– Liège (B), Cartoon laws of Physics, en duo avec Loic Moons, galerie Nadja Vilenne, du 21 septembre au 29 octobre
Werner Cuvelier
– Bruxelles (B), Art on Paper, galerie Nadja Vilenne, du 5 au 8 ocotbre 2023
Alevtina Kakhidze
– Vaduz (principauté du Liechtenstein), Parliament of plants II, Kunstmuseum, jusqu’au 22 octobre 2023
– Zwolle (Nl) Kaleidoscope of (H)istories – art from Ukrainen, museum De Fundatie, Zwolle 14 octobre – 8 janvier 2024.
Aglaia Konrad
– Mendrosio (CH), What Mad Poursuit, Aglaia Konrad, Armin Linke, Bas Princen, Teatro dell’architettura, du 7 avril au 22 octobre 2023
– Montreal (Ca), The Lives of Documents - Photography as Project, Canadian Centre for Architecture Quebec, 3 mai – 3 mars 2024
– Ostende (B), Kammer Spiel, MuZee, dans le cadre de la deuxième biennale de la photographie d’Ostende, du 16 septembre au 12 novembre 2023
– Hasselt, This is Us, Z33, du 1 octobre au 18 février 2024
Jacques Lizène
– Louvain-la-Neuve (B), The Grid, trame, grille, matrice, musée L, du 5 octobre au 11 février 1024
Emilio Lopez-Menchero
– Gent (B), Hôtel Corona, acquisitions de la Vlaamse Gemeenschap, SMAK, du 27 mai au 5 novembre 2023
Loic Moons
– Liège (B), Cartoon laws of Physics, en duo avec Michiel Ceulers, galerie Nadja Vilenne, du 21 septembre au 29 octobre
Sandrine Morgante
– Liège (B), You Gold, galerie Nadja Vilenne, du 21 septembre au 29 octobre
– Bruxelles (B), Art On Paper, galerie Nadja Vilenne, du 5 au 8 ocotbre 2023
Benjamin Monti
– Bruxelles (B), Gratte-Papiers, Le Salon d’art, du 2 octbre au 10 novembre 2023
John Murphy
– Luxembourg (L), Deep Deep Down, présentation de la collection, MUDAM, du 30 juin au 18 février 2024
– Vienna (Austria) History Tales. Fakt und Fiktion im Historienbild, Gemäldegalerie der Akademie der bildenden Künste Wien, 27septembre 2023 – 26 mai 2024
Johan Muyle
– Paris (F), Les Heures sauvages II. Anarkhè-exposition, Centre Wallonie Bruxelles, du 13 au 29 octobre 2023
Valérie Sonnier
– Brussels, Around Video Art fair, 29-30 septembre – 1er octobre 2023
– Bruxelles (B), Art On Paper, galerie Nadja Vilenne, du 5 au 8 ocotbre 2023
Il faut encore voir, parmi les œuvres intéressantes, les dessins et la vidéo de Valérie Sonnier qui montrent l’image réelle ou rêvée de la maison où elle a grandi. Vide de ses habitants, envahie par la végétation, ouverte aux vents et aux fantômes. Fantasme ou réalité ? La vision qu’on a des choses est plus vraie que le réel qui nous échappe toujours. L’image est une manière de modéliser le monde autour de nous, selon nos affects. Une image pas moins « vraie » que la science ou une objectivité impossible. (Guy Duplat)
Valérie Sonnier’s (Fr) drawings and films also evoke ‘the house inside her’. It is her childhood home with its untended garden, a place ‘destined for demolition by the property developers, which obstinately seals her secrets, those of her nature and of her remembrances’. In this way Valérie Sonnier’s brilliant drawings become visualisations of the passing of time, of her life with its secrets and lies, bedrocks of any existence, but also of death. It is the uninterrupted course of an experience, which contains the substratum of another life. A past life that she tries to capture by video, like a ghost wandering around this abandoned house. As though haunted by the memory, all her works have a ‘worrying strangeness’ (Unheimliche by Sigmund Freud). It embodies an auratic form ‘which is situated between an in front of and an inside.’ The visitor is in an uncomfortable yet intense position ‘which defines our entire experience, when what looks back at us in what we see is revealed to us. (Carine Fol)
SP XXII, Connexions, Dolmens et menhirs de France, 1975
