inspirera pour « L’assassin menacé » (1927).

On s’en souvient, dans la première livraison de « Distances » (1928), revue fondée par Paul Nougé, René Magritte écrira : « Tout le monde lui ressemble, mais ses yeux sont attentifs à la ville comme à la campagne. Il est le maître des souvenirs, il précise les apparences. Son rêve est infaillible » (4). Cet « homme au visage sans chemin » a aussi une identité : il est à la fois Nick Carter et Fantômas, le détective et le maître du crime confondus dans un même personnage. (5)

Snowman ne se contente pas des « Fantômas » de Feuillade, le voici dans l’un ou l’autre épisodes des « Vampires ». Au théâtre, dans « La bague qui tue » (1915) il est à la fois Guérande dans sa loge et Marfa Koutiloff sur scène, la danseuse qui endosse le rôle de la Vampire, comme un envol, un geste d’encre que Lonchamps ponctue de neige. A l’occasion du neuvième épisode, « L’homme aux poisons » (1916), il assume le rôle d’Eustache Mazamette, surprenant Musidora, celle-là même qui inspira Breton et Aragon, Musidora – Irma Vep, pour une fois masquée de blanc. Snowman est sur le tournage de Judex, se prenant, entre autres rôles, pour Jacques de Trémeuse serrant Jacqueline dans ses bras. Il s’impose dans « Barrabas » (1920), il y devient assassin, étrangleur. Il se mêle aux acteurs de « Tih-Minh » (1919). Il s’assied en compagnie de «L’homme sans visage » et converse avec lui (1919). Lorsque Snowman n’apparaît pas, Lonchamps prend le relais et enneige le décor : les réverbères que croisent Elisabeth Dollon à la sortie de la pension de famille Bourrat, un rideau dans « Barrabas », grêlé de flocons contrastant l’inquiétant tatouage « b.r.a.s » que « L’infirmière au tatouage » exhibe à la caméra, un rocher au pied du château de Barrabas, ou cette trappe d’une inquiétante étrangeté dans laquelle s’introduit la ténébreuse Musidora en baigneuse.

En une vingtaine de photogrammes, images de presse et promotionnelles, de celles que l’on épinglait à l’entrée des salles de cinéma, c’est tout le cinéma de Louis Feuillade que Capitaine Lonchamps enneige.

L’œuvre de Louis Feuillade est « un agencement affirmé d’épisodes courts et répétitifs indissociables d’un interminable emportement fictionnel » (6), écrit Dominique Païni. Je retrouve, là, le surgissement de toute l’œuvre neigiste du Capitaine Lonchamps, ces épisodes courts et répétitifs, en effet, où apparaissent, dans un emportement sans fin, des « Neiges » à l’agencement affirmé. Et Dominique Païni ajoute, à propos des Fantômas de Feuillade qu’ « ils reflètent ce qui fonde ontologiquement le cinéma : la discontinuité des photogrammes et la continuité du mouvement ». Dans le cas de Lonchamps, le mouvement existe bel et bien, mais il est suspendu : la neige ne tombe pas, épousant l’ascension du vide vers la périphérie. De « Neige » en « Neige », celle-ci est un mouvement saisi sans fin, dont on ne peut imaginer la chute, un mouvement saisissant.

Oui, entre Fantômas et Lonchamps, il y a des parallèles sidérants. « Dans la prison en spirale du feuilleton et de l’éternel retour, constatent Philippe Azoury et Jean-Marc Lalanne, Fantômas aura rencontré une forme de liberté extraordinaire, celles des gestes sans conséquences, esthétiquement libres, scandaleusement libérateurs » (7). On le sait, Lonchamps considère ses « Neiges » à la fois comme un cocon sans limite et une prison fragile, comme un éternel retour où se confondent passé, présent et futur, comme un geste libérateur, celui de peindre un rien sans relâche aucune, renouant ainsi avec la révolte supérieure de l’esprit. C’est tout aussi scandaleusement libérateur.

