Archives par étiquette : John Murphy

John Murphy, Such are the vanished coconuts of hidden Africa, les images (3)

John Murphy

John Murphy

…(Vela), 2002-2003.
oil on canvas, in two parts, (2) x 230 x 169 x 3 cm

John Murphy

John Murphy

On the Way… Are you dressed in the map of your travels ?, 2003
Stuffed parrot, post card and stand. Parrot: 24 x 32 x 23 cm. Stand: 83 x 73x 3,5 cm Framed postcard: 86,5 x 74,5 x 3,5 cm.

John Murphy

Movement of the internal being (The Joseph Conrad serie), 2003
Etching on offset and serigraphy (text), 85 x 101 cm. Ed. of 2.

 

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John Murphy, Such are the vanished coconuts of hidden Africa, revue de presse

Lu dans H.ART l’article de Colette Dubois

H.ART

John Murphy : Voyage dans l’espace entre mot et image

La première exposition de John Murphy (°1945), un artiste britannique majeur, à la galerie Nadja Vilenne s’intitule ‘Such are the Vanished Coconuts of Hidden Africa’. Les peintures, les gravures, les installations, les très petits et les très grands formats, les oeuvres très récentes ou plus anciennes forment une nouvelle constellation toute entière axée sur l’idée du voyage conçu comme un défrichement d’espaces inconnus, souvent nichés au coeur de chaque être.

Colette DUBOIS

Le travail de Murphy est constitué d’emprunts utilisés à la manière des ready-mades (cartes postales, affichettes, objets) ou transformés (recadrés, modifiés dans le format, le support ou le médium ). A ces éléments trouvés, l’artiste associe un fragment de texte ; ces quelques mots, souvent partie de l’oeuvre, en deviennent le titre. Ils produisent un jeu dialectique dans lequel l’association, l’intervalle et l’ellipse – trois opérations typiquement cinématographiques et plus particulièrement liées au montage – ont un rôle primordial. Ce qui se passe dans l’entre-deux de l’image et des mots – cette zone spatiale et temporelle où se crée le sens – est précisément ce qui intéresse l’artiste.
L’intervalle, comme l’ont remarqué les cinéastes Dziga Vertov et Jean-Luc Godard ou encore le philosophe Gilles Deleuze, est une affirmation du présent, celui du regardeur tout autant que celui du créateur. C’est donc d’un présent variable qu’il s’agit et qui est toujours à rejouer dans le moment du regard ; le temps – un temps anachronique et toujours renouvelé – devient un matériau formel au même titre que l’image, le papier ou la toile. Chez Murphy, ces intervalles entre mots et image sont présents dans chaque pièce et ils se multiplient dans le rapport entre les différents travaux de l’exposition. En effet, l’artiste envisage chaque présentation comme une nouvelle configuration des oeuvres qui deviennent alors chacune le fragment d’une nouvelle constellation : tout se passe entre l’image et son titre, la relation aux autres images/titres dans un espace qui devient oeuvre à son tour.

‘Such are the Vanished Coconuts of Hidden Africa’ s’organise comme une suite logique à ‘Of Voyage, Of Other Places’, une exposition dans laquelle les pièces de Murphy s’imbriquaient dans celles de la collection du Musée de Trondheim (Norvège). Les deux oeuvres nouvelles, de très grande taille, représentent un rhinocéros, elles sont présentées face à face. Les images, recadrées verticalement, ‘sortent’ du film de Federico Fellini ‘E la nave va’. Dans l’une, le pachyderme se laisse emporter dans une barque (‘Sunk into solitude’), dans l’autre, il est soulevé par des cordes (‘E la nave va’). En contrepoint affirmé, la grande peinture intitulée ‘The Deceptive Caress of a Giraffe’ ne laisse voir que les seules oreilles de l’animal ; en contrepoint discret, une enveloppe adressée à l’artiste porte un timbre représentant deux rhinocéros. Les ellipses, la fragmentation, les recadrages répondent à la puissance poétique des titres. Mais la propriété singulière des éléments empruntés consiste aussi à transporter avec elles tout ce qui appartient à leur source. Ainsi, les deux eaux-fortes représentant le trois-mâts ‘Joseph Conrad’ réfère évidement à un des plus importants écrivains anglais du 20ème siècle, mais aussi à sa qualité marin et sans doute à son roman, ‘Au coeur des ténèbres’, l’odyssée d’une lente remontée du fleuve Congo de la civilisation à la plongée dans une nature dense et inquiétante. La toile ‘…(Vela)’ renvoie à la constellation homonyme, partie de l’immense constellation du ‘Navire Argo’, lequel, dans la mythologie grecque, emportait Jason et ses compagnons à la recherche de la Toison d’or…
Cette remarquable exposition de John Murphy nous invite à voyager dans les intervalles qu’il ouvre pour nous, c’est-à-dire aussi en nous-mêmes.