Que celle-ci soit menée loin de chez soi ou pas, l’itinérance est une façon très concrète de plonger dans un réel qui nous est par essence exotique, en ce qu’elle nous est étrangère. L’itinérance stimule l’imagination, elle provoque les écrits de voyage, elle convoque la cartographie, elle suscite l’élaboration de listes et inventaires, tous protocoles qui s’inscrivent dans la pratique artistique de Werner Cuvelier. Nous avons déjà évoqué le SP XVI, Buitenverblijven, cette randonnée suburbaine à la découverte des façade de bordels de la région gantoise ainsi que la performance du SP XII (oui, la déambulation est aussi performative) menée en1974 à Las Hortichuelas dans la province espagnole d’Almeria. Werner Cuvelier projette, toujours en 1974, de tracer une route romane de Soignies en Hainaut à Lérida en Espagne (1), un projet qu’il ne réalisera finalement pas. Ces projets déambulatoires sont souvent estivaux ; ils s’inscrivent dans la vie quotidienne de l’artiste : durant l’été 1975, Werner Cuvelier part à la découverte des dolmens et menhirs de France. Un écrit de voyage, annonce-t-il, mais composé de dessins et de photographies personnelles, projet établi sur un protocole très précis. A l’invitation de Jan Vercruysse, il exposera ce SP XXII, intitulé Connexions en 1976 à la galerie Elsa von Honolulu Loringhoven (2) , ainsi qu’à la galerie l’A, à Liège, en 1981(3). L’exposition liégeoise s’intitule Connexions & Relaciones : Werner Cuvelier y expose en effet un second projet de même nature, le SP XXXVI, qu’il conçoit durant l’été 1978, un itinéraire tracé au travers de la péninsule ibérique, une mise en relation, Relaciones, de dix-sept lieux raccordés. Ainsi il va, il court, il cherche. Que cherche-t-il ? On citera bien volontiers Charles Baudelaire : À coup sûr, cet homme, tel que je l’ai dépeint, ce solitaire doué d’une imagination active, toujours voyageant à travers le grand désert d’hommes, a un but plus élevé que celui d’un pur flâneur, un but plus général, autre que le plaisir fugitif de la circonstance.(4) Le flâneur, ici, a précisément préparé son voyage, il a déterminé les lieux qui seront visités. Le plaisir de la circonstance est toutefois également au rendez-vous : Werner Cuvelier série bien sûr des lieux qui nourrissent ses centres d’intérêt. L’imagination active associée à l’observation analytique, la démarche classificatoire caractéristique de l’art conceptuel seront ainsi révélatrice de réalité. Le monde est plein d’objets plus ou moins intéressants, déclarait déjà Douglas Huebler en 1969, je ne souhaite pas en ajouter davantage. Je préfère me contenter d’énoncer l’existence des choses en termes de temps et/ou de lieu.(5) Énoncer, oui, bien sûr, et transcrire: c’est là que se situe l’enjeu.
Que nous donne-t-il donc à voir ? Dans le premier cas, celui du S.P. XXII, une série de 24 dessins, des lignes sinueuses tracées à l’encre de chine sur un fin quadrillage au crayon, les latitudes Nord Sud, nous précise Werner Cuvelier, ajoutant que « le centre des lignes raccordent les points extrêmes correspondant au centre des feuilles ». L’ensemble, accroché en une longue ligne, est monumental, d’un un seul élan entrecoupé toutefois : ici, deux dessins sont placés verticalement, là trois autres brisent le rythme horizontal. Ces lignes serpentines nous semblent abstraites et imaginaires ; il nous faut consulter le catalogue qui accompagne l’oeuvre pour retomber dans un réel que Werner Cuvelier ne quitte jamais. Ces dessins représentent un itinéraire, une traversée de la France, un parcours à la découverte des mégalithes, dolmens et menhirs que, d’étape en étape, Werner Cuvelier mettra en connexion. La règle est simple : sur l’aller, il les photographiera du nord au sud, sur le retour du sud au nord. Le tracé est minutieusement préparé (2-5 juillet 1975 pour l’aller, 25 au 28 août pour le retour), les nationales et départementales listées, les étapes fixées. Quatorze menhirs et dolmens sont au programme de l’aller, de L’Écluse dans le