Cette allure feuilletonnesque prend un sens plus aigu dès l’apparition de Snowman dans l’œuvre du Capitaine Lonchamps. Aux premières intrusions dans des photographies de famille chinées ça et là, substitutions insolites et incongrues, apparitions de ce personnage, imperturbable comme peut l’être un pataphysicien, ont succédé de véritables séries, tirées d’illustrés et de périodiques tels Le Bon Point (amusant et instructif), Science & Voyage, Le supplément illustré du Petit Journal, Le supplément littéraire du petit Parisien ou même de nombreux photogrammes de cinéma. Depuis, les épisodes se succèdent rapidement, la production se densifie, les situations où Snowman interagit se multiplient ; c’est l’éternel retour d’un même qui ne l’est jamais totalement, un fantôme aux « identités compulsives » pour reprendre le terme de Max Ernst.

« Dans le feuilleton cinématographique, Louis Feuillade tisse constamment l’émouvant et le comique, constate Gilbert Lascault (8), le drame et le bouffon, le terrible et le drôle, l’aventure et le cocasse ». Oui, il en va de même de Lonchamps, enneigeant tout un monde, planche de périodique après planche de périodique. Bon nombre de celle-ci, on l’a dit, proviennent du « Petit Journal » ou du « Parisien », de leurs suppléments illustrés. C’est là aussi, comme dans l’ « Intransigeant » ou le « Petit Paris » que Louis Feuillade a trouvé son inspiration imaginant les scénarii des « Vampires ». Personnellement, je ne crois pas aux coïncidences. « Dans les journaux populaires, écrit encore Lascault, les faits divers deviennent des scènes supposées réelles et fantasmées, des actes transformés, et rêvés, des obsessions, des séquences tragiques et sensuelles… Ce sont des cas qui excitent l’imagination et modifient le regard, des anecdotes qui divertissent et troublent… Le « divers » des faits est le disparate, le composite des mœurs de l’époque ». A coups de récits et d’illustrations spectaculaires cette presse diffuse, comme l’écrit Balzac dans la Comédie Humaine, « des romans autrement mieux faits que ceux de Walter Scott, qui se dénouent terriblement, avec du vrai sang et non avec de l’encre ». De tous ces faits divers qu’il s’approprie lui aussi, Lonchamps ne fera pas que des faits d’hivers.

On dira Snowman ou Lonchamps – c’est selon – proches de Fantômas, je les trouve tout aussi familiers des « Vampires », peut-être même plus. « Les Vampires, écrit encore Lascault, sont le nombre et l’innombrable. Ils sont légion. Se déguisent en notables, en hobereaux, en notaires, en religieux dévoués, en policiers, en magistrats… ». En fait, ils incarnent la violence de la modernité, ou peut-être la violence moderne. « Ils envahissent l’inconscient collectif, poursuit Lascault. Ils possèdent l’âme de l’époque, ils l’ébranlent, l’émeuvent, la surexcitent, l’agitent. Ils fascinent et menacent. Ils provoquent et séduisent. Ils égarent, ils envoûtent. Ils troublent. Ils fouillent et taraudent l’âme, ils la percent et la creusent ». Ce sont autant de sentiments qui habiteront le spectateur des « Neiges » obsessionnelles, monomaniaques, de Lonchamps. Toujours à propos des « Vampires », Gilbert Lascault a cette juste formule lapidaire : « Ce sont les frères et sœurs de l’Effroi » déclare-t-il. Ô combien s’applique-t-elle aussi à Lonchamps. Au delà du saugrenu, de l’incongru, de l’insolite, de la pensée qui se surajoute à l’image mouchetée de neige, de la poétique qui en découle, Capitaine Lonchamps, nyctalope, investit le champ de la nuit, des peurs et de l’inquiétude, de l’effroi et de la stupéfaction, ce masque qui transfigure la physionomie marquée par la surprise, l’ébahissement ou l’effarement.