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John Murphy, Such are the vanished coconuts of hidden Africa, les images (1)

John Murphy

John Murphy
Such are the vanished coconuts in hidden Africa (The Joseph Conrad serie), 2003
Etching on offset and serigraphy (text), 85 x 101 cm. Ed. of 2.

John Murphy

John Murphy

John Murphy
The Deceptive Caress of a Giraffe, 1993
Oil on canvas, 264 x 168 cm.

John Murphy

John Murphy

John Murphy
E la nave va, 2013
Photo work, 239 x 179,5 cm.

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Art Brussels, les images (3)

Art Brussels

John Murphy

John MURPHY
On the silky lining of the voyage, 2008
Picture post card, pen and ink on board, 85,5 x 63,5 cm

Sophie Langohr

Sophie Langohr

Sophie LANGOHR
Saint Matthieu par Gérémie Geisselbrunn (1595 – 1660) photographié comme Dimitris Alexandrou par Errikos Andreou, de la série Glorious Bodies, photographies noir et blanc marouflées sur aluminium,
2 x (33 x 45 cm), 2013 – 2014

Emilio Lopez Menchero

Emilio LOPEZ-MENCHERO
Trying to be Cadere, de dos (avec barre index 04 code B 12003000 – d’après « André Cadere 1974 », de B.Bourgeaud), photographie NB marouflée sur aluminium, 82 x 130 cm, 2013

Suchan Kinoshita

Suchan Kinoshita

Suchan KINOSHITA
Archive diagonale, 2014
Technique mixte

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Art Brussels 2014, les images (1)

Aglaia Konrad

Aglaia Konrad

Aglaia KONRAD
Iconocopycity, 2011
Copies laser marouflées sur mur, dimensions suivant installation Ed. 3/3

Aglaia Konrad

Aglaia KONRAD
Boeing over, 2003-2007
Photographie NB, impression sur papier baryté, marouflé sur aluminium 32 x 48 cm, Ed. 5/5

Jacques Lizène

Jacques Lizène

Jacques LIZENE
Sculpture nulle 1980, art syncrétique 1964, l’interrogation génétique, 1971, mettre n’importe quoi sur la tête, 1994, en remake 2011
Sculpture africaine trouvée, fougère artificielle, photocopie, acrylique, 180 x 30 cm

Aglaia Konrad

John Murphy

John MURPHY
Deep in the Unknow (The Joseph Conrad serie), 2003
Etching on offset and serigraphy (text), 85 x 101 cm. Ed. of 2.

Jacques Lizène

Jacques LIZENE
Personnage assis dans le coin du cadre, 1971. Deux diapositives, dont la diapositive titre.
Edition 5/5

Jacques LIZENE
Perçu non perçu 1973, Art de Banlieue, banlieue de l’art 1973, Petit maître regardant le bord de la photo, remake 1979.
Photographie NB vintage, retouchée à l’encre. 13 x 18 cm. Projet de carton d’invitation pour la présentation de « Quelques séquences d’art sans talent ».

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John Murphy, The Song of the Flesh or The Dog who Shits (Lyra)

ART BRUSSELS PREVIEW

John Murphy
The Song of the Flesh or The Dog who Shits (Lyra)
1990-1994
Huile sur toile, 264 x 198,5 cm

La toile est sombre, espace infini d’un monochrome moutonné. Elle fait partie d’une série de trois peintures de John Murphy, qui toutes représentent le dessin d’un chien sous le schéma d’une constellation. Le chien est en position accroupie, dos arqué, queue tendue et dirigée vers l’arrière. Nul ne peut douter de son activité : il est en position de défécation. S’il était nécessaire de le préciser, le titre de l’œuvre est sans appel : c’est le chien qui chie, « the dog who shits ». Dans l’espace infini de la toile, on discerne quelques cercles de divers diamètres, une constellation ; c’est du moins ainsi que l’homme se les représente les reliant par des lignes imaginaires, traçant ainsi sur la voute céleste des figures qui lui permettent de les nommer. Le mot chien désigne d’ailleurs l’animal aboyant – ou chiant en l’occurrence – et une constellation céleste, deux même, le Grand Chien et le Petit, Canis Major et Minor. Ici, dans ce tableau, il s’agit de la Lyre. Dans les deux autres toiles de la série, ce sont « Pictor », le chevalet ainsi que le Poisson Volant, « Volans ».