département du Nord à Lussac en Gironde, neuf sur le retour, de Saint Polycarpe dans l’Aude à Bois les Parony dans l’Aisne. Soit deux parallèles, traversant le territoire, une façon très personnelle de considérer la géographie mégalithique, alors que foisonnent les théories sur leur orientation par rapport aux mouvements des corps célestes et autres considérations d’ordre ésotérique. En préparant son voyage, Werner Cuvelier ne se tourne d’ailleurs pas vers la littérature savante, les annales archéologiques, les atlas minutieusement tracés, non, il utilise une seule source, un livre à succès, le Guide de la France Mystérieuse, paru en 1966 aux Éditions Tchou. Et il y fait explicitement référence dans son catalogue : chaque photographie est sous-titrée par un extrait du livre. La silhouette du Diable, Un menhir dans une chaussure, Le réveillon du menhir, Un trésor à saisir vite, Un dolmen où la vierge fait sa toilette, Un menhir controversé, Les fantaisies de Gargantua, Sacrifices humains, La chaise des morts, Invisible mais honnête, Dans la foulée de Gargantua, Tombes de diamant pour les Fées, Il grandit chaque année, Le menhir ou sont payés les impôts, La Fée a laissé son fauteuil, ou encore ce singulier : Le menhir est arrivé en retard. Le Guide de la France Mystérieuse fait évidemment la part belle aux légendes, traditions, mythes, croyances, mystères au sens médiéval, peurs ancestrales et puissance quasi miraculeuse, liens entre la vie et la mort que suscitent ces pierres levées, objets de fascination depuis la nuit des temps. C’est cela aussi que Werner Cuvelier met en connexion, toute cette énergie que dégage ces mégalithes, énergie qui a nourrit la conscience collective, que l’on considère ces monuments néolithiques d’un point de vue cosmotellurique ou pas. Il nous reste donc 24 dessins, une série minimale, qui comme les objets que ces tracés connectent, convoquent l’énigme et le pouvoir de l’imagination.
(…)
Connexions, relations… Il est clair que les travaux de Werner Cuvelier sont à mettre… en relation avec l’attitude prospective et les activités du groupe CAP fondé en 1972 par Jacques Lennep, cet art relationnel tel que définit par CAP, empreint de structuralisme, de sémiotique, un champ impliquant participation et interaction, s’appuyant sur cette affirmation : toute perception implique des connexions et relations. C’est l’identification du réel par le moi qui le fait exister, par le truchement de la mise en relation, écrit Sébastien Biset. Werner Cuvelier témoigne au fil de ses travaux d’une même approche systémique, favorisant l’émergence de l’idée relationnelle, au croisement des notions d’interdisciplinarité, d’environnement, de structure, de système ou de communication.
(1) SP XVII. Note dans le Tekenboek I
(2)Exposition individuelle Werner Cuvelier, Connexions – F 1975, Elsa von Honolulu Loringhoven galerie. 7-28 février 1976. Texte d’introduction Jan Vercruysse. Communiquéde presse : archives de l’artiste
(3) Exposition personnelle, Werner Cuvelier, Connexions & Relaciones, galerie l’A, Liège 12 – 30 juin 1980. Communiqué de presse : archives de l’artiste.
(4) Charles Baudelaire, « Le peintre de la vie moderne », dans OEuvres complètes, éd. Y. G. Le Dantec et Claude Pichois, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1964, p. 1163.
(5) January 5-31, 1969, New York, Seth Siegelaub, 1969.
(6) Sébastien Biset, Le paradigme relationnel, aspects fondamentaux des arts relationnels (1952-2012), dans Koregos, revue et encyclopédie multimédia des arts.
Le Salon Art On paper, salon international du dessin de Bruxelles, initialement réservé au dessin contemporain s’ouvre désormais au dessin moderne et ancien. La galerie propose dès lors des pastels de Maurice Pirenne (1872-1968). Nous avions consacré une importante exposition à Maurice Pirenne, à la galerie, durant l’été 2015.