Et 1915, les studios Gaumont éditent une affiche en tout point remarquable, destinée à promouvoir les « Vampires ». On y voit le visage cagoulé d’Irma Vep – Musidora. Elle porte un étrange collier, en forme de point d’interrogation. Cependant cette étrange boucle de l’étrangle pas ; c’est plutôt le spectateur qui est menacé. Le point d’interrogation ponctue quatre questions : Qui ? Quoi ? Quand ? Où ? Découvrant cette affiche à la redoutable efficacité, je repense à la performance de Lonchamps filmée en 1996 sur les routes ardennaises. Cagoulé de neige, embardant sa voiture sur de petites routes, Snowman désarticule le langage, répétant sans cesse et dans une fusion tonale des mots ces trois interrogations : « Et où ? Pourquoi ? Comment ? Où ? » Le film est absurde et inquiétant. Je repense dès lors aux performances du Cabaret Voltaire, à ces quelques phrases d’Hugo Ball qui écrit dans « La Fuite hors du temps » : « Nous étions tous sur place quand Janco arriva avec ses masques et aussitôt chacun de nous s’est empressé d’en choisir un. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange. Non seulement le masque appelait immédiatement un costume mais il dictait aussi une certaine façon de se mouvoir, prescrivant une gestuelle pathétique très particulière, frôlant même la folie. Sans avoir pu le prévoir le moins du monde, ne serait-ce que quelques minutes plus tôt, nous nous sommes mis à bouger, accomplissant les figures les plus bizarres, drapés et couverts d’objets inimaginables, chacun surpassant l’autre en invention » (9).

Monsieur Pierre Navarre dans le rôle de Fantômas Générique de «Fantômas, à l’ombre de la guillotine» 1913. Louis Feuillade Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

« Le rendez vous ». « Le mort qui tue », Louis Feuillade, 1913. Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

1 Dominique Païni et Jean-Michel Botquin, Capitaine Lonchamps, Le Bon Point amusant, éditions l’Usine à Stars, 2010.

2 Dans le film. Texte du carton correspondant à la scène.

3 Dans le film. D’après le texte du carton correspondant à la scène.

4 Les trois numéros de la revue Distances, parus de février à avril 1928, sont reproduits dans Marcel Mariën, L’Activité surréaliste en Belgique, Bruxelles, Lebeer Hossmann, 1979, p. 160- 174.

5 Clio Elizabeth de Carvalho Meurer, René Magritte, les proses de Distances, dans Interfaces 29, 2009-2010.

6 Dominique Païni, Fantômas nous appartient. Préface à Philippe Azoury & Jean-Marc Lalanne, Fantômas, style moderne, Centre Georges Pompidou/ Les cinémas – Yellow Now, 2002. Il nous faut remercier Dominique Païni. C’est en effet sa collection personnelles de photogrammes de Louis Feuillade que le Capitaine Lonchamps a enneigé.

7 Philippe Azoury & Jean-Marc Lalanne, Fantômas, style moderne, Centre Georges Pompidou/ Les cinémas – Yellow Now, 2002.

8 Gilbert Lascault, Les Vampires de Louis Feuillade, Yellow Now Côté films #12, 2008.

9 Hugo Ball, La fuite hors du temps, journal 1913-1921, traduit de l’allemand par Sabine Wolf, Rocher, 1993.

«Juve ! Je vous ai pris pour Fantômas Moi aussi, Fandor, je t’ai pris pour Fantômas ! Fandor, renseigné par Martialle, était venu se mettre à l’affût». «Juve contre Fantômas», 1913. Louis Feuillade. Capitaine Lonchamps Neige, 2011 technique mixte sur photographie ancienne, 18 x 24 cm

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Langohr, Lonchamps, Pierart, Sonnier, quatre vernissages ce jeudi 17.01

invitations 17.01

Capitaine Lonchamps, Nyctalope

Sophie Langohr

Pol Pierart

Valerie Sonnier

exposition du 18 janvier au 03 mars 2013 – Vernissages le jeudi 17 janvier 2013 à 19h.