Le titre de l’une des deux autres toiles de cette série, toile conservée à la Tate Modern à Londres, fait explicitement référence à une nouvelle de Kafka : « Les recherches d’un chien », « Investigation of a dog ». Le narrateur anonyme, un chien, y raconte un certain nombre d’épisodes de son passé faisant appel à des méthodes quasi scientifiques et rationnelles pour résoudre les questions fondamentales de son existence, questions que la plupart de ses pairs se sont contenté de laisser sans réponse. Dans le texte de Franz Kafka, la communauté canine y est à l’image de la communauté humaine, comme, sans doute, le chien, dans les tableaux de John Murphy symbolise l’homme contemplant, qui s’efforce de nommer et de comprendre le monde au delà de lui-même. Oui, il y a un appel à la contemplation, celle de la voute céleste tout comme celle de la toile sans limites. On décèle là un fondement de la pratique artistique de Murphy qui vise à donner du sens a l’espace qui existe entre le mot et l’image, sans précisément d’ailleurs en imposer un particulier, mais en laissant le regardeur contemplant, entre perception, quête de sens et souvenirs de choses rencontrées qui façonnent la perception d’autres choses à voir. Tout comme le héros canin de Kafka pourrait être Kafka lui-même, nous sommes comme les chiens des peintures de John Murphy : face au cosmos, dans un continuel rebond entre la perception de celui-ci, sa connaissance, les mots qui nous permettent de le nommer, la chose en soi et son image.

Le titre de la seconde toile est plus singulier encore : « le chien circoncis ». Cette fois c’est à Shakespeare que Murphy fait appel et plus précisément au suicide d’Othello. « I took by the throat the circumcised dog. And smote him, thus. (Stabs himself )». Les dernières paroles d’Othello sont une réflexion sur son identité dont il ne peut supporter la dualité. Ainsi Othello qui a crut être un noble émissaire de Venise contre les Turcs a massacré la plus noble des Vénitiennes. Le voici obligé de reconnaître en lui-même le chien circoncis qu’il croyait avoir tué et de se séparer par le suicide de la part bestiale qu’il a découvert en lui : « Je pris à la gorge le chien circoncis. Et le féris aini. (Il se poignarde) ». Le chien, ici encore, nous rappelle notre condition humaine.

Les chiens de John Murphy marchent, dorment, sont en arrêt, reniflent. Celui-ci a l’attitude la plus triviale, celle d’un chien qui chie. C’est, déclare Murphy, sans une touche d’humour, le chant de la chair sous la lyre, « the song of the Flesch », première partie de ce titre en diptyque. Ce chien déféquant me rappelle ces mots d’Aragon, publié dans le Traité du style : « Faire en français signifie chier. Exemple : Ne forçons pas notre talent, Nous ne fairions rien avec grâce ». Déjà en 1978, le critique Michael Newman écrivait à propos des peintures de John Murphy « qu’elles concernaient les limites, les limites entre l’art et la vie, d’une manière qui, pris au sérieux, devient inquiétante. L’art devient alors, ajouta-t-il, le lieu où la solitude, le désir irréalisable et la mort ne peuvent plus être oubliés ». Murphy, représentant ce chien dans une attitude somme toute fort naturelle, cherche à nous rappeler que nos vies restent liées à notre environnement physique, peu importe à quel point nous tentons de transcender nos horizons. Certes, pour reprendre les théories de Plotin tout peut-être contemplation. « Ainsi, écrit le philosophe tout dérive de la contemplation, les êtres véritables, et les êtres que ceux-ci engendrent en se livrant à la contemplation et qui sont eux-mêmes des objets de contemplation soit pour la sensation, soit pour la connaissance ou l’opinion ». Il n’empêche que nous sommes aussi des être conscients de notre finitude, de nos dualités, de nos limites physiques. N’est-ce pas Giorgio Agamben qui rendant hommage à Gilles Deleuze rappelle cette leçon où, développant la théorie plotinienne de la contemplation, le philosophe déclara : « tout être est une contemplation, oui même les animaux, mêmes les plantes. Sauf les hommes et les chiens qui sont des animaux tristes. Vous direz que je plaisante, que c’est une plaisanterie. Oui, mais même les plaisanteries sont des contemplations… ».

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