(…) La carrière de Maurice Pirenne est particulièrement longue et féconde 4. Né en 1872, deux ans avant le premier Salon des Impressionnistes, il quitte Verviers en 1893, s’installe à Gand, où il fréquente les salles de dessin du cercle artistique, rallie Paris en 1895 – il y restera trois ans –, il y suit, entre autres, l’enseignement de Bonnat, copie les maîtres, Vermeer, Chardin, surtout Chardin, Toulouse Lautrec, Degas qui marque d’ailleurs un certain intérêt pour les œuvres du jeune artiste. Il revient en Belgique, s’installe d’abord à Bruxelles, puis rentre – définitivement – à Verviers en 1900. Ses œuvres de jeunesse témoignent déjà de sa très grande capacité d’observation. Son premier envoi date de 1893, Le fossé d’Othon, qu’il montre à l’Exposition générale des Beaux-Arts de Bruxelles. Avant la première guerre, il participe à un nombre considérable d’expositions, envoie ses œuvres aux Salons triennaux de Gand, d’Anvers, de Bruxelles, est reçu en 1900 et 1903 à La Libre Esthétique, participe au premier Salon des Indépendants à Bruxelles en 1904. Sa première exposition personnelle a lieu à Verviers, à la Société des Beaux-Arts, en 1914. Dès ce moment, il n’exposera que très épisodiquement en dehors de sa ville natale. Conservateur du musée de sa ville dès 1912, il s’attache très particulièrement aux paysages urbains et encore campagnards de sa ville ; sa pratique picturale se fond à ses intérêts professionnels. En fait, Maurice Pirenne a entamé une très progressive réclusion. Qu’importe les circonstances de la vie, cette retraite est une libération, c’est une participation strictement contemporaine à l’essence d’un monde: le nôtre aujourd’hui immédiat et pourtant mystérieux. L’œuvre d’art est le produit d’une passiondomptée, écrit-il. La passion seule, le dompteur seul ne peuvent produire rien qui vaille . Il n’y a que la nature et moi, ajoute-il ; il n’y a que la nature, dont je fais partie. La nature c’est moi, moi c’est la nature. La nature c’est tout. Voilà l’assise de la philosophie de Pirenne 5 qui conclut : Je me fiche de l’art et de la poésie tout autant. Seule la vérité m’intéresse. Dès lors, il s’agira de douter de tout, même de l’impossibilité des miracles.
Un premier pastel attire mon attention, l’ombre d’une femme à sa fenêtre, un soir lumineux de juin. (Soir, 1929). Maurice Pirenne peindra de très nombreuses fenêtres, analogie visible du tableau depuis les écrits d’Alberti, le tableau comme une fenêtre ouverte tandis que la fenêtre du regardeur est part de l’œil. La lectrice à la plante verte (1936), La lecture à la fenêtre (1948), L’espagnolette (1949), L’hortensia dans la cour (1950), La pomme (1953), L’été au jardin (1951), Le balcon (1959) ou La chaise et le balcon (s.d.) ou encore Le balcon avec récipient (1959), L’autoportrait à la visière (1960), La cage d’escalier (1961), La table et les deux crayons (1962), Le pot à tabac (1967), et ce ne sont que quelques exemples, tout est occasion d’ouvrir les fenêtres de la maison. Restez enfermé chez soi n’empêche pas de regarder par la fenêtre ce qui se passe, écrit toujours Pirenne. La fenêtre, en effet, n’est pas que fabrique du paysage. Il s’agit, et je reprend ces mots à Gérard Wajcman d’ouvrir une fenêtre non sur ce qui est peint, mais pour peindre, ouvrir une fenêtre non sur le visible, mais pour voir. La fenêtre, poursuit Wajcman, importe à chacun, personnellement, à notre être intime, elle emporte, implique la façon dont nous nous tenons dans le monde au regard du monde. Elle est aussi ce qui enferme notre intimité, ce qui permet qu’il y ait un lieu intime, qui soit chez soi, qui soit soi 6. Ouvrir une fenêtre, c’est habiter le monde, même a distance. Et, au plus Pirenne habite le monde, au plus le champ se resserre, dans un univers que le plus banal des objets finit par exprimer tout entier. En fait, c’est l’infini qui se trouve à la pointe de ses pantoufles, l’infini de la vision, l’infini de la peinture cernant des objets définis. Lorsqu’il peint une cheminée d’usine, il note : Une cheminée d’usine fumant dans l’espace infini et un moineau qui passe. La cheminée de l’Intervapeur, dans le ciel de Verviers, est sa colonne de Brancusi. Peut-être est ce à tout cela que pensait André Blavier, l’indéfectible ami et défenseur, évoquant l’intimisme cosmique de la peinture de Pirenne.7