Ils sont quatre à exposer en ce début d’année 2013, et pourtant il ne s’agit pas d’une exposition collective. Chacune de ces expositions monographiques a été conçue comme telle, quelle que soit sa géométrie. Chacune est une appproche d’un univers singulier et bien circonscrit ; ce sont des univers particuliers, identifiés comme tels. Les proposer ensemble tient aux dialogues qui ne manqueront pas de s’établir entre les unes et les autres, aux lectures transversales qui ne manqueront pas de se dégager. Il sera question de l’image cinématographique, c’est sûr. Capitaine Lonchamps enneige le cinéma de Feuillade ; Pol Pierart réalise des films super 8, Valerie Sonnier en fait autant, toute l’écriture de son travail est teintée de cette approche cinématographique ; Sophie Langohr explore le concept d’égérie. Il sera question d’un incessant voyage entre passé et présent, dans une continuelle reconsidération de la temporalité. Il sera question d’apparitions fantômatiques, de métamorphose des physionomies, de transfiguration, de retour à l’enfance ou aux sources de la modernité. Il sera question de neige sous les pas, de massifs de roses infranchissables, du bonheur, du malheur, de la vie, de la mort, de l’angoisse, en quatre visions du monde très personnelles, quatre oeuvres charpentées, où les média se répondent, où prédomine l’immédiateté du noir et blanc, où le sens mène à une foule de réflexions.

L’exposition de Capitaine Lonchamps célèbre le centenaire des Fantômas de Louis Feuillade (1913), celle de Pol Pierart est accompagnée d’une nouvelle publication de photographies aux Editions Yellow Now, « Angoisse cela te regarde ? », celle de Sophie Langohr est une preview d’un projet ambitieux que l’artiste proposera dès le début du printemps au Grand Curtius à Liège, celle de Valérie Sonnier amplifiera le propos approché lors de sa précédente et récente exposition à la galerie, « Faire le photographe », et sera l’occasion d’aborder plus largement son univers personnel, entre souvenirs intimes et mémoire collective.

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Capitaine Lonchamps, Comptoir du Livre, Liège

Au Comptoir du Livre, en Neuvice, à Liège, ces deux Neiges du Capitaine Lonchamps, dans le cadre de l’exposition « Addinités éditrices, carte blanche à l’Usine à Stars / galerie Nadja Vilenne »

CAPITAINE LONCHAMPS
Neige (un looping)
[2012]
Technique mixte sur imprimé, 30 x 20 cm.

CAPITAINE LONCHAMPS
Neige
[2012]
Technique mixte sur imprimé, 30 x 20 cm.

Ces deux « Neiges » du Capitaine Lonchamps illustrent le livre d’André Stas, Les Nègres du Kilimandjaro, journal de voyage, publié au Crayon qui tue, en 2012.
Les errances et les intimités d’un personnage multiface : exactement 585 faces dont les noms sont révélés, avec 749 références, en fin d’ouvrage, dans la liste des « nègres ». Digne de l’Oulipo.

Un volume de 144 pages, sous couverture à rabats, avec gaufrage. Neuf planches en pleine page.
— 33 exemplaires de tête non rognés, au format 16 x 22 cm, dont 3 sur japon retrouvé et 30 sur hollande Van Gelder, couverture Arches ivoire.
— 179 exemplaires sur vergé gris, au format 15,5 x 21,5 cm, couverture noire.

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Benjamin Monti, Capitaine Lonchamps, Marie Zolamian, Ars Justitia

Benjamin Monti, Capitaine Lonchamps et Marie Zolamian participent à l’exposition « Ars Justitia (l’art actuel s’invite au nouveau palais de Justice de Liège) », à l’occasion de l’inauguration des nouvelles extensions du Palais, dessinées par l’Atelier d’Architecture du Sart Tilman, et de la clôture de l’année du bicentenaire du Barreau de Liège.

Pour cette exposition organisée par Eric Therer, Benjamin Monti et Capitaine Lonchamps exposent côte à côte. Pour l’occasion, Benjamin Monti a conçu une lecture de ses propres dessins,  tous tracés dans les marges d’un cours de droit anonyme et manuscrit, en relation avec une série d’œuvres du Capitaine Lonchamps. En rebonds du sens et du motif, six vitrines confrontent leurs images conjointes. Marie Zolamian a choisit, quant à elle, de remettre en perspective  les six bustes anonymes de la Maison Renkin, ces bustes de fonte, de vrais ou de faux jumeaux, comme une doublure du Monde, trois fois deux bustes ou deux fois trois postures, qu’elle exhuma du grenier de la maison communale de Flémalle, leur conférant une nouvelle identité au sein de la communauté.

Vernissage le jeudi 7 juin de 18 à 20h
Exposition accessible le vendredi 8, de 8 à 18h et le samedi 9 juin, de 10 à 18h

Capitaine Lonchamps
Neige, 2010. Technique mixte sur image trouvée, 36 x 26 cm

Benjamin Monti
Sans titre, « Sucession ab intestat », encres sur papier recyclé, 14 x 23 cm, 2009, encre sur papier, 14 x 23 cm

Capitaine Lonchamps, Kamarama à Bruges, les images

Capitaine Lonchamps, Neige (Le Sanguinaire, tigre mangeur de Snowman),  2009, Technique mixte sur toile trouvée, 145 x 120 cm

Capitaine Lonchamps, Neige, 2011 (Snow – varan), Technique mixte sur objet trouvé, 320 x 100 x 90 cm.

Capitaine Lonchamps, Neige, 2011 (Snow – émeu), Technique mixte sur objet trouvé, 175 x 130  x 60 cm.

Capitaine Lonchamps, Neige 2012, Technique mixte sur imprimé, 25 x 34 cm

Capitaine Lonchamps, Neige 2012, Technique mixte sur imprimé, 18 x 24 cm

Capitaine Lonchamps, Neige 2012, Technique mixte sur imprimé, 17 x 13 cm

Capitaine Lonchamps, Neige 2012, Technique mixte sur imprimé, 14 x 9 cm

 

 

 

Capitaine Lonchamps et les Nègres du Kilimandjaro d’André Stas au Comptoir

Ce samedi 5 mai de 17 à 19h, André Stas présentera son dernier livre

LES NÈGRES DU KILIMANDJARO
Journal de voyage
suivi de Ce qu’en pense Yak Rivais et deLe Pot aux roses
avec neuf Neiges de Capitaine Lonchamps

paru au Crayon qui tue,
en présence de Thieri Foulc, éditeur et de Capitaine Lonchamps, illustrateur

Les errances et les intimités d’un personnage multiface : exactement cinq cent quatre-vingt-cinq faces dont les noms sont révélés, avec sept-cent quarante-neuf références, en fin d’ouvrage, dans la liste des « nègres ».
Digne de l’Oulipo.Un volume de 144 pages, sous couverture à rabats, avec gaufrage.
Neuf planches en pleine page.
33 exemplaires de tête non rognés, au format 16 x 22 cm, dont 3 sur japon retrouvé et 30 sur hollande Van Gelder, couverture Arches ivoire.
179 exemplaires sur vergé gris, au format 15,5 x 21,5 cm, couverture noire.

 

Capitaine Lonchamps, Kamarama, à Bruges

A Bruges, Capitaine Lonchamps participe au Kamarama du dessinateur Kamagurka.
Humoriste et dessinateur de presse (Humo, Charlie Hebdo, Hara-kiri, Titanik, etc), peintre, sculpteur, chanteur, cinéaste, Kamagurka a rassemblé pour ce festival d’été des artistes qui l’inspirent ou le fascinent, parmi lesquels Captain Beefheart, Emile Salkin, Francis Picabia, Fred Bervoets, George Condo, George Grosz, Georges Ribemont-Dessaignes, J.J. Grandville, James Ensor, Jan Fabre, Jeff Olsson, Jeroen Henneman, Kati Heck, Lucebert, Luc Tuymans, Marcel Duchamp, Markus Lüpertz, Max Ernst, Otto Dix, Pablo Picasso, Paul Joostens, René Daniëls, René Magritte, Rinus Van de Velde, Roland Topor ou Wim Delvoye. Du 1 mai au 1 août, divers lieux à Bruges.

Capitaine Lonchamps, Neige (Le Sanguinaire, tigre mangeur de Snowman),  2009, Technique mixte sur toile trouvée, 145 x 120 cm

Capitaine Lonchamps, Neige 2012, Technique mixte sur imprimé, 29 x 26 cm