Ce que nous voyons, constate en effet Pirenne, s’étend sans limites, dans tous les sens. L’œil n’est pas plus arrêté que la main qui palpe une sphère. Comment un peintre pourrait-il arriver à représenter ce qu’il voit alors que forcément sa représentation s’enferme dans un cadre ? Il n’y a dès lors plus que le voyage autour de sa chambre qui lui soit nécessaire. Peindre de petites choses, un pot qu’il soit de terre ou d’étain, un robinet, une chaise, une porte, une cruche, une pomme sur un appui de fenêtre, un citron, une pipe, une allumette, des bouteilles ou un pot d’onguent. Maurice Pirenne a entrepris, souligne Jean-Marie Klinkenberg, un long mouvement de dépouillement. Le repli pirennien va plus loin encore qu’on ne le croit: au delà des dimensions du plus petit objet discernable. La chose déjà refoulée n’est bientôt plus là que par indice: la vibration que laisse l’orange quand elle n’est plus, l’ombre d’une ficelle sur un mur nu. Car après la mort de l’objet, il reste la vision pure.8 Se consacrer à peindre des natures mortes, c’est ce que Maurice Pirenne appelle un renoncement, renoncer à tout ce qui dans l’art de peindre n’est pas purement de la peinture. La langue anglaise serait ici plus précise : natures mortes, still lifes, vies silencieuses. Les vingt dernières années d’activité de Maurice Pirenne sont jalonnées d’une remarquable série de pastels de petite taille, aux tons sourds, ponctués de touches éclatantes, pastels à peine fixés sur le papier afin d’en conserver toute la clarté intérieure. Pirenne peint désormais la vibration lumineuse de l’essence même de l’objet. Sa vision transcende l’objet représenté, elle l’inscrit dans un monde toujours présent, car Pirenne déborde du cadre comme en témoigne ses singuliers hors-champs quasi cinématographiques. En fait, il voit le monde.
Maurice Pirenne disparaît en 1968, quelques mois après Marcel Duchamp et René Magritte. Quelques jours avant sa mort, il peint encore.
4 Concernant la biographie de Maurice Pirenne, on se référera à l’excellent mémoire d’Anne -Véronique Dossin sur Maurice Pirenne, Université de Liège, année académique 1969-1970.
5 Cette question a parfaitement été soulignée par Guy Vandeloise, Maurice Pirenne, avec des fragments de lettres de Noël Arnaud, Marcel Havrenne, René Magritte, Roger Rabiniaux, Maurice Rapin, Clovis Trouille, une postface d’André Blavier et des Extraits de la Poubelle de Maurice Pirenne, Temps Mêlés, Verviers, 1969.
6 Gérard Wajcman, Fenêtre, chroniques du regard et de l’intime, Lagrasse, Verdier Collection, Philia, 2004, p.26.
7 André Blavier a écrit divers textes sur Maurice Pirenne, de 1954 à 1994. Le dernier est paru dans : Maurice Pirenne, Une Chambre à Soi, publication du Centre d’Art Nicolas de Staël, Braine l’Alleud, 1994. Cette notion d’intimisme cosmique apparaît, entre autres dans : André Blavier, préface à l’exposition Maurice Pirenne, galerie Valère Gustin, Liège, 1979.
8 Jean-Marie Klinkenberg, dans Une Chambre à Soi, publication du Centre d’Art Nicolas de Staël, Braine l’Alleud, 1994. Ce texte, a été repris et enrichi dans : Jean-Marie Klinkenberg, Voir faire/Faire voir, Essai / coll. Hors collection, 2010
Lexique
POUBELLE
Vient par antonomase de Poubelle, nom de famille de son inventeur en 1884, le préfet de la Seine, Eugène Poubelle. Récipient destiné à recevoir les détritus. En informatique, mécanisme logiciel qui permet de mettre à l’écart des fichiers qu’on envisage de supprimer. Dans le cas de Maurice Pirenne, un ensemble de notes quotidiennes sur petits papiers récupérés (parfois ses extraits de banque), écrites au crayon, à l’encre, parfois au crayon et repassées à l’encre, fort souvent biffées et raturées, qu’il décide de ne pas jeter. Peut-être, par extension, l’objet qui les contient. Non datées, ce sont des réflexions générales et singulières, rarement des citations, plutôt des maximes, un fil conducteur de pensées qui touchent à l’art, à la culture, à l’individu, à l’éthique, à des attitudes de vie. Pirenne n’y évoque jamais explicitement ses œuvres, mais y aborde ses préoccupations, rend hommage aux maîtres du passé qu’il affectionne, critique parfois ses contemporains. Généralement brèves, stoïques même, incisives souvent, l’ensemble, plusieurs centaines de notes, nous éclaire sur sa personnalité et les choix qui l’animent. Quelques exemples :
Combien de légèretés sont lourdes, lourdes de conséquences.
Un Braque, c’est un Chardin déshabillé, dit-il. Mieux : un Braque c’est le squelette d’un Chardin. Se trouver devant un squelette impressionne plus que se trouver devant un homme. N’empêche que se trouver devant un homme de chair et d’os, vivant, est quelque chose de plus.
Il faut aimer son temps comme on s’aime soi-même. Mais aimer c’est tout autre chose qu’admirer.
La plupart des gens sont tellement occupés : ils n’ont le temps de rien faire. Ce sont les oisifs qui font quelque chose.
Correction bien ordonnée commence par soi-même.
A les entendre, il semble qu’il n’y ait qu’une chose d’admirable dans l’œuvre de Ingres ; la vertèbre de trop dans le dos de l’odalisque.
J’ai fait le tour du monde, me dit l’un ; moi, me dit l’autre, j’ai fait cette table. Je la regarde, elle est solide et bien proportionnée, un bon ouvrage. Je ne sais si le tour du monde de l’autre a été aussi bien fait.
Un peintre était en contemplation dans sa cuisine devant une pomme de terre. Il n’y a rien au monde de plus beau, dit-il. Tout ce qu’il y a au monde est aussi beau, mais de plus beau, il n’y a rien.
Un chien s’éveille, regarde, lève la patte et puis se rendort : et la caravane passe.
Maurice Pirenne a décidé lui-même d’en publier quelques-unes. Une première fois, sous le titre de Réflexions et Apostrophes, dans un tiré à part non daté du Bulletin de la Société des Beaux-Arts de Verviers, une seconde fois en 1954 dans le n°12 de la revue Temps Mêlés, éditée à Verviers par André Blavier, sous le titre, explicite cette fois quant à l’intitulé de cette notice : Extraits de ma Poubelle. Guy Vandeloise a également fait une sélection à l’occasion de la parution de son ouvrage en 1969. Aujourd’hui, l’ensemble de ces notules est conservé dans les archives d’Andrée Blavier, précieusement serrées dans les boîtes de papier photo Ilford dont elles épousent parfaitement le format et dans quelques enveloppes. Lors de leur consultation, j’ai trouvé sur l’une de ces enveloppes l’avertissement suivant : Ne pas jeter à la poubelle.
INTERVAPEUR
C’est en 1937 que fût construite l’Intervapeur, dans le but d’alimenter en chauffage les nombreuses usines textiles de Verviers et, plus tard, des maisons privées. Maurice Pirenne a peint de nombreuses cheminées dont celle de l’Intervapeur. Elles sont le signe d’une région industrielle qui a trouvé en elle ses moyens de subsistance et son prestige. Maison en construction et cheminée Intervapeur, un pastel de 1948, représentant la construction d’une maison après guerre, en contrehaut d’une rue aux petites maisons ouvrières, la cheminée de l’Intervapeur en arrière plan, un pré où paît un mouton à l’avant plan, est teinté d’une ambiance presque surréelle. Dans une récente exposition, ce pastel était voisin d’un autre Maison en construction (1948) ainsi que de Fumée de train (1933), un pastel dans les tons gris représentant un paysage vallonné traversé de part en part par une fumée de train. Happant ces trois œuvres d’un seul regard, le comédien et réalisateur de cinéma Bouli Lanners y vit un saisissant raccourci d’une image de la Wallonie. De sa formation aux Beaux-arts de Liège, les films de Bouli Lanners ont gardé une indéniable picturalité, sorte de tableaux mouvants exaltant les paysages de sa région d’origine.
La galerie participe à Art On Paper, Brussels International Drawing Fair et présentera des oeuvres de : Werner Cuvelier, Maurice Pirenne, Sandrine Morgante et Valérie Sonnier.
Dates
05 > 08.10.23
05 : sur invitation uniquement 06 > 08 : jours publics
Heures d’ouverture
11:00 – 19:00
Adresse
Gare Maritime — Tour & Taxis Rue Picard 11, B-1000 Bruxelles
Accès Gare Maritime
> Parking Park Lane via Rue Picard 13 > Parking Esplanade via Avenue du Port 86C > Parkings à vélo & Villo Station à la Gare Maritime > Bus et tram à proximité > Métro Simonis, Pannenhuis, Ribeaucourt, ligne 2 et 6